{14} Drugs | The world is Falling Apart
Les choses fragiles tombent toujours, top tôt. Bonsoir. Je crois que j’ai plus besoin d’expliquer la situation, tout est compliqué, mais pas sans espoir.
La lumière s’éteint toujours, les ténèbres persistent à jamais. — Aiden
Aiden avait traversé tout le château, sans aucun encombre. Il arrivait près de la cellule où résidait Simha. Sa précision pour tomber tous les soldats qui en étaient proches était imparable.
De son côté, elle ne voyait rien, enfermée dans le noir. Elle entendait le son d’une lame tranchante s’approchant, sans pouvoir savoir qui en était le porteur. Aiden arriva devant le gardien de la porte, il ne lui laissa pas le temps de décrocher un mot avant de lui trancher la gorge. Il récupéra les clés de la porte pour y pénétrer. Il avait désactivé son armure pour améliorer sa furtivité. Il se présenta devant la porte, dos à la lumière.
Simha n’arrivait pas à reconnaître la personne qui se présentait devant elle.
– Qu’est-ce que vous me voulez encore ? Aiden ne répondit pas, pour ne pas attirer l’attention.
Il referma la porte, puis réactiva son armure et les bandes lumineuses qui la constituaient.
– Aiden…
– Chut, ils pourraient nous entendre, reprit l’assassin.
– Je… Pourquoi être venu me sauver ?
– Je n’allais pas te laisser avec eux.
– Tu sais pourquoi ils m’ont capturé…
– Justement. S’ils prennent le contrôle de Morjhead, je ne donne pas cher de ta peau, ni de la nôtre.
– Qu’est-ce que je leur ai fait ?
– Tu restes une arme pour eux, l’une des plus puissantes. Le maître a beau avoir bridé son esprit, si elle prend le contrôle sur toi elle ne le sera plus.
– Qu’est-ce qu’on peut faire ?
– Attendre, je ne peux pas te faire sortir d’ici seul.
– D’accord…
Aiden referma la porte et vint se placer derrière Simha, dans l’ombre. Il se plaça en tailleur, concentré sur tout ce qui pouvait passer la porte.
– J’ai passé combien de temps ici ? demanda la femme.
– Deux semaines, peut-être trois. Assez en tout cas pour que tu en perdes la notion du temps.
Aiden s’approcha de Simha, s’agenouillant derrière elle. Il découvrit des cicatrices sur son dos, comme si on lui avait arraché quelque chose.
– Pourquoi il te faut autant de temps ? fit Aiden à voix basse.
– Qu’est-ce qu’il se passe ?
– Si l’on reste trop longtemps ici, on va attirer les renforts. Et tu n’es pas en mesure d’utiliser tes pouvoirs.
Aiden s’assit à nouveau derrière elle, la serrant dans ses bras. Presque une heure s’écoula depuis son arrivée, et bientôt dix soldats morts dans la cellule. Aiden voulait gagner du temps, mais il savait que ça ne pourrait durer éternellement. Puis une petite lueur apparut sur le sol, déployant une grande tour de lumière bleue. Un homme, avec une cape en plume de corbeau, en sortit, frappant son bâton au sol pour illuminer les yeux du corbeau qui l’ornait.
– Ah, Nekho, enfin vous voilà.
– Monsieur, fit le mage faisant révérence.
– Cette cape…
– Je m’expliquerai, plus tard si vous me le permettez.
– J’ai besoin de renforcer les pouvoir de Simha.
– Attendez-moi, je m’en occupe, dit-il passant en forme de corbeau pour attirer des gardes.
– Je vais avoir besoin de toi. Si faible, je ne pourrais pas t’aider.
– Je ne veux pas utiliser mes pouvoirs… dit-elle hésitante.
– Et je ne veux pas te laisser mourir ici. Je t’en prie.
– Capturez ce corbeau ! fit un des gardiens dans le couloir.
– D’accord, reprit Simha.
Nekho le guida dans la cellule, puis lui lança un sort pour le rendre inoffensif, comme une sorte de stase. Il se tourna vers Aiden courbant l’échine.
– Je te l’offre, lui dit Aiden tendant son bras pour l’aider à se relever.
Ses ombres prirent place derrière elle, l’aidant à absorber l’énergie de l’homme. Il s’effondra et elle s’en alla vers le couloir. Aiden recueillit une partie des ombres qu’elle laissait derrière elle, tendant sa main vers Nekho.
– J’aimerais savoir ce qu’ils lui ont fait, fit Aiden.
– Pour que votre esprit n’ait plus d’effet ? Je pense que vous ne voulez pas le savoir. Oh, d’où viennent ses cicatrices ? demanda-t-il en observant le dos de Simha.
– Ils ont déjà essayé.
– Oh ! Vous pensez en être capable ? demanda le mage.
– En espérant que sa confiance soit plus forte que mon esprit.
– Audacieux.
Les trois arpentaient les couloirs en quête d’une sortie. Après avoir traversé la moitié du château, Simha s’arrêta devant une porte en fer.
– Je ne veux pas y retourner, dit-elle.
– Alors, passons ailleurs, reprit l’assassin.
– C’est le seul moyen d’accéder à la sortie.
– Nekho ?
– Les pierres antiarcane ne fonctionnent qu’une fois, répondit le mage. J’ai pu entrer, mais je ne peux nous emmener loin d’ici.
– Qu’est-ce qu’il y a là derrière ?
– Un voleur d’esprit je dirais.
– Ce n’est pas un problème. Attendez-moi, fit Aiden.
– Fais attention, je t’en prie, fit la femme.
Il passa la porte, la salle était une grande arène, seul son centre était éclairé. Il s’y dirigea et s’assit pour attendre son adversaire. Nekho observait à l’aide de sa magie ce qu’il se passait à l’intérieur.
– Comment oses-tu ? fit une voix lente et sombre.
– Laisse-moi passer, je te laisserai la vie sauve.
– Jamais.
– Alors, viens m’affronter au lieu de te terrer dans l’ombre.
– Tu le regretteras.
– Je n’en serais pas aussi certain.
Le voleur d’esprit est une des grandes classes du royaume de l’Effroi. Ils capturent leurs adversaires et aspirent lentement leurs âmes pour les faire souffrir. Il est utilisé pour soutirer des informations aux ennemis en pliant leur volonté à l’extrême. C’est le pouvoir originel de l’Effroi, avant qu’il ne devienne bien plus gangrené.
Aiden déploya son sabre pour se jeter sur son adversaire, l’assénant d’un coup au torse.
– Comment ? s’étonna le démon.
– Ton pouvoir n’a aucun effet sur moi, tu m’indiques en plus ta position, dit Aiden éteignant son armure, à ton tour.
– Tu ne m’échapperas pas !
Le monstre traversa la zone d’ombre et attaqua sans jamais toucher Aiden, il restait invisible à ses yeux.
– Pourquoi cela ne marche pas ?
– Tu peux contrôler un homme, mais tu ne peux contrôler une machine ! fit l’assassin se replaçant dans la lumière. Fini de jouer, affronte-moi.
C’était une bête difforme, une sorte d’esprit en robe grise, entouré de chaînes. Le visage abstrait, seule la bouche s’y distinguait.
– Ne crois pas une seule seconde que tu peux me faire peur, fit Aiden.
– Je ne cherche pas ta peur, juste ta mort.
Aiden esquiva les deux attaques de son ennemi, puis planta sa lame dans le torse du monstre. Il s’effondra le long du sabre. Son pouvoir s’empara d’un nouvel anneau. Il devint noir, parcouru de fissures illuminées en bleu. Il se remit en tailleur, dans la lumière, patientant la lente ouverture des deux portes.
– Ah, un ennemi en moins, fit Nekho pénétrant dans la pièce.
– Il en reste encore un. On pourrait l’éviter, mais je refuse de le laisser en vie, dit-il en regardant Simha.
– Non, non je ne veux pas, reprit la femme.
– Je peux t’aider à la contrôler.
– Et si elle le garde le contrôle ? Et si tu n’as aucun contrôle sur elle ? – Alors je la supprimerai, reprit l’assassin froidement.
– Je ne sais pas.
– Fais-moi confiance, rien qu’une fois.
– Je pense qu’il sait ce qu’il fait Simha, répliqua Nekho.
– D’accord, dit-elle après quelques secondes de réflexion.
Elle se dirigea vers Aiden et s’assit devant lui. Il lui tendit ses mains. Elle y posa les siennes puis il ferma les yeux. Son corps commença à s’embrumer, ses ombres reprenaient le dessus. Ils restèrent quelques minutes dans cette position, puis Aiden ouvra ses yeux vers Simha.
– Prends ton temps.
– Morjhead.
Sa peau prit une teinte bleue, nécrosée, quelques symboles d’une langue ancienne se dessinèrent sur ses bras. Ses yeux prirent la lueur rouge qui lui était si particulière. Des ombres parcouraient la salle, Aiden avait replié son casque et Nekho s’était mis en stase pour observer le château. Aiden s’était relevé, Simha tournait dans la pièce, puis vint se placer devant l’assassin, menaçante.
– Bonjour, fit l’homme au corps robotique.
Elle ne répondit pas.
– Comprend-elle ma langue ?
– J’en doute, monsieur, répliqua Nekho.
– Simha devrait. Seulement, elle n’a aucun contrôle.
– Laissons-lui le temps.
Une dizaine de minutes s’écoulèrent. Aiden anima son dragon fantôme au-dessus de son épaule. Il était plus petit que d’habitude, orange et transparent. Simha était intriguée par cette apparition, il dirigea son dragon vers Nekho, elle le suivit.
– Intéressant, fit Aiden.
– Qu’est-ce qui l’intrigue, le dragon ou son esprit ?
– L’esprit, si elle arrivait à le dépasser elle m’aurait déjà tué.
– Vous pensez qu’elle peut reprendre le contrôle ?
– Vient Simha.
Elle tourna la tête violemment vers Aiden puis s’y dirigea, avec une contrainte visible.
– Elle m’écoute, c’est déjà un bon début.
– Que me veut-il, mortel ? demanda la femme d’une voix déchirée.
– J’ai besoin de retrouver le seigneur de l’Effroi, et de le supprimer par la même occasion. Il représente une menace pour nous, et il te persécute depuis longtemps.
Elle disparut devant lui, sans aucune raison.
– Vous savez déjà où il est ? demanda le mage.
– J’ai juste envie de la faire réagir, je ne sais pas de quoi elle est capable, lui si.
– Alors, allons-y.
Aiden avait perçu ce qu’il cherchait chez Simha, cet être démon, qui résidait en elle depuis des années. Cependant, il n’avait pas le contrôle qu’il souhaitait sur elle. Pourtant il savait éperdument ce que cherchait Morjhead. La tête de celui qui tenait ce château.
Aiden avait parcouru presque tout le manoir, mais il restait encore une chose, un étage. Aiden et Nekho avançaient prudemment, sans pour autant avoir la crainte de tomber sur des démons.
– Vous ne m’avez toujours pas raconté d’où venait cette cape Nekho.
– Votre frère l’a déjà compris mon ami, répondit le mage.
– Elle appartenait à votre père. Je suis fier que vous ayez accepté le titre de Gardien.
– Je n’ai pas vraiment eu le choix.
– Mais vous le méritez, c’est tout ce qui importe.
– Pensez-vous que Simha a compris ce que vous venez chercher ici ?
Aiden ralentit ses pas, fixant l’anneau qui venait de s’attacher à son doigt.
– J’en doute.
– Pourtant vous pensez qu’elle n’acceptera pas ce pour quoi vous êtes là.
– Ais-je le choix ? demanda Aiden la voix un peu tremblante.
– Nous avons toujours le choix.
Les deux amis avancèrent quelque peu encore, pour arriver dans une grande salle, une salle du trône.
– Monsieur, bien à vous, fit Aiden en entrant.
– Qui ose ? fit une voix sombre et lente.
– Je me présente, je m’appelle Aiden, et voici mon acolyte, Nekho.
Le mage courba l’échine à son tour, retenant sa cape avec son bâton.
– Disparaissez !
– Non, j’ai quelque chose de mieux à vous proposer. Vous relâchez la femme, et nous partons, sans encombre.
Durant le peu de voyage qu’ils avaient fait sans Simha, elle avait rejoint la salle, affronté celui qui s’oppose à Aiden, et perdu. Il l’avait attachée à droite de la salle. Puis quelque chose se leva du trône duquel Aiden se rapprochait. Une grande masse grise, en armure luisante, rouge comme Simha. Il portait une armure métallique, une capuche sur la tête, qui cachait entièrement son visage, deux grandes cornes sur le torse qui s’envolait et huit épées flottaient derrière son dos.
– Misérable ! dit-il lançant un grand coup d’épée à Aiden.
– Aiden ! fit la femme.
Simha avait repris connaissance, au moment où le démon s’en prit à Aiden. L’assassin eu quelque peu de mal à se relever cependant.
– Pas mal, j’avoue que je ne l’avais pas vu venir, fit l’assassin.
– Tu n’as aucune chance, fuis tant que tu le peux encore.
– Non, je suis ici pour toi, dit-il dégainant son sabre, et je ne partirai pas sans mon trophée. Nekho, occupe-toi de Simha.
– Tout de suite monsieur, répliqua le mage.
– Montre-moi que tu as la valeur pour être un grand chef de l’Effroi ! s’exclama Aiden.
– Pauvre fou.
Le démon se jeta sur Aiden, l’entourant d’une immense vague d’ombre, noir et rouge. Même Nekho n’arrivait pas à percevoir à travers. Il se passa quelques secondes où Simha s’inquiétait de ce qu’il se passait dans la brume et où Nekho restait confiant, toujours. Puis, les bruits de lames cessèrent, enfin un gémissement se fit entendre, une douleur, immense. Simha ressentit alors un relâchement, toute l’emprise qui pesait sur ses épaules venait de disparaître, ainsi que la brume du démon devant Aiden. On ne voyait que l’assassin, debout. Deux bras lui avaient poussé sur le dos, l’un d’eux avait transpercé le démon et éteint la lueur que son corps produisait.
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