{17} To be Free | The hardest part, is always to forgive ourselves
On porte toujours l’espoir dans les personnes qui semble l’irradier. Certaines fois, ça ne marche pas comme ça. Bonsoir. Aiden avait disparu, Simha envoyée pour le retrouver. Le Nouvel An était arrivé et quelques jours après, Nekho avait décidé de réunir tout le monde, après leur attaque sur le château de l’Effroi.
Tu crois qu’on peut racheter toutes nos fautes du passé ? — Naia
Chacun arrivait l’un après l’autre, même s’il ne restait pas grand monde ne vivant pas dans le manoir, à part Wolrad, Idan et Jared. Lars et Naia attendaient dans le salon que tout le monde soit présent, puis Nekho fit son entrée.
– Vous vous demandez certainement où Aiden a disparu, fit le mage.
– C’est lui qui devrait être là à nous parler, pas toi ! répliqua Idan.
– J’en suis conscient, mais ce n’est pas possible.
– Alors, explique-nous ce qu’il s’est passé dans le manoir, répondit Wolrad.
Lars était préoccupé par ce que pensait Naia, qui semblait perdue dans ses pensées depuis quelques minutes.
– Toute cette attaque n’avait que pour but de sauver Simha. C’est ce qui a été fait, mais il y a toujours plus. Aiden fit quelque chose, pour tuer de sang-froid le propriétaire du château.
– Et nous sommes supposés faire confiance à ce monstre ?
Idan réagit au quart de tour, partant vers la cuisine. Les autres en firent de même. Naia laissa ses yeux se perdre dans quelle chose qui paraissait horrible pour Lars, puis partie, vers le jardin.
– Je suis désolé, fit Nekho.
– Non, tu aurais peut-être dû tourner les choses autrement, reprit Lars.
– Et leur cacher la vérité ? Ce n’est pas ce que souhaiterait votre frère.
– Tu as raison.
– Je n’ai pas à les contrôler, mais vous pouvez réparer les choses que je juge juste, mais qui n’ont pas le bon effet.
– Je le ferai.
Alors Lars prit la direction du jardin à travers ce couloir où trônait l’eau. Lars avait cette habitude, toujours faire trembler le flot qui coulait lorsqu’il avançait. Rien n’était plus satisfaisant que de brider la maîtrise qu’avait l’eau sur son courant. Il arriva dans le jardin et vit Naia qui regardait la cascade de la seconde terrasse. Il s’avança doucement vers elle, puis arriva à ses pieds. Elle ne le regardait pas, elle était trop perdue dans les flots de la cascade.
– J’ai eu l’impression de manquer un train, que s’est-il passé ? demanda l’homme.
– Je sais ce que j’ai entre les mains. Si je n’ai jamais eu mon père pour m’expliquer son pouvoir, je sais ce qu’il peut faire.
– Tu veux m’en parler ? demanda-t-il alors qu’il se tenait au centre de l’autel de méditation.
– Je pense que tu ne me verras plus jamais de la même manière, répondit-elle s’asseyant devant lui.
– Cela ne changera rien à ce que je pense de toi.
Elle expira un grand coup, comme si cette histoire lui pesait plus sur le cœur que son cœur lui-même.
– Il y a presque dix-ans de ça, mes pouvoirs ont commencé à s’activer. Certaines choses m’arrivaient, comme des membres qui devenaient invisibles, des objets qui disparaissaient à jamais. Je n’avais alors qu’une peur, celle de ne pas contrôler ce que cette chose en moi pouvait faire. Alors j’ai essayé de calmer les aléas de mon pouvoir. J’ai mis un an à réussir. Puis cette chose disparue, pendant quelque temps. Puis, il y a trois ans, il revint, mais pas comme je l’avais connu. Il me transforma, me rendit violente. Ce jour-là, ma mère arriva, énervée. Elle se mit à crier parce que je n’avais pas fait ce qu’elle m’avait demandé. Je n’ai pas, réussis à m’écouter… dit-elle alors qu’elle tombait en sanglot. Alors cette chose me l’a fait tuer ! Lars essuya les larmes qui coulaient sur son visage, presque fracassé par son histoire. Il lui laissa du temps, puis elle reprit son récit.
– Je n’avais aucun remords, jusqu’à ce que je passe la porte de la maison et que je reprenne mes esprits. Je n’ai jamais réussi à rentrer à nouveau dans la maison, ni avant ni maintenant. Alors depuis je me force à contrôler cette horreur, pour que jamais ce que j’ai fait ne se reproduise.
– Je suis désolé, reprit Lars.
– Tu n’as pas à l’être, je reste le monstre.
– J’ai tué mon frère de sang-froid. Encore aujourd’hui, je n’ai aucun remords sur mes actes. Alors non, ce n’est pas toi le monstre. Quelques secondes s’écoulèrent, dans un silence que seule l’eau pouvait briser.
– Ce qui compte, ce n’est pas les actions que tu as faites, mais celles que tu fais pour les réparer, reprit Lars.
– Je ne peux pas les réparer, je ne peux pas ramener ma mère puisque je l’ai tuée. Et elle ne pourra jamais me le pardonner.
– Laisse-moi te prouver le contraire.
Lars sortit un collier de sous sa tunique. Une sorte de pierre bleue luminescente, avec deux anneaux dorés qui tournaient autour, sans aucune attache. Il prit alors le cristal dans ses doigts et les pièces métalliques se stoppèrent. Quelques secondes plus tard, un étrange individu se plaça sur le bout de la terrasse.
– Bien à vous, messieurs dames.
– Cela faisait bien longtemps, Nova.
– Lars ! Que me vaut cet appel ?
Lars désigna Naia qui restait perplexe à cause de ses souvenirs.
– Que suis-je supposé comprendre ? demanda-t-il à Lars.
– Je souhaiterais que tu lui laisses rendre visite à sa mère.
– Oh !
Il se mit à réfléchir quelques secondes, regardant la fille. Puis un de ses anneaux s’illumina pour créer un portail derrière lui. Il lui tendit alors la main.
– On peut toujours tout changer, il suffit de trouver les bonnes réponses, lui dit Nova.
Elle prit alors sa main et se laissa porter. Les deux se retrouvèrent dans une sorte de monde blanc immaculé. Il semblait y avoir des choses, mais elles restaient imperceptibles.
– Où est-ce que nous sommes ?
– Vaguement, le paradis, ou vraiment pas loin je sais pas trop. Et si tu te demandes pourquoi nous ne voyons rien, parce que nous ne sommes pas morts. Cependant, je n’ai rien à faire ici. Je reviendrai quand ça sera le moment.
Il s’effaça, comme il était arrivé, pour laisser sortir une personne du brouillard.
– Maman…
Naia fondit une seconde fois en larmes, en voyant sa mère. Elle lui laissa le temps de reprendre sa voix et la guida vers un banc, qui paraissait toujours aussi immaculé pour Naia.
– Je ne sais plus quoi dire… fit la fille la voix tremblante.
– Tu n’as rien à dire, ta présence me comble de joie.
– Mais je t’ai ôté la vie, à ma propre mère !
– Je savais que ça arriverait un jour, je n’y étais juste pas assez bien préparé.
– Si tu savais à quel point je m’en veux, je ne peux pas me pardonner ce que j’ai fait…
– Tu ne dois pas t’en vouloir, reprit la mère ne Naia, parce que je ne t’en veux pas. Tu ne pouvais pas l’en empêcher.
– J’aurais dû !
– Alors tu n’aurais fait que plus de mal. Ton père m’avait prévenu. Elle détruira ce qui pour elle est le plus cher, pour trouver la lumière.
– Qu’est-ce que tu veux dire ?
– Tu devais me tuer, pour embrasser ce que tu es aujourd’hui. Je sais que tu as toujours peur de l’esprit qui réside derrière toi, mais tu ne dois pas. Dans les origines du vide, tu obtiens ce que tu refuses de détruire. Tu as détruit la colère que je t’ai portée, tu as détruit les ténèbres qui résidaient dans mon cœur à ce moment, pour qu’il t’offre la lumière.
– Tu veux dire…
– Si je regrette la manière dont j’ai agi, je suis fière ce que tu es devenu aujourd’hui.
Elle serra alors sa fille dans ses bras, laissa renaître une part d’espoir dans le cœur de Naia. Quelques minutes plus tard, Lars et Nova apparurent à côté d’eux.
– J’aimerai tellement que tu puisses rester avec moi, fit Naia à sa mère.
Lars regarda Nova, qui sentit ses yeux se poser sur lui et tourna la tête vers Lars.
– Une seconde, dit-il disparaissant pour la seconde fois.
Naia se demanda alors ce qu’il faisait, et commençait à douter de Lars. Puis Nova revint, une dernière fois.
– Ça risque de faire mal, ou de démanger, ou je ne sais pas. Après tout, je ne l’ai jamais subi. Vous deux, dit-il en le désignant, le portail.
Lars et Naia le passèrent, retournant sur la terrasse.
– Que va-t-il m’arriver ? demanda la femme.
– Vous allez revivre, je crois, répondit Nova.
– Mais, ce n’est…
– Pas vraiment possible, je sais. Considérez ça comme un cadeau de Dieu.
Alors il força la mère de Naia à revenir sur Terre, dans son corps qu’elle avait quitté il y a quelques années. Elle retrouva toute sa tête, alors Naia l’amena dans le manoir pour qu’elle puisse se reposer.
– Merci, fit Lars.
– Tu ne peux pas racheter la mort de ton frère. Mais tu peux réparer les choses différemment. Même si cette amulette appartenait à ton père, tu as choisi d’en faire le bon usage, dit-il en disparaissant une dernière fois.
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