Depuis son embauche à Mende, Flora avait pris un appartement dans le centre-ville. Un joli T3 dans une maison quelque peu rustique, mais non sans charme.
Vendredi 22 novembre 2019.
Flora envoya un message à Ethan, quelque chose qui ressemblait à ça.
« Toi, moi, chez moi. Un petit rendez-vous amoureux comme on n’en a pas fait depuis longtemps. Je m’occupe de la bouffe. »
Alors Ethan alla la rejoindre après son travail, enfin, plutôt vers les six heures et demie.
« T’aurais pu arriver avant quand même, lui dit-elle.
– Tu ne m’en voudras pas d’avoir pris une douche avant de venir quand même ? demanda Ethan.
– Prendre une douche ? Ou ta DRH ? »
Ethan s’arrêta net. Il savait que cette information viendrait aux oreilles de Flora, mais pas qu’elle le lui retournerait comme un puissant parpaing.
« C’est John qui t’a raconté que je couche avec Amélie ?
– Non ! C’est sa copine.
– Tiens donc, tu t’attaches à une fille comme amie toi. Étonnant.
– C’est donc comme ça que notre histoire finit ? dit-elle venant devant lui. Je ne te suffis plus dans un lit ?
– Tu exagères Flora, dit-il dépité.
– C’est possible. Mais tu aurais pu me dire que tu couchais avec elle !
– Tu sais bien comment je suis. On s’est séparé avec Hortense et je me suis enfermé dans ma bulle.
– Une petite bulle qui paraissait plus agréable quand elle était là ?
– Ouais, j’avais l’impression de revivre avec Mélissa, c’était assez incroyable, dit-il.
– Alors pourquoi tu l’as laissé partir ?
– Tu aurais aimé que quelqu’un te retienne en couple à la période où ta transition sexuelle est arrivée ?
– Je crois que j’aurais tué cette personne.
– Et moi j’en ai voulu au seul mec qui n’a pas réussi à comprendre que j’éprouvais toujours plus de sentiments pour les femmes que les hommes, dit-il posant son pack de bière sur la table.
– Tu l’as laissée partir parce que tu ne voulais pas qu’elle souffre, ou que tu souffres. Après tout, tant que la petite blonde éponge tes besoins.
– Comment tu sais qu’elle est blonde ? s’étonna Ethan.
– John me dit beaucoup de choses aussi, répondit Flora.
– Pas étonnant.
– Cependant, tu ne pourras nier le fait que je suis une bonne cuisinière. Je nous ai préparé un risotto, sur une recette de ma mère.
– Si tu cuisines aussi bien qu’elle ça devrait bien se passer, dit-il avant de s’asseoir. Depuis quand tu es de nouveau brune, toi d’ailleurs ?
– Pas longtemps, dit-elle avant de s’asseoir à son tour. J’ai eu envie de changer de couleur comme ça. Pourquoi ? Tu trouves que ça ne me va pas ?
– Si, répondit-il avec le sourire, ça te va très bien.
– T’as encore la photo que tu avais prise après l’arrestation de mon père ?
– J’ai encore cette photo ouais.
– Tu veux pas la supprimer ?
– C’est mort, répondit-il avec le sourire.
– Allez ! S’il te plait !
– C’est mort. Jamais je supprime cette photo. »
Le repas avança, Ethan et Flora ont passé tout le temps à jouer de leurs regards, de leurs sourires, des attentions qu’ils tournaient l’un vers l’autre. Ils s’installèrent sur le canapé, dans un vieux fauteuil qui devait arriver sur ses soixante ans.
« Y’à quelque chose qui va pas Flora, n’est-ce pas ? demanda Ethan. C’est pour ça que tu m’as demandé de venir ?
– Pourquoi tu arrives toujours à me lire alors que je ne te dis rien ?
– Parce que j’ai toujours l’impression que tu réagis de la même manière que moi. Quand quelque chose ne va pas, tu le caches, tu te caches, et tu les laisses les autres avancer sans toi.
– Et toi tu arrives avec tes grands sabots. Et tu me fais, bouge-toi ! lui dit-elle.
– Jamais je te pousse à faire quelque chose que tu ne veux pas. Je sais qu’est-ce que c’est de se faire repousser et de trembler à cause de l’anxiété. »
Elle quitta le regard du garçon pendant quelques secondes, avant de le regarder à nouveau.
« Je suis toujours aussi nulle pour draguer… lui dit-elle.
– Si tu étais la seule, ça serait un vrai problème.
– Mais toi ça compte pas ! Regarde-toi, toutes les filles avec qui tu as été sont venues te voir avant que vous sortiez ensemble.
– Mais toi jamais ? Pourtant, je me souviens de toi, les yeux brillants devant Laura, alors qu’elle n’arrivait pas à cacher sa timidité devant toi.
– C’était il y a six ans Ethan.
– Et un peu plus que je te connais. Je vais t’aider. On peut essayer de faire un double rencard, un truc du genre.
– Tu te sens prêt à Charo n’importe qui juste parce que tu veux m’aider à draguer ?
– Rien ne m’empêche de faire venir quelqu’un que je connais et de lui faire jouer le jeu, fit Ethan.
– Comme ta RH ?
– Sinon je te présente ma RH. J’ai rien qui ne me prouve qu’elle ne s’intéresse qu’aux hommes. »
Cette phrase avait fait rire Flora, comme souvent. Ethan réussissait toujours à lui donner le sourire.
« Tu veux vraiment faire ça ? demanda Flora.
– Ouais, j’ai envie d’essayer. Je suis toujours là pour essayer de t’aider. Rien ne sera aussi dur que d’aller dénoncer ton père, tu sais ?
– Je sais oui… Tu n’as pas besoin d’en faire autant pour moi, lui dit-elle.
– Si, tu l’as fait avec moi. Tu m’as donné toute la confiance que je n’avais pas quand j’ai commencé à m’intéresser à Mélissa. Puis tu m’as empêché de me dire que notre histoire n’avait aucun sens, empêché de ne pas aller la voir parce que j’étais rongé par l’anxiété. Tu m’as toujours poussé vers le haut, comme j’ai toujours essayé de le faire. Pour l’instant, c’était beaucoup moins tourné vers ta vie sentimentale. Mais ça peut le devenir. »
Ethan avait pris la main de Flora dans la sienne, alors qu’elle laissait son regard s’en aller sur ces lignes de textes qu’il avait de tatoué sur l’avant-bras.
« Je croyais que tu ne voulais pas te faire tatouer, me dit-elle.
– Tu parles de celui-là ? dit-il montrant son avant-bras droit. Je ne t’ai jamais parlé de lui, mais Axel ne m’a pas laissé sans traces.
– Le garçon que je n’ai jamais connu ?
– Lui-même, dit-il.
– Même aujourd’hui tu as encore du mal à en parler, non ?
– Je me suis fait tatouer ça parce que j’étais incapable d’éloigner la haine de tous les souvenirs que j’avais avec lui. Et j’étais incapable de supprimer de ma tête tous les souvenirs qu’il avait créé. Tout était devenu malsain, notre relation, mon cerveau, mes souvenirs, ma haine…
– Est-ce qu’elle ressemblait à celle que tu m’as montré quelquefois quand j’évoquais mon père ? »
Ethan laissa un temps de blanc. Aucun des souvenirs qu’allait chercher Flora n’était en bon état dans la tête d’Ethan. Tous deux recherchaient une certaine colère qu’il repoussait, une colère qui l’avait mené à frapper son chef avec un poing ensanglanté.
« Je crois… Je pense que c’est pire que ça maintenant, reprit-il.
– Est-ce que tu crois… Qu’un jour on se côtoiera toi et moi, mais pour des choses et des instants qui ne sont pas les pires moments de nos vies ?
– J’en ai bien l’intention oui, répondit-il souriant. Il y aura un jour où nous arrêterons d’aller chercher l’attention de l’autre parce que l’on en a besoin. Je te le promets. »
Après cela, arriva encore un Nouvel An. Un réveillon où ils s’entassaient à sept chez Ethan. Ou encore une fois, Alex, John, Chloé étaient venus. Mais avaient été rajoutés Patrick, Max et Flora. Cette nouvelle année fut très légère pour Ethan, quoique trop alcoolisée. Tout son temps perdu, il le passait avec Flora, parce que c’était comme ça que ça se passait avant, l’un toujours présent pour l’autre. Ethan retournait au travail pour le jour de son anniversaire.
Lundi 6 janvier 2020.
Quelque chose avait laissé Ethan perplexe, si on en oublie le nombre de personnes à lui avoir dit : ah, mais c’est ton anniversaire ? Il manquait quelqu’un dans l’atelier. Ethan interpella Amelie qu’il n’avait pas vue depuis fin novembre où il avait posé des congés pour la fin de l’année.
« Tu n’as pas vu Hortense ? demanda Ethan.
– Elle a posé une semaine de congé, répondit-elle. Elle me l’a demandé hier.
– D’accord.
– Y’a quelque chose qui va pas Ethan ? demanda-t-elle quelques secondes après. Viens avec moi. »
Il suivit la RH jusqu’à son bureau qu’il connaissait étrangement bien. Il referma la porte derrière lui.
« Tu penses encore à elle, c’est ça ? demanda Amelie.
– Oui effectivement, mais c’est pas vraiment ça qui me pose problème.
– Quoi d’autre alors ?
– J’ai envie de partir.
– Partir ? Tu veux démissionner ? s’étonna-t-elle.
– Tu imagines bien que je poserai pas une démission, mais oui. Il faut que je parte d’ici.
– J’ai le droit de savoir pourquoi ? Même si je te pose cette question en tant qu’amie et DRH.
– Vous, enfin, l’ensemble de l’entité créez une atmosphère anxiogène que je n’ai pas envie de continuer à supporter. J’ai besoin d’air, et j’ai besoin de temps.
– D’accord. Je pense que je peux comprendre. J’ai du mal à me rendre compte de la manière dont les chefs gèrent leurs équipes, dans l’idée où je n’ai aucune main là-dessus. Mais… Tu as une idée de la date à laquelle tu souhaiteras partir ?
– Juin, répondit Ethan.
– D’accord. Je m’occupe de faire les papiers, et je gère avec Christophe s’il refuse la rupture.
– Merci, reprit-il avec le sourire. »
Il retourna dans l’atelier, continuer le contrôle sur planche qu’il avait commencé. Corine vint le rejoindre un peu plus tard.
« Il parait que tu couches avec la DRH ?
– Effectivement oui, répondit-il. »
Il y avait quelque chose de perturbant dans l’indiscrétion qu’avait Corine avec Ethan. C’était le cas depuis qu’il travaillait ici, mais jamais elle n’était venue pour lui parler de chose qui pouvait les mettre mal à l’aise. Sa voix calme respirait une étrange bienveillance à laquelle Ethan aspirait depuis quelque temps.
« Si tu m’en parles, j’imagine que c’est parce que toute la boite est au courant.
– Disons que c’est parti d’une rumeur… dit-elle.
– Qui a fini en vérité comme à chaque fois. J’en ai marre de cette boite.
– Je crois qu’on est beaucoup dans ce cas.
– Je m’en vais de toute façon.
– Ah bon ? Tu m’abandonnes comme ça ?
– Je sais, dit-il riant. Il y aurait des tas de gens intéressants à sauver ici. Mais j’ai arrêté de vouloir sauver les autres. Il est temps que je prenne soin de moi.
– J’espère qu’au moins tu t’amuses avec elle, reprit la femme. »
Ethan retourna son regard sur elle, puis ils éclatèrent de rire, sous les yeux perplexes de leurs chefs d’équipe.
« Je ne m’amuse pas avec ses sentiments. Mais elle n’est pas une personne sans intérêts, si tu vois ce que je veux dire.
– Je vois très bien oui, répondit-elle. »
Ethan se souvenait d’Helena qui lui parlait de ses crises d’angoisse. Et, jusqu’au jour où elle les lui avait évoquées, il n’avait jamais expérimenté ceci. Mais quelque temps plus tard, vint ce soir où son cœur battait trop fort, l’empêcha de dormir. Il l’a fait paniquer, et s’est mis à battre plus vite encore. Sa crise devenait une spirale qui réussit à se calmer d’elle-même relativement facilement. Depuis ce jour-là, il en a fait d’autres des crises d’angoisses, toujours courtes, mais lancées par son anxiété. Mais pas celle-là.
Jeudi 9 janvier 2020.
Je suis sorti en panique de l’atelier quand ma respiration devenait trop compliquée. Depuis le matin, des tas de choses me traversaient l’esprit. Rien ne s’arrêtait, tout se posait ici, cassait tout ce que je pensais, laissaient mon cerveau en vrac. Puis mon cœur s’est emballé, et ma respiration aussi. Quelqu’un m’avait aperçu dehors, assit sur les escaliers.
« Ethan, est-ce que ça va ? »
Je me suis retourné vers Amelie, les yeux rougis par les larmes de ma panique.
« Pas vraiment…
– Je vais aller voir Christophe, reprit-elle. Je vais lui dire que je m’en vais et je m’occupe de te dépointer. »
Ethan alla récupérer ses affaires, ignorant totalement l’existence de tous ceux qui essayer de comprendre ce qui venait de lui arriver. Il remit tout dans sa voiture et retourna attendre la demoiselle vers les escaliers. Amelie descendit les escaliers, tendit un une cigarette à Ethan, qu’il ne refusa pas. La fille lui alluma sa cigarette avant d’allumer la sienne.
« Depuis quand tu fumes ? demanda Ethan.
– Je pourrais te poser la même question ! s’exclama-t-elle.
– Ça faisait longtemps que je n’avais pas touché à une cigarette.
– Et tu vas m’accuser de te faire recommencer ?
– Non, ça n’arrivera pas, dit-il.
– Tu veux qu’on aille chez toi ?
– Si tu veux oui. »
Ils se retrouvèrent chez Ethan, alors qu’il s’étala sur son canapé, épuisé par sa crise. Olgrim, son grand chat roux se rapprocha de lui.
« Qu’est-ce qu’il y a ? Tu viens me servir d’éponge émotionnelle ?
– Pourquoi avoir pris autant de chats ? demanda Amelie.
– Pour avoir toute la compagnie que je ne veux obtenir des humains. »
La fille vint aux pieds d’Ethan, le regardant d’au-dessus.
« Tu te moques de moi ? demanda la femme.
– Pas du tout, je déteste les humains. Moins j’en vois mieux je me porte.
– Alors tes chats sont mieux que moi ? demanda-t-elle. »
Ethan se mit à rire doucement. Quelques souvenirs lui revinrent en tête.
« Non, je pense que c’est pareil, répondit-il.
– Comment tu te sens ?
– Ça va, répondit Ethan. Je me sens essoufflé, mais ça peut aller.
– Tu veux aller te reposer ?
– Ouais, je pense, dit-il avant de se lever.
– Tu veux que je vienne avec toi ?
– Si tu en as envie oui. »
La petite aiguille ajouta trois heures, arriva à dix-huit heures, Ethan se réveilla seul dans le lit. Il prit son peignoir et sortit de la chambre. Il aperçut sa collègue assise sur le canapé entourée des chats.
« C’est vrai qu’ils sont gentils, dit-elle.
– Ça, c’est ce qu’ils essaient de te faire croire, répondit-il avec le sourire. »
Ethan vint s’installer à côté d’elle, Opale vint se poser sur ses genoux quelques secondes plus tard.
« Ça va mieux ? demanda Amelie.
– Ouais, ça va un peu mieux, dit-il la regardant avec le sourire.
– J’ai pris le temps de faire à manger. Il y a un gratin qui cuit dans le four.
– Tu n’es pas obligée d’en faire autant pour moi.
– Je sais, mais, je me sens bien à t’aider.
– Tu vas regretter si Hortense revient vers moi ? demanda-t-il après quelques secondes.
– Regretter tout ce que j’ai fait ?
– Notamment oui.
– J’essaie de ne pas avoir de sentiments pour toi, mais je crois que c’est trop tard… Mais je respecterai ce que je t’ai dit. Si elle revient, je vous laisserai.
– Je suis désolé… dit-il doucement. J’aurais peut-être dû refuser toutes les fois où l’on s’est vu pour t’en empêcher.
– Non, reprit-elle. Je me suis poussé inconsciemment à te regarder quand je passais dans l’atelier, et à venir juste pour te croiser. J’ai cherché à avoir des sentiments pour toi. Mais ne t’en fais pas, j’attendrais qu’il se passe à nouveau quelque chose entre vous. »
Ground control, What do the books say about this one now?
Now, I think we’ve, lost it all
There’s nothing to explain, The distances any more
All systems are critical
Can’t find my way back to you
Feels like there’s nowhere to go
Oh, oh, I’m, Just out here waiting for you
You say, don’t be afraid, no
If you start floating away
Hey, I promise you that we’ll be fine
Got, the universe on your side
When, you’re out in space
Don’t you be afraid
No, if you start floating away
Checkin’ in, Three hundred days with no reply now
I think I’ve, lost my mind
There’s nothing keepin’ me, From goin’ outside anymore
My systems are critical
Gotta find my way back to you
Feels like I’m drifting at all
All, all, I’m, Just out here wishin’ that you
Would say, don’t be afraid, no
If you start floating away
Hey, I promise you that we’ll be fine
Got, the universe on your side
When, you’re out in space
Don’t you be afraid
No, if you start floating away
We gotta make contact, To make it out
We gotta make contact, To make it
We gotta make up time, To make it out
If you start floating away
Hey, I promise you that we’ll be fine
Got, the universe on your side
When, you’re out in space
Don’t you be afraid
No, if you start floating away
Don’t you be afraid, no
No, if you start floating away
— All Time Low | Ground Control —
La soirée s’en alla, la neige passa quelques heures à faire blanchir les routes et la terre dehors. Ethan et Amelie passèrent la nuit ensemble, encore. Puis le soleil se leva, mais le réveil d’Ethan n’avait pas sonné. Il se réveilla seul dans le lit, avec une note posée sur son téléphone.
« J’ai coupé ton alarme, je m’occupe de ton absence, ne t’en fais pas. Prends soin de toi. Beaucoup de personnes comptent sur ta santé et ta force. »
Alors Ethan s’appliqua, se leva alors qu’il était un peu plus de neuf heures. Et la journée s’en alla, malgré la légère faiblesse mentale qui l’incombait. Il aurait préféré la compagnie d’Amelie encore ce jour-là. Mais les choses ont changé. Les choses vont changer…
Altar 7 : A Million Pieces
« Je vois bien qu’il y a quelque chose qui va pas, fit Raphaëlle. Explique-moi.
– Je suis pas amoureuse de Lena, répondis-je. »
Cette conversation avec Raphaëlle, je l’ai eue samedi. Elle voyait quelque chose que j’essayais de fuir inconsciemment. Mais je ne voulais pas m’en rendre compte.
« Bah alors ? Quitte-la ! Retourne avec Ethan.
– Non ! m’exclamais-je. Je… Jamais il voudra me laisser revenir. Regarde, je l’ai laissée tomber, pensant que j’avais des sentiments pour les femmes. Mais je me trompais depuis le début.
– Et tu crois qu’il ne le comprendra pas ?
– Je ne crois pas…
– Tu sais Hortense. Je ne le connais pourtant pas vraiment Ethan. Mais tous les longs messages que tu m’as laissés, ou les conversations que l’on a eues toutes les deux à propos de lui. Je suis persuadé qu’il est assez ouvert d’esprit pour te laisser à nouveau de la place.
– Mais ça ne sera jamais pareil ! Il a certainement trouvé quelqu’un, quelqu’un qui va pas le jeter… »
Quelque chose tremblait en moi, quelque chose perdait le contrôle et je ne savais pas comment y remédier. Raphaëlle vint me serrer dans ses bras alors que j’avais l’impression que j’allais m’effondrer.
« Ça va bien se passer Hortense, fais-moi confiance »
Je suis retourné chez Lena pour passer la nuit. Nous avons dormi ensemble. Mais quelque chose me forçait à tourner dans le lit, sans jamais trouver le sommeil. Elle était endormie, mais moi, je n’y arrivais pas. Mon cerveau paniquait de ne pas dormir, mon cœur s’emballait à ne pas réussir à stopper toutes ces idées qui volaient dans ma tête. Vint ensuite le coup de chaud, la respiration qui se bloque. Je me suis levée en panique, j’ai quitté la chambre puis je suis sortie. Il faisait froid et je ne m’étais pas habillée. J’avais beaucoup trop chaud et j’avais perdu le contrôle de mon corps. Je suis resté quelques minutes dehors, le temps que tout se calme. Quand je suis rentrée, ma compagne m’attendait en peignoir, adossée à la porte de la chambre.
« Qu’est-ce qu’il s’est passé ? demanda-t-elle.
– Je crois que j’ai fait une crise d’angoisse, lui dis-je.
– Une crise d’angoisse ? »
Je suis allé m’asseoir sur le canapé. Lena est venue me rejoindre.
« Tu en fais souvent ? demanda Lena.
– Pas vraiment… C’est la première fois, je crois.
– Je ne sais pas…
– Je ne suis pas amoureuse de toi… lui dis-je. J’ai passé ma nuit à me demander si j’avais vraiment des sentiments pour toi, ou si s’il y avait toujours quelque chose qui m’en empêchait.
– Tu ne peux pas me dire ça comme ça… dit-elle semblant avoir des larmes qui montaient.
– Je suis désolée, lui dis-je la regardant, mais je ne peux pas… »
Je me suis relevée, puis j’ai pris la direction de la chambre pour reprendre mes affaires. Lorsque je suis sorti, je l’ai vue, en pleurs sur le canapé. J’ai hésité à aller la voir, mais je lui aurais fait encore plus de mal.
Je suis rentrée chez moi. Sur le trajet, j’ai appelé Raphaëlle.
« Hortense ? Mais t’as vu l’heure qu’il est ? s’étonna Raphaëlle.
– Je viens de quitter Lena. Je tenais à te le dire.
– Quoi ? Mais, attends, quoi ?
– Je sais il est trois heures du matin, mais je te rappelle que tu m’as déjà fait un coup pareil.
– Oui, je sais. Et elle, qu’est-ce qu’elle t’a dit ?
– Je crois qu’elle me déteste, répondis-je.
– Ça se comprend. Tu vas rappeler Ethan ?
– Pas aujourd’hui, mais je vais le faire oui.
– Ça va ? Pas trop dérangée de l’avoir laissée seule ?
– Non, ça va. J’ai fait une crise d’angoisse avant de lui avouer.
– Quoi ? Mais tu m’as pas dit ça ! s’exclama-t-elle.
– Je sais, répondis-je. Mais ça va mieux maintenant, je te le promets. »
J’avais besoin de changer des choses, alors j’ai pris une semaine de congés, puis j’ai rendu visite à quelqu’un.
You know that I’ma miss you so bad
I’m leaving but I ain’t sad yet
You tell me it’ll go fast
And you’ll be here when I get back
But what if it’s the last time, the last night
We say goodbye, But I can’t fight the panic
If I’m fine, then why do I say?
I never wanna leave my home anymore, home anymore
I never wanna leave my home anymore, home anymore, yeah
If I should never leave just tell me
And you can find me back on my street
’Cause I know that you’ll be lonely
And I don’t like when you’re without me
’Cause what if this the last time, the last night
We say goodbye, But I can’t fight the panic
If I’m fine then why do I say?
I never wanna leave my home anymore, home anymore
I never wanna leave my home anymore, home anymore, yeah
’Cause lately, I’m feeling like I need, You and me to hang around
I never wanna leave my home anymore, home anymore
— Point North | Distant —
Vendredi 10 janvier 2020.
Qu’ai-je raté ? Hortense qui perd pied ? Ethan qui s’effondre encore ? Mais vous savez, cette histoire n’a pas été écrite pour voir des gens heureux. Quoi que…
Il était dix-huit heures, à peine plus. Ethan s’est laissé aller toute la journée, installé sur son canapé à jouer. Cette tirade rime presque tout du long et pourtant elle n’a rien de voulu. Alors qu’il restait perdu dans l’environnement virtuel auquel il jouait, un autre s’agita pour rejoindre la porte d’entrée.
« Qu’est-ce qu’il y a les enfants, c’est pas l’heure de manger, vous savez ? »
Et ses chats miaulaient devant la porte, sans qu’Ethan ne s’y intéresse. Pourtant, ces petites créatures n’avaient pas pour habitude de coller la porte lorsque ce sont des inconnus qui venaient s’en approcher. Alors, après quelques secondes, Ethan se tourna vers la baie vitrée pour regarder les chats. Il aperçut quelqu’un dehors, une silhouette féminine qui lui paraissait commune, mais qu’il ne reconnaissait pas. Il se leva, s’approcha de la porte, toujours sous le son des miaulements de ses quatre chats et de ses talons sur le carrelage. Il ouvrit la porte, et la personne se retourna.
« Salut Ethan, dit-elle.
– Hortense ? »
Il n’avait pas reconnu la demoiselle, qui se présenta dans un style qui n’était pas le sien.
« Je peux entrer ? demanda-t-elle ?
– Oui, je… Oui. »
Ethan perdait ses mots. Quelque peu amusant pour un auteur. Il laissa entrer la fille, qui alla jusqu’au bar et se retourna vers lui. Olgrim s’empressa d’y monter pour s’approcher de la demoiselle et renifler ses vêtements.
« Je ne m’attendais pas à ce que tu viennes me voir… fit Ethan.
– Je viens te demander quelque chose, tu as le droit de refuser. Si c’est le cas, je repartirai.
– Dis-moi, je te répondrais.
– J’aimerais que tu prennes ton plus beau costume, et que tu me suives.
– C’est étrange comme requête, reprit Ethan.
– Je sais, dit-elle, c’est pour ça que tu as le droit de refuser. »
Ethan hésita quelques secondes, puis alla dans sa chambre. Un léger sourire se dessina sur les lèvres de la femme, qui s’amusait de la joie qu’exprimaient les chats de son retour. Ethan ressortit cinq minutes plus tard, sous les yeux non sans intérêt d’Hortense.
« Tu m’as caché cette partie de ton style ! s’exclama-t-elle.
– Ce n’est pas un style que j’ai l’habitude de porter. Ça reste trop commun, dit-il. »
Il portait un blazer bleu marine, accompagné d’une chemise blanche. Un chino noir et ses chaussures en cuir noir qu’il amenait partout.
« Alors ? Où est-ce qu’on va ? demanda-t-il.
– Ça, c’est une surprise ! »
Ethan attrapa sa veste en cuir, puis se laissa guider par la demoiselle jusqu’à sa voiture. Elle l’amena jusqu’à la Croix de Saint-Privat, qui surplombait Mende depuis un de ses flancs. Elle sortit de la voiture, puis lui tendit la main lorsqu’il sortit à son tour. Ethan hésita une seconde et prit sa main. La fille les fit avancer vers le monument, alors qu’il s’y était installé un étrange restaurant. Hortense lui fit signe de s’assoir à la seule table qui s’y tenait. Elle y prit place, elle aussi, en face d’Ethan.
« J’ai raté quelque chose, c’est ça ? demanda Ethan.
– Non, c’est moi qui ai raté ton anniversaire, répondit-elle. »
Ethan se mit à rire, posant sa tête sur sa main, accoudée à la table.
« Et tu avais besoin d’en faire autant juste pour mon anniversaire ? demanda-t-il.
– Bah quoi ? Ça se fête vingt-six ans, non ?
– Il y a quelque chose d’autre Hortense, je le sens…
– Est-ce que l’on peut juste laisser passer le repas ? Et on prendra le temps de parler après ?
– D’accord, répondit Ethan. »
Le garçon fut surpris de voir sortir de la tente qui semblait servir de cuisine, David. Cette ancienne connaissance qu’il avait recroisée au restaurant le jour de son premier rencard avec Hortense. Le serveur leur apporta deux bières, et une entrée. Il n’y avait pas de choix, mais cette cuisine ressemblait étrangement à celle qu’ils servaient à l’Hôtel de France. Le repas avança, alors qu’Hortense et Ethan admiraient la vue que l’endroit donnait de la ville qu’ils côtoyaient. Ethan passait beaucoup de temps à laisser aller son regard sur la fille qui se tenait en face de lui, Hortense en faisait de même.
« Quelque chose me taraude l’esprit depuis tout à l’heure, fit Ethan.
– Quoi donc ?
– Que t’est-il arrivé pour changer autant ? Te faire teindre les cheveux, changer le maquillage que tu portes habituellement ? »
Hortense sourit, mais ce sourire était gêné. Elle ne s’attendait pas à ce qu’Ethan l’interroge à cet instant sur ces changements.
« Il y a pas mal de choses qui se sont passées depuis que nous nous sommes séparés, Ethan.
– Tu veux m’en parler ? Ou tu veux que j’épilogue sur ma vie avant ?
– Je veux bien que tu me parles de toi… dit-elle.
– Très bien ! Qu’est-ce que je peux te raconter d’important ? J’ai des déconvenues avec mon frère. Il se passe des choses entre lui et sa femme et ces histoires font trembler toutes les personnes qui gravitent autour d’eux. Le reste de ma vie est plutôt tranquille.
– Plutôt tranquille ? demanda-t-elle amusée.
– Tu parles du fait que j’ai couché avec Amelie ? C’est une histoire singulière, ça…
– Je ne pensais pas qu’elle viendrait vers toi comme ça quand je lui ai demandé de prendre soin de toi.
– Tout s’est forcé après sa séparation, il me semble.
– C’est ce qu’elle m’a dit oui.
– C’est elle qui te l’a dit ? Que nous ayons couché ensemble ? demanda Ethan.
– C’est elle oui.
– Et ? Qu’est-ce que tu en as pensé ?
– Cela ne m’a pas laissé sans traces, mais je me doutais qu’il y aurait quelqu’un qui viendrait prendre ma place, dit-elle.
– Et toi ? demanda Ethan. Qu’est-ce qu’il t’est arrivé depuis ce temps ? »
Le sourire d’Hortense s’en alla, elle baissa son regard. Ethan ignorait toutes les raisons de cette soirée, et tout ce qui avait traversé l’esprit de la fille.
« J’ai croisé des personnes, j’ai couché avec des filles, je suis sortie avec des filles. C’était grisant au début, puis plaisant ensuite. Je suis sorti avec une fille, qui s’appelle Lena. Je me sentais bien avec elle. Enfin…
– Il s’est passé quelque chose ? demanda Ethan.
– J’ai voulu lui donner tout l’amour que j’avais à donner et pourtant… Je continuais à penser à toi. Ma relation avec elle était super, jusqu’au jour où je me suis rendu compte que je n’avais pas de sentiments pour elle, mais j’en avais toujours pour toi. »
Elle posa sa cuillère dans son assiette, puis se leva pour rejoindre la rambarde. Ethan se releva, s’approcha de la demoiselle.
« Hortense ? »
Elle se retourna et aperçut Ethan qui lui tendait ses bras. Elle s’approcha de lui et vint se serrer contre lui. Il ressentait à nouveau la force qu’elle mettait pour se tenir contre lui, ses bras autour de son cou. David vint poser deux cloches sur les assiettes des deux amoureux, et s’arrêta une seconde pour les regarder. Il n’espérait qu’une chose, que la raison de sa venue se réalise.
I took you like a thief
A pinch that doesn’t leave
It’s like ice cubes grinding at your front teeth
And I miss you while you talk
It’s a comforting sense of shock
Feels like silver caught inside a toaster
And I wish I was just as strong
As I make myself out to be
I’m twisting my words to appear like, This doesn’t burn ’em
Staring at the sun, papercuts are in my eyes
Shrinking our worth, mixing fiction
With crime like a substance
I’m addicted to, Diving into the salt tides
A fever that I’ll never break
’Cause I keep pushing pills away
Just to see my body shake
Expensive red wine, I hate the taste
And how the slightest spoon will stain
I drink with you anyway
— Stand Atlantic | Toothpick —
« J’ai vraiment l’impression d’avoir joué avec toi, d’avoir joué avec ton cœur… dit-elle.
– Parce que tu as voulu savoir si tu avais raison d’avoir ses sentiments pour d’autres personnes ? Si j’avais l’impression que tu jouais avec mon cœur, tu crois que je t’aurais accompagné ? »
Hortense releva la tête vers Ethan, les yeux chargés de quelques larmes.
« Je n’ai pas réussi à te sortir de ma tête, reprit Ethan. Tout le temps je pensais à toi.
– Même avec Amelie ? demanda-t-elle en riant.
– Même avec elle oui.
– Alors, tu veux qu’on essaie encore une fois ? Une troisième ? On dit jamais deux sans trois, mais c’est un peu bête parfois…
– Je veux bien qu’on essaie oui, dit-il avec le sourire. »
Un sourire qui fit renaitre celui de la fille. Hortense resta quelque minute blottie contre Ethan, le temps que ses larmes sèchent. Puis elle desserra ses bras pour rejoindre la rambarde à nouveau.
Je dois vous parler de cette scène, en dessous de la croix. Elle dessine une grande place, faite de terre et de pierres. La grande dame de fer se faisait accompagner d’une antenne téléphonique. Aujourd’hui avait été rajoutée cette estrade, où se posait la table sur laquelle les deux amoureux ont mangé. À ses côtés, cette tente dans laquelle David s’occupait du repas, déjà cuisiné à l’avance. Juste en dessous du pied de la grande croix, une petite cabane de bois, qui avait été installé pour l’occasion. Beaucoup de choses avaient été prévues pour une simple soirée.
Ethan se laissa le temps d’admirer la fille s’en aller, observer sa tenue qu’il n’avait jamais vue sur elle.
« Alors, tout ce changement, c’est pour moi ou à cause de moi ? demanda Ethan.
– J’avais besoin de changer des choses, me sentir différente. Pourquoi ? Ça ne te plait pas ?
– Je te trouve très jolie, vraiment très jolie. »
Ethan se souvint d’un instant, un moment figé dans le temps. Il se souvint de cette nuit, accompagné de Noa. Devant lui, menant la file d’étudiants trop alcoolisée, il y avait Mélissa. C’était le premier soir où ils se sont revus, et Ethan n’avait jamais laissé partir cet instant. La fille à la jupe noire. Ethan se laissait porter par le dessin de son ombre sur les pavés du quartier, et par l’attention infinie qu’il avait pour elle.
Mais à cet instant, quelque chose d’autre lui revenait en tête…
Vendredi 22 novembre 2019.
« Tu penses encore à elle ? demanda Flora.
– À elle ? Qui donc ?
– Melissa… »
Ethan ne répondit pas tout de suite, mais Flora connaissait certainement déjà la réponse à cette question. « Tout le temps », répondit le jeune homme, la voix serrée. Personne jusqu’ici n’avait réussi à remplacer Mélissa dans la tête d’Ethan. Quelque chose était différent avec elle. Peut-être parce qu’elle l’était, différente, singulière. Elle dégageait une énergie, une magie, une force de vivre que même Flora n’avait pas. Elle était singulière, elle était celle qui avait laissé Ethan en paix, pour la première fois.
« Il ne se passe pas un jour sans que je pense à elle. Elle… Personne n’avait le droit de lui ôter la vie, personne n’avait le droit de détruire ce qu’elle était, reprit Ethan.
– C’est pour ça que tout a changé après ? Parce qu’on t’avait retiré Mélissa ?
– Parce qu’il m’avait retiré la seule personne qui me donnait l’impression d’être en paix, qui chassait les démons qui collent à ma peau.
– Quand t’es-tu rendu compte qu’elle avait pris autant de place dans ton cœur ? demanda la fille.
– Le jour où je l’ai revu. Je me revois dans cette rue, accompagné de quelques des personnes avec qui j’avais passé la soirée. Elle était venue me faire la bise lorsqu’elle est arrivée, toute légère, comme elle savait si bien le faire. Mais lorsque nous sommes sortis, j’avais l’impression qu’il y avait que nous deux dans la rue, sous les lumières de la ville. Je ne voyais qu’elle, alors que d’autres personnes me gravitaient autour. Ce jour-là, je me suis dit : qu’est-elle est pour me laisser aussi loin dans mes pensées ?
– Elle est devenue une étrange entité mystique pour toi ? Je me souviens du regard que tu lui portais. Je me souviens aussi de l’Ethan que j’ai revu lorsque tu l’avais retrouvé. Tu étais si souriant, si amusé. J’aurais cru que personne ne réussissait à te faire tomber.
– Longtemps, je n’ai pas su comprendre ce qui m’attirait tant chez elle. Un soir, quelques semaines avant que je te voie cette fois-là, je suis allé la voir. Je ne lui avais pas dit, je voulais lui faire une surprise. Sa mère m’a laissé rentrer et je suis allé dans sa chambre. Je l’ai surprise dénudée, alors qu’elle ne s’attendait pas à ce que quelqu’un rentre dans sa chambre. Ça ne s’est pas mal passé. J’ai été gêné, elle aussi. Je lui ai laissé le temps de s’habiller adossé à la porte dans le couloir. Puis elle m’a laissé rentrer, toujours un peu gêné. Elle m’a dit : Je ne pensais pas que tu viendrais me rendre visite par surprise, alors je ne m’attendais pas à ce que tu puisses me surprendre dénudée.
– Elle avait quelque chose de différent ? Ou était-elle ?
– Elle était transgenre, reprit Ethan. Elle avait commencé sa transition six ans auparavant, et elle ne m’en avait jamais parlé. Personne ne le savait, sauf ses parents. Et… Je me souviens de l’énergie qu’elle avait ce soir-là, de toute la lumière qu’elle rayonnait. Tu aurais dû l’entendre, j’avais l’impression que toute sa vie avait basculé dans la lumière depuis qu’elle avait commencé sa transition. Elle dégageait cette force que tu avais observée chez elle. Cette force à être si différente, à être si unique. »
Flora voyait Ethan parler de Mélissa, comme d’une entité si magique qu’il semblait avoir transformée en idole, en exemple de bonheur. Un bonheur que lui avait apporté Mélissa qui le faisait paraître si unique à son tour.
« C’est pour ça que tu t’es tourné vers les hommes ? Pour rechercher cette part d’unique ?
– Chacun de ceux avec qui j’ai été m’ont fait paraître qu’ils s’approchaient de ce que je recherchais chez quelqu’un. Mais chacun d’entre eux a réussi à me prouver que je me trompais. Ce que je voyais d’unique c’est le reflet de ma détresse. »
Flora s’approcha du jeune homme, pour le prendre dans ses bras.
J’aimerais écrire un jour, un instant de Flora et Ethan heureux, ensemble. Mais tout ce qui s’enchaine finit toujours par laisser tomber l’un ou l’autre…
Vendredi 10 janvier 2020.
Ethan admirait la fille qui lui tenait compagnie. Cette fille aux cheveux noirs et aux pointes devenues roses. Cette jupe plissée de nuances de rose, son haut rayé rose et blanc. Et sa veste marron, à la texture cachemire. Cette fille lui rappelait Mélissa et pourtant, c’était elle qui l’obnubilait depuis quelque temps.
« Ethan ? Est-ce que ça va ? demanda Hortense. »
Il se mit à sourire, un grand sourire comme il n’y en avait pas eu depuis longtemps sur ses lèvres. Il glissa ses mains dans ses poches, puis s’approcha de la fille.
« Est-ce que ça va ? demanda Hortense à nouveau.
– Je crois que je ne me suis pas senti aussi heureux depuis longtemps, répondit-il.
– Et c’est à cause de moi ?
– Je suis heureux à cause de toi oui, répondit-il avec le sourire.
– C’est étrange dit comme ça, dit-elle.
– C’est vrai, mais ça me plait. Parce que tu me plais.
– C’est vrai ? Depuis quand tu t’intéresses aux femmes ?
– Depuis qu’on me laisse devant les yeux quelqu’un d’aussi resplendissant que toi. Ça m’avait manqué de pouvoir t’admirer.
– Ça m’avait manqué aussi, dit-elle. »
Elle se retourna vers la ville. Ethan s’approcha de son dos, la serra dans ses bras. Il y avait toujours quelque chose de magique entre eux deux, j’en ai déjà parlé de ça, mais ça n’a pas changé. Les deux ensembles paraissaient avoir une aura puissante et apaisante. Une connexion que Mélissa avait réussi à créer avec Ethan, et qui s’est immiscée entre lui et Hortense sans leur aide. Comme si les deux s’attachaient l’un à l’autre, destiné l’un pour l’autre.
Même si je n’aime pas cette idée d’un être destiné à l’autre. Il peut simplement exister une connexion entre deux personnes. Mais il est certainement difficile de trouver cette ou ces personnes avec qui on se connecte si bien.
« J’ai l’impression d’avoir vécu l’essentiel de ma vie dans mon imagination. Tous ces petits moments que j’ai vécu et que j’ai transformés en des moments grandiose et magnifique.
– Qu’est-ce que tu veux dire ? lui demanda Ethan.
– J’ai enfermé et me suis fait enfermer une partie de ma vie à cause du fait que je ne pouvais ressembler à tous les autres. J’ai été évitée et je me suis sentie oubliée. Parce que ce qui me rendait spéciale ne me donnait rien de spécial finalement.
– Pourquoi penser à ça maintenant ?
– Un petit échange et je tombe amoureuse. Mais la réalité trouve toujours un moyen de me rattraper et de me faire revenir en arrière. Ça a été le cas avec toi et Lena, je suis tombée amoureuse dès les premiers regards, dès les premières attentions que vous avez eues vers moi. Mais quand j’ai cru que tout serait plus simple avec elle, je me suis trompée à nouveau.
– C’est le cas avec moi aussi ? questionna Ethan. Tu penses t’être trompée ?
– Je le pensais avant de te quitter oui. Pourtant je suis revenu vers toi. Pourquoi prends-tu autant de place chez les gens ?
– À t’entendre, on dirait que je suis super important aux yeux de tout le monde, dit-il.
– C’est pas le cas ? s’étonna-t-elle.
– J’aurais bien aimé que certaines personnes ne me montent pas autant dans leur estime, pour ne pas être déçues lorsqu’elles se rendent compte qu’ils se trompent sur ce que je suis.
– Tu as peur que je sois déçu de toi ?
– Ça arrivera peut-être oui. »
Elle se mit à rire, quelque chose dans cette discussion avait laissé dériver l’esprit de la jeune fille.
« Qu’est-ce qui te fait rire ? demanda Ethan
– C’est amusant comme on a tous les deux de grosses insécurités. Mais aucun de nous deux s’inquiète de celles de l’autre.
– N’est-ce pas ce qui nous rend si spéciaux ? Être capable d’éloigner ce qui rend l’autre tangible ?
– Je sais pas si c’est ce qui nous rend spéciaux, mais ça nous a rapprochés en tout cas. »
Le soleil s’était caché derrière la montagne depuis quelque temps maintenant. Seules, les lumières des lampadaires et du parasol chauffants éclairaient l’endroit où Ethan et Hortense se tenaient. Le silence s’était installé, la paix d’esprit revenait peu à peu. David avait déjà éloigné tout ce qui se tenait sur la table, et s’en alla, ne laissant que les deux amoureux en haut de ce flanc de montagne.
Le soleil vint frapper la verrière qui créait le toit de la cabane. La nuit s’était enfuie, Hortense et Ethan avaient passé leur nuit dans cette maison faite de bois, qui ne comprenait qu’un immense lit et une petite cuisine. Seulement, nous étions loin de la première fois sur une plage dont rêvait la jeune femme.
Ethan se réveilla avec Hortense, qui s’était éveillée avant lui. La lumière qui traversait la verrière faisait briller ses cheveux devenus presque cuivrés.
« Bonjour monsieur, lui dit-elle venant poser sa tête sur son torse.
– Bonjour ! Quelle heure il est ?
– Presque midi, répondit-elle.
– Je n’ai même pas entendu le réveil sonné !
– Pourtant, ton téléphone a bien sonné. Des gens ont essayé de t’appeler, je crois.
– On verra ça plus tard. »
I’m scared to get close and I hate being alone
I long for that feeling to not feel at all
The higher I get, the lower I’ll sink
I can’t drown my demons, they know how to swim
Can you hear the silence?
Can you see the dark?
Can you fix the broken?
Can you feel, can you feel my heart?
— Bring Me The Horizon | Can You Feel My Heart? —
« Tu es sûr que ça tiendra ? demanda Hortense.
– Comment ça ? Tu as peur qu’on s’éloigne parce que l’on se reproche ce que l’on a fait entre nos ruptures ?
– Je suis pas sûre que ça ne nous revienne jamais en face.
– Si tu t’inquiètes de ce que pensent les autres de notre relation. Personne n’est bien placé pour juger. Quant à ce que l’on reprochera à l’autre. Penses-tu que l’on serait encore en train de recommencer si nous n’étions pas capables d’oublier ?
– Tu as l’air bien confiant, dit-elle.
– Évidemment, je suis confiant. On s’est tous les deux comportés comme des idiots envers l’autre et regarde nous !
– On est encore en train de fricoter dans un lit qui n’est même pas le nôtre ! s’exclama-t-elle. »
La jeune femme posa à nouveau sa tête sur le torse d’Ethan. Elle avait l’habitude d’entendre ce cœur qui bat trop fort, qui a fait peur plusieurs fois au jeune homme. Mais elle ne s’en préoccupait plus. Elle semblait heureuse d’avoir retrouvé Ethan, comme lui paraissait apaisé de pouvoir la tenir dans ses bras.
Hortense était devenue incassable, intangible, imperturbable.
Ethan aussi semblait avoir retrouvé ce rayonnement. Cette lumière de bienveillance que Lionel espérait voir revenir grâce à Hortense.
Seulement…
Je n’ai pas écrit cette histoire pour voir son protagoniste heureux. Pas non plus pour voir apparaître de nouveaux personnages plus stables qu’Ethan. Tout n’est que délivrance et chute. Mais nous parlerons de la fin plus tard, certainement…
Mardi 28 janvier 2020.
Il faut que je vous parle. Il faut que je vous parle de personnes qui vont changer ma vie, qui vont faire trembler ce pour quoi j’ai l’impression de construire ma vie. Il faut que je vous parle…
Come on, what’s the big deal? Nobody’s that heartless
So listen here, I’m the voice in your head
And I can say the words that make you feel scared
So here’s to you, and all the problems that we’ve made
And I know it’s so hard to stay afloat
When you make monsters out of thoughts. And you’re dragged under
And everyone in around you is too far away to notice
Your chest start to crush, oh, but it’s alright
Oh, you’ll be alright. So just breathe, it’s almost over
And don’t let the monster in your head
Become your fears
‘Cause you can save yourself, you know, You know
So listen here, I know it’s hard
Maybe I can’t be what you want
But I’m just who I am, and I’m trying to be what you could need
And I am still here, that voice in your head
And I’ll be there for you, when no one else cares
And this is it, as far as where we’ve got since then
So know a good thing when you got it
And I hope you know you don’t go alone
— EDEN | falling in reverse —