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Partie 7 : Rêve Lucide
Si le temps m’avait inculquée quelque chose, c’est la patience. L’art de savoir attendre, se passer des choses qui nous manquent jusqu’à ce qu’elles reviennent, négliger ce qui nous énerve. J’usais, j’abusais même d’elle alors que j’attendais le réveil de Virginie.
Lundi 6 janvier 2014 ! C’est mon Anniversaire ! Ça me faisait dix-neuf ans, concrètement cinquante de plus, si on prend l’âge réel d’Adam. Je « négligeais » un peu Virginie, sachant sa sécurité assurée avec Sieg. Je m’intéressais à quelqu’un d’autre. Ezira, qui courrait encore, je lui en voulais et voulais surtout sa mort.
J’étais en train de discuter avec Chester lorsque Sieg est arrivé sur le plateau, d’un air assez calme.
« Ne le cherches plus, il ne devrait plus tarder à débarquer.
– T’est sérieux là ? répondis-je un peu dépité. Tu viens me dire qu’il m’arrive dessus calme et serein et il n’y a rien qui te dérange ?
– Jamais l’ami. Jamais. »
Et il avait raison. Environ cinq minutes plus tard, il atterrissait sur plateau, en face de nous trois.
« J’ai une revanche à prendre !
– Parce que tu penses que tu peux nous affronter tous les trois sans y rester ?
– J’en suis certain ! »
Il ne lui avait fallu que quelques secondes pour se trouver devant moi, une de ses tentacules autour de mon cœur et une autre autour du cou de Sieg. J’ai perdu connaissance quelques secondes plus tard. Lorsque je me suis réveillé, j’étais dans le hall du lycée, Sieg à côté de moi.
« Euh, je ne comprends pas là Sieg.
– Chester est à la Tour avec Virginie. Et non, ce monde n’est pas réel.
– C’est bien ce que je me disais, répondis-je regardant ma montre, toujours ma peau mécanique, toujours mon cœur, fis-je effleurant l’anneau qui dépassait, je suis entier, c’est déjà ça. »
Quelque chose n’allait pas dans cette histoire, comme le fait que ce soit les vacances scolaires et que tout le lycée soit en cours, le lundi 23 décembre 2013.
« Bon, je… ne peux pas me téléporter ?
– Moi non plus. J’ai l’impression que ça va être plus compliqué que prévu.
– Pourtant tout parait vrai, même les personnes. »
A ce moment, Alexia et deux de ses amies virent dans notre direction pour sortir du lycée. Je m’apprêtais à leurs dire bonjour lorsque qu’elles se sont misent à rire, puis Alexia fit « Quels nuls ! » après nous avoir dépassés.
« Ce monde est bien irréel.
– Comme tu l’as remarqué Leo ! Je te dis bon courage pour trouver tous les démons ! me fit Chester.
– Ne t’en fait pour moi Chaz, je saurais me débrouiller. Bon, Sieg, ça te dit d’aller en cours ?
– On a le choix ?
– Pas certain…
– Aller. Avant que ne change d’avis. »
Cela faisait un peu moins d’un an que j’avais lâché le lycée pour me consacrer à la vie que m’offrait Leo. Alors l’envie d’aller en cours, elle n’existait plus, mais plus du tout. J’en avais même oublié à quel point c’était long ! Je devais retrouver les démons occupant le monde et les détruire pour en sortir. Dix heures, la pause, je me suis rendu sur la « terrasse » qu’il y avait au niveau du labo de Grey.
« Pourquoi faut-il qu’ils soient aussi fainéant ? Tu peux me le dire ?
– Monsieur Van Buuren. J’imagine que ça concerne notre classe ?
– Bien vu Leo. Ils n’en font pas plus depuis que tu es parti !
– Alors toi aussi tu es coincé dans ce foutu monde ?
– Pas le choix. Je crois qu’il n’a pas aimé sa défaite en quelques secondes après ton arrivée. Combien de temps on doit y rester ?
– Jusqu’à ce que j’aie tué tous les démons qui gardent ce monde.
– Bon. Ma foi, bon courage.
– Je me demande juste comment il peut croire que je penserais que l’on est dans le monde réel.
– Il n’est pas très logique. S’il l’était vraiment, il n’aurait pas gardé Laïd alors qu’il est en congés.
– Pas faux. Aller, bon courage pour tes cours, moi je vais aller espionner un peu. »
J’ai passé les deux heures restantes à, d’abord m’apercevoir que je n’avais aucun de mes pouvoirs, sauf mes augmentations, ensuite que le monde était vraiment étrange. Certaines portes ne mènent nulle part, d’autres disparaissent ou renvoient à d’autres salles. Vers midi c’est Joffrey que j’ai croisé.
« Adam Jensen ! Que me vaut cet honneur ?
– Je pense que tu le sais déjà.
– Comment on est arrivé ici ?
– Pour ma part, un con avec des tentacules s’en est pris à mon cœur. Vous, je n’en ai aucune idée.
– Combien t’en a à tuer ?
– J’en sais rien, je n’ai même plus mes pouvoirs.
– À ouais, quand même.
– Je sens que ça va être long.
– Tu t’en fiche t’a ta copine.
– Tu crois ? Je ne pense pas qu’elle soit avec nous, elle est dans le coma.
– Merde, je…
– Ne t’en fait pas, je m’y suis fait. »
Une forme de désespoir se créait au fond de moi, comme lorsque j’étais certain de perdre une bataille. Mais là, je me demandais si j’arriverais à sortir de ce monde bordélique. J’essayais de reprendre une vie normale. Enfin presque. D’après le monde dans lequel on était, je détestais Emeline. Sauf qu’elle aussi était dans ce monde.
« Tiens, te revoilà.
– Vraiment ?
– Quoi ? Quelque chose te dérange ?
– Tu ne trouves pas que quelque chose ne va pas ? Tu étais bien dans la citadelle ?
– Oui, je me suis assoupie, je crois et je me suis retrouvée là. Mais pourquoi toutes ces questions ?
– Tu sais qu’à cette date, c’est les vacances scolaires ?
– Euh… T’est sérieux ?
– J’ai l’air de me foutre de toi ? Ce n’est pas le monde réel.
– Prouve le moi !
– Oublie Bruno et Joffrey, ils ont été emmenés avec nous.
– Oui, ensuite ?
– Tu ne trouves pas bizarre que ta meilleure amie s’étonne que tu me parles alors que l’on se détestait mutuellement, l’année dernière ?
– Non, je…
– Tu trouves normal qu’Alexia me prenne pour un nul ? Rosie aussi ?
– Euh…
– Et comment t’explique que ton père soit avec moi alors qu’il est invisible pour le monde !
– Merde…
– Comme tu dis.
– Bon, mettons que je te crois, comment on sort ?
– Des démons à tuer. Je ne sais toujours pas lesquels.
– Bon courage alors, moi je ne m’en occupe pas !
– Je m’en doutais… »
J’avais pris cette « première journée » un peu à la légère, pour étudier ce qui m’attendait. Il n’y avait plus de Tour, juste un monde trop étrange pour être concrètement réel. Quinze heures, alors que je voulais suivre les cours je rencontrais enfin les professeurs que j’aurais dû avoir cette année. Celui-ci ne me plaisait pas rien qu’au premier abord.
« Comment tu comptes faire sans la Tour Adam ?
– Tu sais Sieg, avant vous j’avais une vie normale. J’ai des parents, une chambre, tout ce qu’il faut pour que ça se passe normalement. Du moins en théorie.
– Comment ça, en théorie ?
– Tu le vois comme moi, ce truc n’est pas assez normal pour nous laisser vivre une vie normale.
– Attendez, qu’est-ce que vous faites là vous deux au fond ? demanda le prof.
– Mais ils ont toujours été là monsieur, répondit Emeline, vous les avez juste oubliés.
– Mouais… »
J’ai sentis quelque chose de mauvais dans sa voix, jusqu’à ce qu’il me lance son regard, déclenchant alors ma vision d’aigle et le laissant apparaitre sous une forme beaucoup moins valorisante.
« Trouvé.
– Bon, ça en fait déjà un. Maintenant trouves les autres.
– Ça va être une autre histoire. »
Je ne m’étais pas trompé sur le fonctionnement de l’endroit où on était. Lorsque j’ai passé la porte de la salle, tout est devenu noir et j’ai reperdu connaissance.
Mardi 24 décembre 2013, je me suis réveillé derrière la porte du lycée, mais toujours dans l’établissement. (Qui a dit que j’avais l’impression qu’il voulait m’obliger à y rester ?) Il me fallait attendre vendredi pour que je revoie le prof de hier, alors je devais trouver le moyen de m’occuper autrement. J’avais des amis dans le lycée, Kévin y était inclus. J’avais l’impression de ne pas exister à leurs yeux, je pouvais parler tout seul sans qu’ils ne s’en aperçoivent.
« Hey Leo ! J’ai trouvé le moyen de te faire parvenir mes pensées !
– Merci Chester, tu ne pensais pas que j’avais déjà l’impression d’être schizophrène ?
– Euh, si, mais là c’est moi, pas quelqu’un dans ta tête. Bref, j’ai quelques recherches sur ce dans quoi tu te trouves et apparemment il n’y aurait pas que les démons à tuer.
– Et quoi de plus ?
– Une sorte de cheminement. Comme si tu avais des objectifs à accomplir pour te permettre de te dégager.
– Une mission, mais à quoi bon ?
– C’est interactif, enfin je crois.
– Ce truc à un lien avec le monde parallèle, tu pourras en sortir si tu te colles à ce que tu as déjà écrit. Et Chester, utilise un hologramme plutôt que d’encombrer sa tête.
– Merci Sieg. Mais ça ne m’avance pas.
– Continue tes recherches, je me débrouillerais avec tes profs.
– Je t’en remercie l’ami ! »
Le temps me paraissait passer trop vite, où beaucoup trop lentement. D’un autre côté j’étais comme un fantôme pour certaines personnes. Ce n’est pas comme si ça me dérangeait vraiment. Vers onze heures, alors que j’étais toujours dans ma phase de recherche de ceux que je devais éliminer, je trainais encore dans les couloirs après avoir fait une petite sieste sous le préau. J’ai pris le long couloir qui menait vers presque toutes les salles de cours puis je me suis aperçu que quelqu’un me suivais. J’ai ralenti légèrement pour le laisser me rattraper lorsque mon instinct s’est affolé. Au moment où j’ai senti ses pas trop près je le suis arrêté brutalement, le coude vers l’arrière avec la lame déployée pour le toucher puis je me suis retourné plaçant ma lame vers l’avant pour lui trancher la gorge. Mais lorsque j’ai croisé son regard, je me suis aperçu que je m’affrontais à un golem de pierre avec une immense épée en cristal à la main. J’ai rapidement dégainé mes pistolets pour le distraire et me suis enfui en courant à toute allure. Je l’ai trouvé un peu idiot d’ailleurs parce que je ne me suis pas caché loin, j’avais juste descendu un étage et il était resté au-dessus. « Pas très intelligent celui-là. » fis-je en entendant ses pas repartir. L’étage que j’avais atteint n’était pas le plus grand. Seulement trois salles de cours. Pourtant quelque chose m’avait interpellé. Normalement comme à chaque étage il y avait un escalier pour les professeurs, mais là, alors que la porte était entre ouverte, ce qui se trouvait derrière avait plus des tons bleus, comme une salle des machines, avec l’odeur que dégageaient leurs ventilateurs. J’y suis entré, essayant de faire le moins de bruit possible. Je n’avais aucun de mes pouvoirs, même pas mes capacités d’enchainés. J’ai avancé, cherchant quelque chose, mais surtout quelqu’un, puis lorsque je traversais la salle des serveurs, mon frère vint m’interrompre.
« Je ne comprends pas, comment quelque chose qui est censé être concret peut utiliser des machines pour le contrôler ?
– Je ne sais pas, peut-être est-ce qu’il veut se foutre de notre gueule ? Où quelqu’un cherches à m’aider ?
– Pas bête, mais qui ?
– Sia, Kévin ou Ariel.
– Je vais essayer de trouver. En attendant, essaie de t’améliorer la vie, je n’ai pas envie que tu passes ta vie là-dedans.
– Rassure-toi, moi non plus ! »
Sortant de la salle celui qui devait s’occuper du système s’est trouvé devant moi, dos à moi. J’ai utilisé ma lame secrète pour lui arracher la colonne vertébrale.
« Foutu démon.
– Tu n’as jamais pensé à être moins violent Leo ?
– Jamais, pas avec eux. »
La première chose que j’ai faite c’est m’asseoir dans son fauteuil, mes jambes commençaient à ne plus supporter mes escapades à travers les étages. Étrange d’ailleurs puisque la maitrise physique devait me régénérer à chaque fois. Je me suis alors retrouvé devant un immense ordinateur, avec une trentaine d’écrans. Tous affichaient le contenu de cameras placées dans le lycée. Je trouvais cet endroit de plus en plus étrange. Quelques minutes plus tard, alors que j’essayais de trafiquer l’ordinateur, un des écrans se brouilla, puis l’image redevint nette. Une personne y est apparue, c’était Sia.
« Adam, si tu vois ce message, c’est que tu as trouvé la salle principale. Il faut que tu détruises l’ordinateur, c’est lui qui te bloque dans le lycée. Je manque de temps, tu dois trouver le moyen de récupérer tes pouvoirs, chaque action que tu effectueras te bloquera encore plus ou te redonnera certains pouvoirs. Je suis désolé, mais je ne pas rester, ils vont me retrouver…
– Non Sia attends ! Ah ! »
Je me suis énervé sur le bureau voyant que je ne pouvais pas lui parler. Seulement, quelque chose m’avait interpellé derrière lorsque je me suis penché dessus. Une sorte de plaque signalétique. Elle disait « Interface Virtuelle. 3 octobre 2012 » je me suis alors demandé si cette interface n’utilisait pas la date inscrite comme base et les personnalités qui existaient à cette chronologie. Je n’ai finalement pas tardé à anéantir la console de commande en y lançant le fauteuil sur lequel j’étais. J’ai ensuite refait le chemin à l’envers, alors que la sonnerie de midi retentait. J’ai fermé la porte derrière moi au moment ou celle en face de moi s’ouvrait. C’était la classe de Virginie. J’ai remarqué qu’elle me regardait lorsqu’elle est passée, avec ce regard timide qu’elle avait avec moi depuis la première fois. Seulement j’avais remarqué aussi celui que m’avait jeté Alexia qui était à la fin du groupe. Le sien était plus méchant, haineux presque. Comme si elle avait vu que je m’intéressais à Virginie, mais qu’elle ne le voulait pas. Mon corps se mit à frissonner après leur passage, réchauffant le torse avec mes étincelles et sentant que le port des armes dans le dos était de retour, mais sans mes armes. « On va pouvoir s’amuser » je me suis dit avant de remonter et de croiser Sieg au passage.
« Tient, toujours rien ?
– On n’est pas les seuls dans un monde étrange. Sia aussi, mais elle a la capacité de nous aider.
– Comment ça ?
– J’ai trouvé une salle de contrôle à l’étage en dessous, peu probable dans un monde supposé psychique. Elle nous obligeait à rester dans le lycée, perdant connaissance à chaque fois que l’on devait s’en extraire.
– Et qu’est-ce que ça nous apporte ?
– Nos pouvoirs, on sortira que si on les retrouve. En clair, on reverra ce con que lorsque la voix du schizophrène reviendra.
– Bon, continue, c’est bizarre, mais je commence à bien aimer les cours en fait.
– Tu changeras d’avis quand tu auras retrouvé Elidian l’ami.
– Je sais ! »
Ce n’était que le deuxième jour dans ce monde et je ne savais pas combien de temps ça me prendrais pour en sortir alors j’ai voulu jouer avec ma notoriété. J’ai d’abord voulu m’assurer que rien ne m’empêchait plus de sortir du lycée. Et effectivement, j’avais retrouvé une forme de liberté, parce que si je l’avais vraiment, j’utiliserais le vol pour me déplacer. J’avais dans l’idée d’exploiter l’oblitérateur pour me donner une seconde apparence. Au moment où j’arrivais près de la Tour qui n’existait pas, Chester m’arrêta.
« Leo, quelqu’un s’attaque à la Tour, tu peux t’en occuper ?
– Tu as de la chance, j’ai trouvé le moyen de sortir du lycée.
– Je ne te l’aurais pas demandé. Va avant qu’il ne la tombe. »
Celui qui m’attendait à l’endroit où la Tour était supposée être était une vieille connaissance. Romain. Tué deux fois au conteur par Leo, les deux d’une manière trop brutale. Il revenait, pour une dernière revanche, ressemblant à un zombie, un bâton à la main.
« Qu’est-ce que tu viens faire là ?
– Ezira m’offre la chance de te battre, tu n’as plus tes pouvoirs, tu n’as plus rien. Je vais t’écraser.
– Je n’ai pas besoin de mes pouvoirs, je sais toujours me battre. Ecarte-toi avant que je ne te démonte.
– Jamais ! Tu m’as humilié deux fois, DEUX FOIS !
– Si tu avais un minimum de bon sens, tu saurais que je le ferais aussi la troisième. Je te laisse la chance de vivre, part avant que je change d’avis.
– Je préfère mourir !
– Tant-pis pour toi. »
Il attaquait toujours le premier, il faisait toujours les même erreurs. Sa colère était tellement forte qu’il la laissait l’emporter et ne savais même plus ce qu’il faisait.
« Pourquoi tu t’épuises, tu sais que c’est déjà perdu.
– Je te ferrais payer ! »
Il s’est jeté sur moi, comme s’il savait que c’était déjà perdu, mais en ayant l’assurance de me détruire. Je l’ai stoppé, le frappant dans le ventre, puis déployant ma lame pour l’achever, puis l’extrayant en la pivotant sur mon bras lui coupant le reste du corps. J’ai récupéré le bâton qu’il avait à la main, qui appartenait à une époque à Sieg. Il s’appelait Nuage Ecarlate de sa traduction, Crimson Cloud. Une fois que j’avais l’arme en main, la porte de la Tour apparue.
« Oh ! Ma Tour !
– Je t’en prie Sieg.
– Merci !
– Une question, comment tu es arrivé si vite ?
– Téléportation. Je regrette la nouvelle Tour quand même.
– Ce n’est pas juste, toi tu récupère les pouvoirs dimensionnels.
– Et toi ton pouvoir élémentaire. Tu as plus de facilité pour te battre.
– Pas faux. Y’aurais pas quelque chose à manger ici ? Je commence à mourir de faim.
– Qu’est-ce que tu veux faire de mon ancien bâton Adam ?
– Le bidouiller, si tu veux bien m’offrir ton aide.
– Après avoir mangé ! répondit-il me montrant la cuisine avec des plats déjà prêts.
– Comment tu fais ça ?
– C’est ma Tour, elle fait tout ce que je lui demande. »
On a ensuite passé environ deux heures à modifier mon nouvel arsenal. Le bâton pouvait se détacher en trois parties, pour faire un nunchaku à trois têtes ou un bâton triple. Deux lames pouvaient se déployer aux pointes pour faire une javeline double. Comme seconde arme j’avais pris Lucifer, seulement les lames sans la tête de démon attachée à l’épaule, c’était la seule que je pouvais utiliser.
Pour le costume, j’ai essayé une forme de fusion entre la tenue de Leo lorsqu’il est apparu et le style vestimentaire de son père et celui que l’on avait en ce moment. Alors que Sieg travaillait sur l’oblitérateur pour me permettre de disparaitre lorsque je changeais d’apparence, moi je choisissais mes vêtements parmi ceux qu’il y avait dans les placards, utilisant la console de la Tour pour les modifier. La première couche était un body, en maille de cuir, il faisait partis du costume original d’Adam, une armure anti-balle. La partie qui couvrait le torse avait été recolorée en rouge. Le reste était bleue, assez pale, presque gris. Par-dessus, de longues jambières en cuirs noires, renforcées par des parties métalliques aux reflets bleutés. Elles tenaient serrées par des lanières en cuir marron, de la même couleur que les sacoches qui étaient sur les cuisses, vers l’extérieur. Pour ne pas changer, toujours les gantelets d’assassin avec les lames cachées, avec des gants qui couvraient que les deux doigts du milieu. Autour du cou, un keffieh noir. Je portais une sorte de masque, qui laissait apparaitre mon visage et mes cheveux. Il était bleu, un peu plus fort que celui du body. J’avais enfin tronqué les lunettes surréalistes d’Adam pour des lentilles, noires et qui laissaient apparaitre mon iris bleu brillant.
Ce nouveau personnage s’appelait Aiden, c’était le nom d’officier du père de Leo lors que la Guerre Aldorienne.
Une nouvelle apparence dans la collection, peu avant trois heures nous étions retournés au lycée, apprenant que le lendemain, c’était le cross du lycée. Je ne savais quoi faire de cette information, sachant déjà qu’il était normalement déjà passé, ensuite que ce n’est pas quelque chose qui allait m’apporter la solution pour sortir, enfin pas que je sache. Quelques minutes plus tard, la sonnerie retentit et tous les élèves virent s’agglutiner sous le préau et je restais comme toujours figé sur une silhouette.
« Dit moi tout Adam.
– Tu sais Sieg, elle me fascine, m’intrigue et me fait peur.
– Laisse-moi une seconde. Elle te fascine parce que tu es toujours aussi fou d’elle, elle t’intrigue parce que tu te demandes comment va s’effectuer la fusion.
– Bien, je vois que mon bon vieux Sieg remonte !
– Et elle te fait peur parce qu’elle est dans le coma dans le monde réel et que tu ne sais pas si elle va s’en sortir.
– Je…
– Je vais te dire, tu n’as pas à t’en faire pour elle, Chester s’en occupe et il la maintiendra dans un état stable. La fusion, je dirais un mélange, pas certain, mais c’est la solution la plus probable. Pour finir, je sais qu’elle t’obsède. Tu es fou d’elle, elle pareil et elle te manque.
– Oh ! Leo, t’étais pas à la Tour ?
– J’en viens Chaz, que te faut-il ?
– J’ai repéré un démon dans les parages, tu devrais le remarquer assez vite. Et oui, ta jolie femme va très bien.
– Merci Chester.
– Tu nous sors Aiden ?
– Avec plaisir Sieg. »
Mon adversaire avait pris une apparence humaine, comme toujours, mais là un genre de « beau gosse relou », le genre chiant qui fait chier son monde. Et il avait bien choisis sa cible, puisqu’il s’attaquait à Virginie. Il m’avait fallu exactement cinq secondes pour changer d’apparence. Pendant ce laps de temps, je me suis retrouvé dans une espace assez étrange, mais je le connaissais. C’était l’endroit d’où Sia m’avait envoyé son message. Elle y était, assise contre le mur, effrayée, fuyante. Elle ne me voyait pas, mais moi je la voyais. J’ai été rappellé là où j’étais par les paroles des deux personnes dans ma tête.
« Allez, j’ai juste envie que tu viennes avec moi, je ne te ferai pas de mal.
– Non ! Je ne veux pas, répondit-elle.
– Allez ! Ne m’oblige pas à t’y forcer. »
Entre temps je les avais rejoints, j’étais juste à côté de lui. Le masque que j’arborais m’aggravait légèrement la voix.
« Tu as entendu la demoiselle, elle ne veut pas.
– T’est qui toi ? Qu’est-ce tu me veux ?
– Lâche là. Attaque-toi à quelqu’un qui pourra rivaliser.
– Une merde comme toi. Vas-y, je vais te défoncer… »
Quelques secondes plus tard, il se retrouvait plaqué contre les casiers, les lames de Lucifer sous la gorge. Je me tenais juste en face de lui, le regardant d’un peu plus haut, mon bâton dans la deuxième main, derrière mon dos.
« Tu te crois toujours en position de force ?
– Euh, attends. Je pense qu’on peut s’arranger.
– Mais bien sûr, tu dégage vite et tu ne l’approche plus. En échange je te promets de plus m’affronter à toi.
– Ok ! OK, si tu insistes, dit-il partant.
– À qui ai-je l’honneur ? demanda Virginie.
– Aiden. Heureux d’avoir pu t’aider, répondis-je en la saluant. »
L’autre avait parcouru une partie du préau, comme s’il s’attendait à ce que je le rejoigne ou qu’il revienne me voir. À un moment, je l’ai entendu dire « Quelle connard celui-là » alors que j’étais encore avec elle.
« M’accordes-tu une seconde ?
– Bien sûr. »
Je me suis dirigé vers lui, suivant exactement les traces de ses pas, tracés grâce à la vision d’aigle. Je me suis vite rapproché de lui, à deux mètres à peine.
« Hey, si t’a quelque chose contre le connard, t’a qu’à le lui dire en face !
– Avec plaisir… »
J’avais lancé une attaque le temps qu’il se retourne, une vague électrique visant son cœur. Il m’a regardé, le regard perdu par le trou que j’avais laissé dans son torse, juste avant de s’effondrer dans la mare de sang qu’il avait perdu. J’ai fait demi-tour, partant vers la porte, jusqu’à arriver à l’endroit où se tenait Virginie.
« Qu’est-ce t’est ? Un genre de sauveur ? Un superhéros ?
– Non, plutôt un étranger excentrique. Au plaisir de vous servir, repris-je laissant tomber une carte à ma place. »
C’était une carte tout à fait normale, un as de pique, sauf qu’à la place du pique du milieu, c’était une fleur de Lys. Le dos portait une inscription en anglais « The Black Angel strikes where lies the beauty » Une citation qui se retrouvait souvent dans le passé de Leo. La carte disparaissait des doigts de celui ou celle qui l’avais ramassé lorsqu’il avait lu cette phrase.
«“L’ange Noir frappe là où la beauté réside” Tu ne crois pas que tu te la joue un peu Aiden ? me fit Sieg après que je sois sorti.
– Sieg ! Personne ne s’en souvient, à part nous deux.
– Lourd passé ?
– Bien sûr que non… C’est plutôt le brouillard qui commence à se faire lourd, tu ne trouves pas ?
– Trop vite, ce n’est pas normal.
– Retourne à l’intérieur, je m’en charge. »
Je m’attendais à voir un démon débarquer, au milieu de cette fumée, je n’y vois pas à deux mètres.
« Comme je suis content de te revoir mon ami !
– Derreck, toujours aussi, efféminé ?
– Toujours prêt à tuer un gardien de l’horloge !
– Et tu crois que ça me fait peur ?
– Ça devrait ! dit-il se mettant juste devant moi, à moins d’un mètre. Je suis adimensionnel, tu n’es qu’un contrôleur du temps…
– D’accord, alors déjà, tu sais que je t’ai dérouillé plus d’une fois !
– Pas la dernière fois !
– Tu t’es fait démonter par ma femme mon pauvre. Ce n’est pas plus crédible.
– Bon ! Je te l’accepte.
– Ensuite, je ne sais pas s’il a eu l’intelligence de te prévenir, mais le con qui t’a ramené ici, Ezira il m’a supprimé les pouvoirs en me confinant ici.
– Alors je n’aurais aucune difficulté à t’anéantir alors.
– Ouais, je sais toujours me battre et tu ne peux pas me mettre en position de faiblesse à cause de mes pouvoirs.
– Euh attends, je…
– Tu fuis ? Oui je m’en doutais, répondis-je alors qu’il s’enfuyait dans son brouillard, pourtant c’est une erreur. »
J’ai aspiré une partie du brouillard dans mon cœur, utilisant la cristallisation que je redécouvrais pour le rejoindre, plantant mes quatre lames dans son dos, au niveau de son cœur et j’ai réitéré la même attaque que précédemment pour lui supprimer son cœur.
« Un de plus éliminé, me fit Chester.
– Comment il en reste ?
– Aucune idée, je dirais entre un et cinq »
J’ai passé le reste de la journée à travailler mes coups, mes enchainements, ma force, mes capacités, Mais surtout à développer le style de combat d’Aiden. Je me suis basé sur le style du tigre de Leo, les coups, les parades, puis ai adapté la présence de mes deux armes avec, mon bâton qui pouvait se réduire dans ma main, lorsque je frappais, les lames que je pouvais poser en centaines sur un seul ennemi, qui n’explosaient que lorsque cette carte que j’avais laissé tomber repassait dans mes doigts. J’avais récupéré une bonne partie de mes capacités car même le contrôle énergétique était présent. Vers vingt-deux heures, j’ai stoppé mon entrainement pour me reposer sur le toit de la Tour de Verre.
« Tient, Chester, tu commences à faire comme moi.
– Je t’attendais.
– Pourquoi ? Quelque chose ne va pas ?
– Non tout va bien. Au contraire. J’ai entendu Virginie me parler tout à l’heure.
– Qu’est-ce qu’elle t’a dit.
– Déjà ça m’étonne un peu, mais elle sait que vous êtes dans un autre monde.
– Tu n’as pas pensé au fait que Sia aurait pu lui transmettre ses pensées, ou toi qui parles et elle qui t’entends ?
– Non, je n’y avais pas pensé à ça. Bref, elle est très fatigué et elle sait qu’elle manquera de force si elle est réveillée ou non lors de la fusion.
– Ce n’est pas plutôt Jessica que tu as entendu ?
– Je n’en sais rien, vous êtes tous schizophrènes ! Elle voudrait que tu récupère une partie de l’énergie du monde dans lequel tu es.
– Comment ?
– Ezira déploie une immense puissance à te bloquer toi et tes pouvoirs. Tout ça pour te prouver que ça aurait pu être différent, que ça aurait dû être différent. Elle voudrait que tu lui prouves que Virginie était bien amoureuse de toi. Ah ouais, c’était bien Jessica. En clair, elle veut que dans l’autre monde tu sortes aussi avec elle.
– Et, avec ça je récupèrerais cette énergie ?
– Pas toi, elle, mais oui, par contre, il y a un risque.
– Lequel ? Je le prendrais.
– On ne sait pas comment vous êtes entretenus dans ce monde, le risque c’est ce qu’il peut t’arriver à ta sortie. Ezira va certainement s’en prendre à toi.
– Pas grave, je prends ce risque.
– Content de te l’entendre dire frérot. »
Mercredi 25 décembre 2013, c’est Noël et on est en cours ! Alors oui, cette fois-ci ce n’est plus du tout crédible, mais je me devais prendre ce qu’il s’y passait au sérieux. Les deux premières heures avaient été tranquilles, je n’étais pas en cours, je m’ennuyais tout seul dans les couloirs. Lorsque nous sommes remontés à la pause de dix heures, j’ai cru apercevoir quelqu’un derrière moi en arrivant dans le couloir qui menait au préau. Sa vue m’effraya quelque peu, au point de me retrouver à l’autre bout du couloir. J’avais enfin retrouvé la téléportation et le mini ralentisseur de temps que m’apportait Toshiie avec. J’avais alors eu le temps que quelque chose allait arriver, une opportunité de commencer ma mission dans ce monde. Virginie avait trébuchée, laissant tomber son ordinateur de ses bras. J’ai alors usé de mes pouvoirs retrouvés pour la rejoindre et l’attraper avant même qu’il touche le sol.
« Tient, je crois que c’est à toi.
– Merci. Rapide dit-donc.
– Trop peut-être non ? Fais-y plus attention, je ne serais pas toujours là pour le rattraper.
– Dommage, répondit-elle s’en allant alors que j’étais encore fixée sur elle.
– Tu t’approches une autre fois d’elle et je te démonte ! me fit Alexia arrivant quelques secondes plus tard.
– Tu veux me frapper ? Vas-y, fait. Tu n’as pas à craindre que je te rende tes coups, je ne frappe pas les filles, encore moins les plus belles. »
Elle me jeta un regard déconcerté, sans trop savoir ce qu’elle devait faire, elle est repartie dans le même esprit.
« Tu vas vraiment finir par forcer quelqu’un au suicide Adam à force de jouer avec eux.
– Mais non Sieg, c’est une légende ça, lui répondis-je alors qu’il passait derrière moi, quoi que…
– Ceux qui tiennent à toi le supportent et c’est vraiment moins violent, c’est plus une sorte de folie incandescente.
– Leo ? Le “truc” que tu as vu tout à l’heure, je l’ai vu comme un des démons à éliminer.
– Qu’est-ce que je vais bien pouvoir faire pendant une journée alors ?
– Disparait pour mieux revenir !
– Sieg, faut que tu arrêtes franchement.
– Jamais !
– Je vais suivre ton conseil. Ça ne peut pas me faire de mal. »
Je ne croyais pas si bien dire. J’ai passé le jeudi dans la citadelle, bizarrement, Dvirel existait aussi ici. Je ne l’avais pas laissée flottante, mais posée au sol. Le lac qui l’accompagnait touchait à la fois Anathema, Amidia et Arios. Mis à part avoir visité toute la ville, m’être fait payé à manger par les habitants commerçants qui connaissait qui j’étais, je n’avais pas fait grand-chose, un bon moyen de se faire oublier et d’oublier l’endroit où je me trouvais.
Vendredi 27 décembre 2013, dernier jours de la semaine de cours et dernier jour potentiel de la semaine pour éliminer le démon, prénommé Shelby. Pas très commun comme nom quand même. Je ne m’attendais pas à ce qu’il soit vraiment difficile à battre, mais je ne le prenais pas à la légère pour autant. Ce matin-là, je partais de cette nouvelle ville, partant vers le lac à sept heures environ. Il était gelé, bleu azure. Tout le reste du paysage était gris, même la ville d’Akziel. Je suis arrivé dans le lycée, il était huit heures. J’ai passé la porte, entrant dans le bâtiment où flottait une atmosphère plutôt sinistre. Je suis resté quelques secondes la zone non éclairée pour observer ce qu’il se passait. Le démon se tenait au milieu, et tenait les autres en haleine. Personne n’osait bouger, je m’inquiétais de voir Joffrey et Bruno sans bouger avec les autres professeurs, auraient-ils peur de lui ? Moi en tout cas pas. J’ai commencé le changement d’apparence, toujours aussi long, un peu avant de passer dans la lumière. Je me suis de nouveau retrouvé devant Sia, dans la même position. Mais cette fois-ci elle me voyait, je l’ai entendu m’appeler Nova. Sur le coup j’ai regardé mes mains et effectivement c’était bien les siennes. Deuxième fois que je m’y rendais, je ne sais comment, deuxième fois que j’en sortais aussi tôt que ma transformation était finie. J’ai réapparu au moment où je passais dans la zone éclairée.
« Quelqu’un oserait-il s’opposer à moi ?
– Il est vrai que tu peux faire peur, surtout à de simples humains. Pourtant, je ne suis ni un humain et ce monde n’est pas réel. Alors si quelqu’un d’autre veux lui casser sa grande gueule ? »
Une grande partie du préau changeât de côté, pour s’agglutiner derrière moi.
« Bon, apparemment j’ai plus de succès que toi, j’ai même plus de fille que toi !
– Que viens-tu faire ici ?
– Sortir ! Tu es mon moyen de m’extirper de ce monde bordélique. Et oui je sais que ce n’est pas le monde réel, faut quand même pas me prendre pour un con.
– Je vais te faire sortir alors ! » dit-il se lançant sur moi.
J’avais déjà pensé le coup, j’avais placé un portail derrière moi, juste avant la foule et un second au-dessus de là où il était avant de me courir dessus. Je m’étais téléporté juste avant qu’il ne m’atteigne et sans portails, comme si tous les pouvoirs récupéré avaient étés augmentés en puissance.
« Alors, je vais te l’expliquer qu’une seule fois. Tu peux essayer de me tuer, t’a peu de chances d’y arriver. Je suis trop déterminer à rejoindre mon monde pour me laisser pourrir ici.
– Et qui t’est pour t’opposer au grand Shensei ?
– Shensei Shelby ? Quel nom de merde ! Aiden, au service de ces demoiselles !
– Arrête de faire ton beau.
– Je ne le fais pas, je le suis. Accepte la vérité l’ami.
– C’est ça ouais. »
Une seconde fois, cette précipitation allait le mettre en position d’infériorité. J’étais rapide, lui trop vieux. J’ai esquivé sa lancée, le couvrant de lames rouges.
« Tu comptes faire quoi avec ces lames ? Ça ne me fait même pas mal.
– C’est normal, pour l’instant » répondis-je laissant apparaitre ma carte entre mes doigts et lui calcinant le corps. « Du sang, t’aurais-je fait mal ?
– Arrête de faire le malin. Tu ne vaux pas mieux que ta mère !
– Personne ne touche à ma mère ! répondit Leo, à travers moi, sa main autour du cou de Shelby.
– Pauvre chou… dit-il avec une voix étouffée.
– Plus jamais ! » répondis-je le jetant et plantant sa tête dans mon bâton traversant le carrelage.
Sa tête était bloquée vers le bas du bâton, son corps était raide. Quelques secondes plus tard, Ezira fit son apparition devant moi. « Bravo tu l’a tué. Ce n’est pas pour autant que tu sortiras mon chou ! À plus tard ! » J’ai arraché mon bâton du sol, cassant le crâne de l’autre au passage. Je suis reparti, calme, comme si rien ne s’était passé. Virginie et Alexia me regardaient, l’une avec un regard effrayé ou admiratif, l’autre avec de la colère ou de la peur. Comme avec Leo, mes interventions laissaient une forte image impressionnante, puissante et effrayante de mes capacités. Pourtant je n’ai jamais recherché à savoir ce qu’ils pensaient de ce que je faisais. J’étais retourné vers le lac, mais dégelé grâce à sa mort, je me suis laissé flotter à sa surface, divaguant dans mes pensées. Le week-end a été plutôt calme, j’ai enfin pu retrouver une vie normale, à flâner dans la citadelle avec Sieg et sa fille.
Lundi 30 décembre 2013, j’avais définitivement abandonné les cours, complet et n’intervenais que lorsque je j’en sentais l’utilité ou que Grey ou Crimson faisait appel à moi.
« Dernière semaine Leo.
– Je sais Chaz. Tellement de choses à faire.
– J’ai l’impression que ce monde t’a fait découvrir pas mal de choses.
– Aussi bien sur moi que sur ce que je suis devenu. Les personnes qui m’accompagnent et tout ce qu’il me reste à faire.
– Alors va. Reviens, je commence à me faire chier tout seul.
– Je vais essayer, fis-je montant sur le rebord, a plus. »
Je me suis encore une fois jeté dans le vide, prenant mon envol juste avant de toucher le sol car oui, j’avais enfin retrouvé cette capacité aussi. Il était un peu plus de dix-heures lorsque je me suis rendu dans l’établissement, sous mon apparence. Il y avait presque personne, une dizaine à peine. Alexia est passée juste à côté de moi, me regardant assez méchamment, comme toujours, mais elle m’a plutôt ignoré. Au fond de la salle, Virginie était assise à une table, en sanglot. (Qui sait, Alexia s’est peut-être fait jetée ?) Je suis allé la rejoindre, m’asseyant à côté d’elle.
« Qu’est-ce qui t’arrive ?
– Je les déteste…
– Qui ? Dit-moi, je peux certainement faire quelque chose pour toi.
– Je sortais avec l’un d’eux, le blond. Le fait qu’il m’ait jeté ce n’est pas le problème. Le pire c’est que maintenant ils me traient de trainée, comme si c’était moi qui m’étais séparée de lui.
– Pourquoi est-ce qu’il t’a quitté ?
– Il trouvait que je passais trop de temps avec d’autres garçons, ou à en draguer certain.
– Moi par exemple ?
– Peut-être…
– Bien heureux qu’ils prêtent attention à moi.
– Pourquoi ça ?
– C’est une bande de cons, ils ne sont pas capables de traiter quelqu’un comme elle le mérite et je te dis ce que je pense, mais je suis certain que tu mérites mieux qu’eux.
– A ce point ?
– Bien sûr. Néglige-les, fait comme s’ils n’existaient pas. Et s’ils s’en prennent à toi, peut-être que ton ami Aiden resurgira pour t’aider.
– Toi aussi tu l’as vu ? Je ne l’ai pas rêvé. Tient, dit-elle me tendant un collier avec une sphère bleue en pendentif, si tu pouvais lui rendre ça.
– Oh ! Je… Je m’en chargerais. Au plaisir, repris-je quittant la table, et je sens qu’il va arriver plus vite que prévu, fis-je alors que les autres partaient. »
Je suis passé aux toilettes, juste avant qu’ils sortent, le temps de changer d’apparence pour ensuite me téléporter devant eux, dehors.
« Tient, qui voilà.
– Recule ! fit effrayé celui qui était devant.
– Oh, mais c’est qu’on a peur de moi ! Vous m’avez vu supprimer Shelby. Magnifique. Donc vous avez entendu tout ce que je lui ai dit et forcément ce pourquoi je suis là.
– A cause de l’autre salope ! » fit l’ex de Virginie.
Je me suis téléporté aussi tôt, plantant cet idiot en lui enfonçant mon bâton dans la gorge.
« Un volontaire pour essuyer ses acides gastriques de mon bâton ?
– NON ! répondirent-ils ensemble en fuyant.
– Mauviettes. »
J’ai nettoyé mon bâton en faisant gicler les liquides par terre, quand j’ai remarqué qu’ils avaient touchés autre chose au passage. J’ai alors attaché mon bâton dans mon dos, dégainé mes deux pistolets pour supprimer la tête de ce qui se tenait derrière moi. Je me suis ensuite retourné au moment où Chester fit son retour. « Plus qu’un ! » Chouette, un dernier et je sortais enfin de ce monde de merde. J’ai attendu midi et demi pour partir retrouver quelqu’un dans le lycée. Non pas Virginie, mais Alix. Le collier que m’avais donné Virginie lui appartenait, enfin du moins, elle l’avait dans mes visions. Alors lorsqu’elle était avec ses copines sous le préau, j’ai fait mon entrée, glorieuse et arrogante.
« Mesdemoiselles !
– Adam ! me répondit Alix.
– Parce que tu me connais en plus ?
– Autant que tu me connais. Tu le sais très bien.
– J’en doute quand même. »
J’étais à fond dans mon apparence puissante et pour m’assoir, j’ai pris une chaise la lançant vers la table, m’asseyant dessus juste avant qu’elle ne heurte.
« Si je te dis qu’après ce jour, ta vie va changer radicalement ?
– J’ai du mal à y croire. Pourquoi ça ?
– Déjà, pour ça ! fis-je lui montrant le collier.
– Vous pouvez nous laisser les filles s’il vous plait. Mais où est-ce que tu as trouvé ça ?
– Hey, toi aussi t’es coincé dans ce monde ?
– Oui ! Et alors !
– Fait-moi confiance, je vais nous en sortir, répondis-je lui mettant le collier dans les mains.
– C’est le collier de ma mère, je ne sais même pas quand est-ce que j’ai pu le perdre.
– Lorsque tu t’es fait kidnappée, répondis-je me levant.
– Mais…
– Fait-moi confiance, demain on devrait retrouver notre monde normal. »
J’ai passé le reste de la journée avec Grey qui ne faisait rien comme moi, lui aussi ce monde commençait à l’ennuyer.
« Tu viens au cross demain ?
– Forcément, demain, dernier démon au cross. On sera sorti quelque heure plus tard.
– Alors lorsque tu as fini le tient, viens me rejoindre, je pourrai avoir besoin de toi.
– Pour ?
– Aider ceux qui ont des problèmes. Personne ne doit savoir qui je suis sauf ceux qui le savent déjà.
– Arrête de déprimer. On va sortir. Ce n’est qu’une question d’heures.
– Je te fais confiance Adam. Enfin, je l’espère. »
Mardi 31 décembre 2013, dernier jours de l’année. Dernier jours dans ce trou à rat. Je devais sortir et je sortirais ! J’ai dormi depuis la nuit du trente et midi du trente et un, pourquoi ? Pour charger mon cœur. Une heure et demie, le parcours des terminales commençait, seulement les hommes. J’ai commencé doucement pour me chauffer et ensuite j’ai légèrement tourné l’anneau de mon cœur. J’ai distancé tout le monde, sans exceptions. Six kilomètres de cross, j’en avais fait quatre en moins de trois minutes, sans ralentir. Sauf au moment où dans une zone protégée de la forêt j’ai rencontré un gros truc. J’ai alors sorti mes lames, prêt à dégager cet idiot qui restait au milieu du chemin. J’y suis arrivé dessus à toute vitesse, l’embrochant avec mon bras droit au passage, le jetant dans un près quelques mètres plus loin. J’ai fini le parcours en cinq minutes, pas plus. Seul Crimson ne fut pas interpellé par ma performance.
« Tu es endurant dit-donc ! me fit Joffrey.
– Tu devrais le savoir pourtant ! Aller, je m’en vais, faut que je rejoigne ton frère.
– Et surtout, sors nous d’ici !
– Ne t’inquiète pas ! »
Je n’ai pas voulu gaspiller l’énergie de mon cœur alors j’ai opté pour la téléportation. Une vingtaine de minutes plus tard, le cortège des filles partait. Je m’étais installé avec Bruno sur un siège, une bière à la main.
« Je commence à comprendre pourquoi tu t’installes sur le parcours.
– Qu’est-ce que tu insinue Adam ?
– Tu le sais très bien. Ce n’est pas pour nous, c’est pour les filles.
– Arrête, l’alcool te fait dire des conneries.
– Impossible. Mon cœur me supprime tout effet psychotrope.
– Tu n’es pas sérieux ?
– Complètement.
– Monsieur ! fit une fille passant, derrière nous, Virginie c’est fait mal.
– On s’en occupe.
– J’y vais l’ami, fis-je partant aussi tôt. »
J’ai pris ma plus grande vitesse, parcourant le kilomètre qui nous séparait en dix secondes. Je me suis stoppé à côté d’elle, laissant une grande trace dans le chemin lors que mon freinage.
« Hey, princesse, est-ce que ça va ?
– Je crois que je me suis cassé la cheville.
– Bon, accroche-toi à moi, on va faire le chemin à l’envers.
– Combien à faire ? demanda-t-elle passant son bras autour de mon cou.
– Cinq-cents, sept-cents mètres ? Tu ne te sens pas de les faire ?
– Pas trop non.
– D’accord. Une seconde, fis-je détachant l’anneau de mon cœur. Tient.
– Tu veux que j’en fasse quoi ?
– Pose-le sur ton torse, où tu veux et laisse la magie s’opérer. »
J’ai parcouru la distance pour rejoindre les professeurs, je l’ai porté tout le long, sentant qu’elle était déjà mieux qu’avant.
« Joffrey. Je fais quoi des accidentés ?
– Oh ! Bon, euh, tu la ramène au lycée et tu l’envoie à l’infirmerie ?
– D’accord.
– Faut qu’on retourne au lycée ? demanda Virginie.
– Ouais. Tu ne te sens pas de faire le trajet ?
– Non toujours pas.
– Bon, laisse-moi juste nous placer là où ils nous ne verrons pas trop.
– D’ailleurs, d’où tu appelles les profs par leur prénom ?
– C’est une longue histoire. Je peux récupérer mon anneau.
– Oui tiens, mais qu’est-ce que tu comtes faire. Oh ! dit-elle alors que je la portais avec les deux bras.
– Je vais prendre un raccourci. »
Je me suis envolé, traversant la moitié de la ville pour rejoindre le lycée, me posant dans la cour, près de la porte de l’infirmerie. J’ai dû rester une demi-heure avec elle le temps qu’on lui fasse un plâtre et qu’on lui offre des béquilles. Lorsqu’on était dans la cour, elle m’arrêta vers le milieu.
« Il faut que tu m’explique.
– Tu, te souviens de ça ? fis-je en sortant ma carte.
– Oui, mais attends qu’est-ce que ? »
J’ai passé la carte devant mes yeux, changeant d’apparence immédiatement.
« Aiden !
– En personne. Ça t’étonne ?
– Non ça, oh !
– Si tu le permets, peut-on renter avant que tu ne me gueule dessus parce que mademoiselle à froid.
– D’accord. »
On s’est installés que les bancs bleus qu’il y avait à côté de la porte. Elle s’était assise sur mes genoux, la jambe tendue et j’avais repris mon apparence.
« Ben dit donc, tu ne perds pas de temps.
– Tu avais raison. Ils pensaient que je m’intéressais à toi.
– Et ? Est-ce vrai ou infondé ?
– Je te répondrais si tu m’explique qui tu es vraiment.
– Adam Pearce. Guerrier Elemental Enchainé. Porteur du Gardien de l’Ordre Leo Kryssen. Je suis le gardien de l’horloge, protecteur et contrôleur du temps. Qu’est-ce que je fais ici ? Je me suis fait attaquer par un démon dimensionnel, il m’a enfermé avec d’autres personnes comme moi dans ce monde qui n’est pas réel. Le seul moyen d’en sortir est d’éliminer les démons gardiens et d’effectuer une mission qu’il m’avait confiée. Il voulait me prouver que tout ce serait passé différemment sans Leo donc sans Nikki et sans que je ne trouve ma femme. Pour sortir je dois lui prouver que ma femme est bien amoureuse de moi, sans l’influence de celle de Leo dans son corps.
– Et qui est ta femme ?
– Toi.
– Moi ? Vraiment ?
– Ouais, tu vois, dans mon monde, la première fois que je t’ai vu je me suis demandé si vraiment je pouvais être un prétendant pour ton cœur. Quand j’ai su que tu portais l’âme de Nikki, je me suis dit, est-ce que mes sentiments pour elle ne seraient pas déjà influencés par Leo et est-ce que pour toi ce n’était pas la même chose. Leo s’est évertué à me prouver que non, tout était bien séparé. Lorsque Chester qui est dans l’autre monde m’a dit que ma mission était de lui prouver que nos sentiments étaient bien séparés de Leo et Nikki. J’ai vu une chance de me prouver ce que m’avait affirmé Leo et ai abandonné le côté jeu que je voulais donner à ce monde.
– Mais, si toi et tes amis sont dans ce monde, pourquoi pas elle ?
– Elle est dans le coma, attaquée par un démon, Ezira, celui qui nous a emmenés ici.
– Oh ! Désolé.
– Ne t’en fait pas, je sais qu’elle va bien.
– Donc, si j’ai bien compris, si je te dis que ses idées étaient infondées ou non, tu pourras sortir ?
– En théorie.
– Hey vous deux, vous m’arrêtez… »
Un surveillant était sorti de la vie scolaire pour nous dire d’arrêter notre comportement amoureux, même s’il n’y en avait pas. Presque pas. J’ai dégainé Ivory, pointant la tête de celui qui était venu nous déranger. Il est rentré aussi vite qu’il était sorti, bégayant un « Désolé, désolé ! » On s’était mis à rire en voyant la façon dont il était effrayé par mon arme.
« Tu veux que je te dise…
– Je ne sais pas, seulement si ça en vaut la peine… »
Elle m’a tout juste laissé finir ma phrase qu’elle était déjà en train de m’embrasser. « Moi aussi, la première fois où je t’ai vu, je t’ai tout de suite trouvé quelque chose de spécial » Dit-elle après m’avoir lâché. Tout autour de moi commençais à s’effacer, tout devenait noir, sombre.
« Ça commence.
– Tu t’en vas alors…
– Je ne pars pas. Je vais revenir. Je veux juste que tu ne m’oublie pas. Que tu penses à moi, que tu rêves de moi, jusqu’à ce que je te retrouve, dis-je lui tendant la bague de fiançailles que Leo avait depuis des années pour Nikki.
– Promis… »
Je suis sorti dans la cour, attendant que je parte.
« Es-tu sur de ce que tu as fait Adam ?
– Mais oui Leo, tu verras, lorsqu’elle reviendra, elle l’aura au doigt et je ferais la demande.
– Ambitieux.
– C’est toi qui m’a appris ça l’ami.
– Là-dessus tu as raison. »
J’ai ensuite disparu quelques minutes dans le noir, j’entendais Ezira dire « ce n’est pas vrai, ce n’est pas vrai ! » je me suis réveillé quelques secondes plus tard, dans une sorte le labo, suspendu par des liens énergétiques. Ezira c’est violemment approché de moi alors que les autres se détachaient. Il m’a lancé une sorte de couteau dans le torse, traversant le torse, cassant à la fois mes liens et mon cœur qui s’est détaché et est retombé devant moi en miettes.
« Leo ! me fit Sieg venant vers moi.
– Alors comme ça tu veux me les briser ? Viens ! Je vais te monter qui est plus chiant de nous deux ! dis-je passant à l’apparence de Nova.
– Tu n’as pas apprécié mon petit voyage.
– Non ! Et maintenant je ne supporte plus ta sale gueule ! » repris-je dégainant ma lame éclair.
Je n’ai même pas voulu lui laisser une chance. J’ai brisé sa garde, une première fois avec ma lame et ai reproduit la même attaque pour lui couper un bras. J’ai changé ma lame pour les deux crochets. Les plantant dans son torse, bloqué dans les côtes pour pouvoir lui ouvrir la cage thoracique. J’ai fini en changeant le second crochet pour mon canon de bras, plantant la lame qui était sous le canon dans la gorge pour le plaquer au sol et tirant alors que le canon était en face de sa tête.
J’étais enfin sorti, mais certain de ce qui allait se passer ensuite. Je n’avais plus de cœur et j’étais donc obligé de garder l’apparence de Nova pour rester en vie.
Partie 8 : Sans Cœur
Plus de cœur, donc plus d’Adam, plus de Leo, plus d’Aiden ! Ils allaient me manquer. Alors pourquoi Nova est le seul qui me tient en vie ? Il est le seul qui ne requiers pas mon cœur sur vitaminé. Donc, il est ma seule solution pour rester en vie.
Lundi 20 janvier 2014, Virginie toujours dans le coma. Toujours dans le même état, je commençais à me dire que cette situation s’approchait de quelque chose qui devait m’arriver inévitablement. La seule chose que je me demandais aujourd’hui c’est comment ça allait m’arriver.
« Tu es censé te retrouvé, seul, avec cette fille, Alix, dans un endroit qui paraîtrait être une forêt.
– Oui.
– Tu ne crois pas que ça fait un peu, enfin, tu vois quoi.
– Chaz !
– Désolé, c’est juste une supposition. En attendant on n’a toujours pas retrouvé Sia.
– Sia, coincé dans une prison, cellule sombre aux tons bleus, elle veut échapper à quelqu’un, ou quelque chose… fis-je commençant à tourner en rond.
– Attends, où tu veux en venir ?
– Mais qu’est-ce qui pourrait retenir Sia ? Pas de démon, pas d’ange, elle n’est ni bloquée dans les limbes ni dans le monde oblitéré.
– Nova ?
– La ferme ! Pourquoi je n’arrive pas à trouver où elle est enfermée ?
– Tu n’as aucune indication sur ce que tu as vu ?
– Certaines dates ramenaient à la grande guerre, le début, la fin, la création…
– De ?
– Qui peut bien le chercher ?
– Peut-être le dernier survivant excepté ton père et toi, me fit Tara.
– Je ne le pensais pas encore vivant…
– Mais qui ? demanda Chaz.
– Alan, repris-je me mettant à flotter, tu ne le retrouveras pas…
– Nova !
– Désolé, il faut que j’y aille » repris-je m’envolant.
J’avais utilisé une sorte de divination pour le localiser, comme ce que j’avais lorsque je changeais entre Adam et Aiden. Je me suis alors envolé vers lui aussi vite que je l’avais trouvé. En quelques minutes je l’avais rejoint et envoyé au sol. « Mauvais choix » me fit une voix derrière moi. Je n’avais éliminé qu’un clone et c’est le vrai que j’avais à affronter maintenant. Il ne m’en a même pas laissé le temps, me bloquant en me prenant au cou au milieu des éclairs qui tournaient autour de ses mains. On a chuté d’une centaine de mètres, finissant par atterrir dans une voiture qui passait. J’ai essayé de sortir une arme dans la chute, mais sans succès. La frappe fut si forte que je ne savais pas où ni comment j’avais atterris. J’ai dû me réveiller que une ou deux heures après.
« Oh ! Merde ! fis-je voyant mon corps transpercé par la roche sur laquelle j’étais tombé. Elle va faire mal celle-là ! repris-je m’extrayant et voyant mon corps s’illuminer en bleu.
– Où est-ce qu’on est ? fit une voix éloignée.
– Et en plus on n’est pas seul. Magnifique. Viens Alan, je te promets de ne pas essayer de te tuer… Quoi que, c’est déjà fait, dis-je en voyant son corps transpercé par ma lame éclair, où est-ce que j’ai fini avec tout ça moi ? »
Lorsque j’ai commencé à regarder autour de moi, un flash est venu me troubler. C’était l’endroit où j’étais lors de mes visions. Mon instinct s’affola d’un coup, juste pour s’assurer que ceux que j’avais entendu allaient bien. Si mes pensées s’avariaient vraies, la voix de fille que j’avais aperçu tout à l’heure était celle d’Alix. Je suis alors parti dans la même direction qu’eux, au milieu de la forêt. J’en ai vu le bout vers dix heures, sortant en face d’une route, qui apparemment ne menait nulle part, du moins je n’en ai jamais vu le bout. Au loin se tenait un château, assez majestueux, ressemblant au manoir du père de Leo. Quelques mètres plus loin, il y avait un petit campement. Une cabane en bois exotique, une zone entourée de pierre pour l’emplacement du feu et quelques installations à l’extérieur. « Plus puissant que je l’imaginais ! » dis-je en l’apercevant. J’utilisais les capacités de l’horloge pour me faciliter la vie. Je crois que le seul problème que j’avais depuis le début, c’était de ne plus entendre ma voix ou celle de Leo, comme une forme de solitude, ou la paix, je ne savais pas trop. Je m’étais installé à la table, pensant en premier savoir ce qu’il se passait entre les deux autres personnes. Le temps que ça prenait m’a forcé à prendre quelque chose à manger, plutôt le faire apparaitre. D’un coup, mon corps se mit à frissonner et ma vue devint blanchâtre. J’étais entrée dans une de mes visions. En l’occurrence celle qui m’avais permit de savoir qu’Alix était la petite fille de Tara. Elle venait me rejoindre, jetant son copain qui repartait à pied. Je lui disais alors que j’étais Nova et que j’étais déjà mort.
« J’ai une question avant que l’on aille plus loin. Tu es toujours comme ça ? demanda Alix.
– Comment ça, comme ça ? » répondis-je, les pieds sur la table, assis sur une chaise, un café dans la main gauche et un chausson aux pommes dans l’autre.
« Aussi, arrogant, irrespectueux.
– Comment oses-tu ? Tu ne me connais pas et tu te permets de me juger ?
– Tu t’installes dans un campement, tu ne sais même pas s’il n’y a pas quelqu’un.
– C’est moi qui l’ai posé ce campement, je ne te permets pas de me traiter de voleur. Et si seulement tu avais réfléchi un tant soit peu, tu saurais qu’il n’y était pas quand tu y est passé à côté avec ton mec.
– Euh…
– Tu as de quoi manger dans la commode devant toi. Sert toi. On est là pour un moment encore.
– Euh, Nova…
– Oui ? Qu’y a-t-il ?
– Je suis désolé pour tout à l’heure, je n’aurais pas dû…
– Tu as raison, ma vocation première est de faire chier le monde. »
Ma cabane n’en était pas réellement une, c’était un pont de passage jusqu’à l’horloge.
« Tient, Nova.
– Sieg, toujours calme chez toi ?
– Ouaip. Et toi ?
– Tu savais que j’allais devoir me retaper mes visions ?
– Excuse-moi, je ne peux pas savoir ce qui arrive à Nova. Je suis que contrôleur du temps, pas gardien.
– En clair, je dois m’en sortir tout seul ?
– Exactement.
– Génial. Je te remercie de ton aide qui ne m’a servi à rien.
– Mais de rien mon cher.
– Bon, comment je vais m’en sortir…
– Hey ? Y’a quoi là-dedans ? demanda Alix derrière la porte.
– Entre, tu le verras par toi-même.
– Non ! C’est plus grand à l’intérieur.
– Faux ! On n’est pas dans la cabane, mais sur l’horloge.
– L’horloge ?
– Il y a un truc qui tourne et qui fait de la lumière dans l’espace. C’est la grande horloge, puissante montre maitresse du temps de tout et n’importe quoi. Sans elle tout tombe, est-ce que l’univers peut vraiment chuter physiquement comme un objet attiré par la gravité ?
– Euh…
– Elle se situe au centre de l’univers ! À quelques centaines de mètres près.
– T’es sérieux ?
– Ais-je l’air de me foutre de toi ? Peut-être que oui en fait.
– Tu es certain que ça va ? J’ai l’impression que tu es…
– Un peu trop déjanté ? Oui, trop même.
– T’est marrant. Tu es peut-être fou, mais ça te rend drôle.
– J’espère. Je te rappelle que je dois me coltiner une gamine jusqu’à qu’on puisse venir te chercher.
– Hey ! Puisque c’est comme ça, je m’en vais !
– Part pas trop loin, je n’ai pas envie de partir te chercher. »
Je n’arrivais pas à comprendre comment il fallait que je m’y prenne. Sachant que la personnalité de Nova m’empêchait de réfléchir correctement, ça devenait de plus en plus dur. Seize heures, je me suis décidé à sortir de l’univers pour retrouver la Terre, m’installant dans le canapé à l’ombre à côté de la cabane avec Alix.
« Qu’est-ce qui te préoccupe ?
– Ce qui vient de m’arriver.
– Tu t’es fait sortir de la voiture par un ami, Sieg, c’est pour ça que tu es encore vivante.
– Et ceux qui étaient avec moi dans la voiture…
– S’il vous a sauvé toi et ton copain, c’est parce qu’il devait y avoir une raison. Hey, qu’est-ce qu’il y a ? fis-je m’arrêtant en voyant ses yeux pleins de larmes.
– Ils me battaient…
– Attends, vraiment ?
– Ils ne m’aimaient pas. Ils me battaient, m’insultaient, j’ai toujours essayé de les éviter, mais ce n’était pas toujours facile.
– Comment tes parents pouvaient te faire ça ?
– Ce n’était pas mes parents. Mes vrais parents je ne les ai jamais connus…
– Oh, princesse, fis-je alors qu’elle posait sa tête sur mon épaule, que pourrais-tu me répondre si je te disais que je peux te faire retrouver tes parents, tes origines ?
– Tu, tu peux vraiment ?
– Bien sûr, tu n’imagines même pas tout ce que je peux faire.
– T’est génial. »
Ma première envie était de me rapprocher d’elle, tout faire pour qu’elle s’habitue à moi, qu’elle m’accepte et qu’elle me supporte. Plus tard dans la journée j’ai découvert que Nova avais des talents de cuisiniers, presque aussi bons que ceux de Sieg. J’avais fait des macarons, du café et un bon repas chaud pour elle. (C’est fou tout ce qu’on peut avoir avec une grande horloge) Je m’étais allongé sur le canapé pour faire une sieste, après avoir allumé le feu. Quelque chose m’avais réveillé environ une demi-heure plus tard. C’était Alix. Je me suis remis en mode vision, cette fois-ci, c’était celle où elle était à côté du feu en larmes, me disant qu’elle se trouvait nulle, moi j’y répondais en disant que les autres n’ont jamais vu ce que je savais d’elle.
« Repose-toi princesse, la fatigue ne t’aide pas. Entre dans la cabane, tu entreras dans une des chambres de l’horloge.
– Certain ?
– Si tu ne veux pas me faire confiance pour ce que je t’ai dit, fait-moi confiance au moins pour ça.
– D’accord. »
Moi, comme ma véritable forme dans les cas où j’étais trop perturbé ou pensif, je ne dormais, pas. Enfin, ce n’est pas le terme exact. Je dormais, mais je me mettais en stase, fixe et invincible. Le temps m’a paru n’être qu’une seconde.
Mardi 21 janvier 2014, il était dix heures lorsqu’elle s’est réveillée. Moi j’étais dehors, en train de profiter du soleil. Troisième vision, celle où elle me surprenait torse nu. Le moment où elle s’est coupée, j’étais en train de me perdre dans mes pensées, dans ses yeux, son visage. Sa beauté me fascinait toujours plus chaque jour. Puis vint la suite de la vision, lorsque je lui montrais le château en face de nous.
« J’ai quelques questions qui me dérangent depuis hier.
– Je t’écoute.
– Déjà, où est-ce qu’on est ?
– Si je me fie à l’humidité, l’ensoleillement assez faible, le paysage montagneux et couvert de forets ou de champs cultivables. Je dirais l’Irlande.
– Sérieux ?
– Oui je sais, on vient et on était en France. Aléas d’oser m’envoyer dans une voiture aussi. Ensuite ?
– Qu’est-ce que tu caches derrière ta folie ? Ton côté intenable ?
– Ma colère, elle me détruit depuis trop longtemps.
– Il ne faut pas la cacher, laisse la sortir, laisse la parler, elle peut devenir ta plus grande de force.
– Quoi d’autre ?
– Qu’est-ce que ce château enferme pour que tu y prête autant d’attention ?
– Quelque chose d’à la fois extrêmement dangereux et puissant, mais aussi de magique, merveilleux. Une arme si puissante qu’elle peut supprimer tout un peuple, toute une planète.
– Oh…
– Rassure-toi, si je suis ici c’est pour la récupérer, qu’elle reste dans des mains qui sauront en faire bon usage. Aller, mange au lieu de fantasmer sur ma personne.
– Arrête… »
Je me demandais à quel moment je pourrais lui dire ce pourquoi elle est vraiment ici, c’est plutôt délicat à la fois. Je ne savais même pas comment j’allais avoir besoin d’elle, ni comment on ferait la fusion. J’étais retourné dans l’horloge, pour retrouver Sieg.
« Comment tu la trouves ?
– Tu veux vraiment le fond de ma pensée ?
– Je m’en passerai. Tu la supporte ?
– Bien sûr. C’est autre chose qui me fait exploser la tête.
– Comment, pourquoi ? Qu’est-ce qu’elle va faire ?
– Ô grand devin, éclair moi de ta lumière de sagesse !
– Espèce d’idiot. Elle sera ton billet de sortie. Comment ? Je ne sais pas, tout ce que je sais c’est que la définition voudrais que tu partes sans elle, elle te rejoindra après.
– Nikki…
– Apparemment, tu remercieras Alexia pour ses conseils.
– Sieg !
– Quoi ? dit-il énervé.
– Je vais te la ramener ta femme, ne t’en fait pas. »
Une perdue et une dont je ne savais pas comment elle devrait m’aider. Plus j’avançais, plus je me disais que ça allait être dur, compliqué et surtout chiant. Quatorze heures, je m’étais décidé à attendre le lendemain pour rejoindre mon destin et à passer le reste de la journée avec la demoiselle qui était avec moi. Le soleil était présent, pour une fois, on était tous les deux sur l’herbe, en train de regarder le lac que surplombait le château. Quatrième vison, cette fois-ci elle voulait savoir pourquoi je l’avais faite venir, je lui disais qu’elle était différente des autres.
« Tu disais que j’avais quelque chose de spécial. Tu parlais de quoi ?
– Tu n’as aucune connaissance de tes origines, qui sont tes parents ?
– Non…
– Bon, je pensais éviter ce passage-là. Le début est la question, pourquoi Lojin t’a kidnappée ? Simplement parce qu’il savait que j’aurais besoin de ton aide. Tellement que pour m’atteindre il s’en est pris à toi.
– Euh…
– Oui, moi Nova, Adam, Leo, Toshiie, tous les mêmes, juste un esprit différent. Si je te portais déjà un attrait c’est parce que quelqu’un que je connaissais depuis longtemps m’a demandé si je pouvais te retrouver. Elle s’appelle Tara et c’est ta grand-mère. Ça va jusque-là, pas trop d’info d’un coup ?
– Ça va.
– Ensuite, pourquoi est-ce que tu as été emmené avec moi lors de mon crash dans la voiture ? Tu es la seule qui pourra me sortir du château lorsque je j’aurais récupéré ce qu’il contient. Ne me demande pas comment, je n’en ai aucune idée.
– Mais pourquoi moi alors ?
– J’en viens à ce que tu es vraiment. Ta grand-mère est une Enchainé, comme Adam. Toi, tu es une eran, l’une des personnes les plus puissantes sur Terre, le type représentatif de la puissance Terrienne, tu viens d’une dimension parallèle même si tu es née sur Terre.
– Comment je dois prendre ça ?
– Comme tu en as envie. La suite, le plus dur. Je sens que tu vas m’en vouloir de te le dire. Une fois que je serais sorti, si je sors, je vais avoir besoin de toi, de ton collier pour autre chose.
– Dit, je verrais comment je le pendrais.
– Je devrais te faire disparaitre. Non, Alix attends ! dis-je alors qu’elle s’en allait. Oh ! Merde !
– Un coup de main peut-être ?
– Sully. Si je m’attendais à toi.
– Nova. Tu te décides à aller le chercher alors ?
– Venu chasser du démon ? Oui sinon je ne serais pas à ici à désespérer alors qu’elle me déteste.
– Ah, les femmes. Laisse-lui du temps.
– Sully…
– Désolé. Pas voulu. Mais c’est vrai, tu lui dit qu’elle va disparaitre. C’est quand même un peu dur de se dire que l’on va être effacé du monde.
– Presque. Heureusement que je suis déjà amoché, ça se verra pas si j’empire.
– Aller, bon courage l’ami.
– Merci. Je vais en avoir besoin. »
Le soir, dix-neuf heures environ, la dernière vision est arrivée. Sur celle-ci j’étais en train de préparer mes bagages pour partir. Je m’en suis voulu d’avoir été aussi méchant avec elle. Je suis alors reparti la voir dans sa chambre.
« Excuse-moi, je n’aurais pas dû te dire ça et peut-être j’aurais dû te dire la vérité dès le début.
– Pourquoi tu ne l’as pas fait ?
– Parce que je savais que tu le prendrais mal, pire que si tu n’étais pas habitué à moi, pire que si je n’étais qu’un inconnu à tes yeux, répondis-je m’asseyant en face d’elle.
– Tu penses que je devrais te pardonner ?
– Ne le fait pas si tu n’en a pas envie. Tout ce que je voulais c’est que tu te sentes bien, je ne sais même pas ce qui m’attends là-bas, ou après.
– Je me sens calme avec toi, dit-elle en me prenant mes mains.
– Comment ça ?
– Depuis des années, j’ai toujours l’impression qu’il me manque quelque chose, comme un vide au fond de moi qui est irrassasiable. Toi qui sais des tas de choses, tu ne pourrais pas m’aider ?
– T’est certaine que tu ne vas pas me jeter un couteau dans le cœur si je te le dis ?
– Tu as ma parole.
– Ce n’est pas un vide, c’est un manque d’une partie de toi. Enfin de toi. Pas exactement. Tu es une eran, portant une âme aldorienne. Celle de ma femme Nikki. Tu possèdes une partie de son âme, c’est ma copine qui possède l’autre.
– Oh ! Tu veux dire que, je suis comme toi avec Leo ?
– Exact. Seulement, il faut que je justifie quelque chose. Je t’ai dit qu’il fallait que je te fasse disparaître. Ce n’est pas exact. Ma copine est dans le coma, depuis quelques mois. Le seul moyen que je la sorte est que je lui donne la seconde partie de l’âme de Nikki.
– Tu veux me l’enlever ?
– Impossible. Si je faisais ça, je te tuerai. La seule technique que j’ai c’est la fusion.
– Moi et ta copine ?
– Tu ne vas pas encore m’envoyer dans un rocher ?
– Non ! Tu es bête…
– Ça te fait peur ? Tu te demandes comment ça va se passer, qu’est-ce que tu vas devenir ?
– Un peu…
– Je ne peux rien te garantir. Je me le demande moi-même.
– Ça te dérange de rester avec moi ? Je n’ai pas envie de dormir seule.
– D’accord. »
Mercredi 22 janvier, sept heures. L’heure de mon départ. Je me suis dit que je devais partir avant qu’elle ne se réveille, pour qu’elle ne me retienne pas. J’ai commencé à sillonner la route, dans l’air brumeux et humide de la rosée matinale. J’avais fait dix ou vingt mètres quand une voix vint m’arrêter. « Nova ! fit Alix derrière-moi. Pourquoi je n’essaierai pas avec toi ? » Je me suis retourné, elle était enveloppée dans le drap doré de son lit. J’ai commencé à me rapprocher d’elle. « C’est vrai, ça n’a jamais marché avec les autres, mais tu n’es pas comme les autres » Je n’avais toujours pas répondu, j’avançais, puis j’ai laissé tomber mon sac à deux mètres d’elle. « Nova… » fit-elle alors que je n’étais qu’à un pas d’elle. Je l’ai prise dans mes bras, regardant ses yeux apeurés, puis je l’ai embrassé. J’avais l’impression de revivre, comme si Adam et Leo voulaient revenir à ma place. Elle m’a regardé avec un petit sourire timide juste après, comme si c’était ce qu’elle voulait, mais qu’elle ne s’y attendait pas.
« Promet moi de m’attendre. Je reviendrais.
– Certain ?
– Certain princesse. À plus tard. »
J’ai opté pour la téléportation pour atteindre la dernière partie du chemin. La partie pavée qui rejoignait le château.
« Tiens, Sieg !
– Faudra que tu m’explique un jour.
– Que je t’explique quoi ? Pourquoi j’ai posé des canons anti aériens sur le château, dissuadant tous ceux qui veulent le voir d’en haut, pourquoi ce n’est pas moi qui l’ai construit ? Juste que je suis un guerrier, pas le temps pour m’amuser à ça. Sérieux, pas le temps, trop paradoxal.
– Non, comment tu fais pour que toutes les filles tombent amoureuses de toi.
– Pas toutes ! répondis-je me tournant vers lui.
– D’accord, pas toutes. Tu t’y enfonce seul ?
– Je me demande si Sully n’est pas dedans. Au pire.
– Bon, alors bon voyage et bon courage.
– Tu penses vraiment que j’en ai besoin ?
– Oui, cette fois-ci oui. »
Engouffré dans une structure qui me rappelait le tombeau des anges. Mêmes matériaux, même façon de construire. Je savais ce qui se trouvait au milieu du chemin, pas ce qui m’attendait à la fin ni au début. Après avoir fait quelques mètres dans un couloir trop droit et trop long, la voix de Sully vint perturber le silence mortuaire qui flottait.
« Te revoilà.
– Pourquoi je suis content de te voir ?
– Peut-être parce que ce couloir et un désespoir constant. Plus tu avances, plus il recule.
– Génial, s’il me faut devenir fou à lier, conseil, recule.
– Comme tu voudras.
– Tu as essayé les embranchements ?
– Ils sont pareils. Toujours plus long une fois dedans. Et c’est tous les même, si tu préfères, ce qui est entre le premier et la porte se colle après l’embranchement et le second sera aussi le premier.
– Bon, garde-moi mon sac. Tant que j’ai encore mes pouvoirs. Je vais nous sortir.
– Si tu le dit. »
Ce n’était qu’une question de vitesse. Le système a été étudié pour que je sois le seul à pouvoir y entrer. Vingt minutes à traverser les passages, menant toujours à un endroit différent du couloir, dix minutes pour activer tous les passages et désactiver leur superposition. Le dernier menait juste au-dessus de la porte au fond.
« C’est une question de temps. Mais ça te dépasse ça l’ami.
– Comme tu dis. Qu’est-ce qui nous attends derrière ?
– La disparition de mes pouvoirs temporels et spatiaux, une chimère, un gardien du feu et un cerbère.
– Ben voyons, tu n’as pas trouvé pire que ça comme défi à te donner ?
– Je ne me suis jamais donné les défis, ils les ont fait pour que je puisse les faire.
– Mais qui ils ?
– Aucune idée. Des gens bizarre, Saory certainement. »
Une arène, trois gardiens, trois portes. Sully avait choisis l’asphyxie pour les éliminer. Plutôt efficace.
« Tu respires encore ?
– Je ne sais pas si tu l’avais remarqué, mais je ne respire pas. A quoi bon respirer lorsque qu’on est mort.
– Perspicace l’ami. Quelle porte tu choisis ?
– Une sort, l’autre même au trésor, la troisième, aucune idée.
– Il est dit que les portes sont classées a chronologiquement, par rapport à ce qui se tient derrière.
– Par logique, la sortie et le trésor sont côte à côte. Mais comment savoir où se situe la dernière si on ne sait même pas où elle mène.
– Comment tu comptes t’y prendre ?
– Comme ça », dis-je dégainant mon épée et la lançant à travers la porte centrale. Elle me revint en sortant de la porte derrière nous. « Magnifique ! repris-je en la rattrapant au-dessus de ma tête. Une boucle temporelle. Toi, tu prends la première, tu sors et attend que j’en fasse ce même. Moi, je vais chercher de quoi faire péter la planète.
– Attends, tu me dis quand même pas de te laisser seul avec ce truc ? Si, au temps pour moi, désolé !
– Aller. Espérons que je ne me fasse pas tuer dans ce merdier. »
Lorsque j’ai passé la porte, je me suis retrouvé dans une grotte, un peu comme le tunnel qui menait chez les ancestraux. Assez sombre, mais pas humide. J’ai dû marcher une heure dedans jusqu’à entendre le bruit de l’eau qui résonnait dans la cavité. J’ai sauté de ce trou sur un pont en bois. J’ai fait quelques pas alors que j’étais dans le noir complet, quand un fantôme ou quelque chose du genre apparu devant moi.
« Présentez-vous.
– Parce qu’en plus elle ne me reconnaît pas !
– Présentez-vous.
– Nova, gardien de l’horloge.
– Erroné.
– Elle est sérieuse ? dis-je alors que le Nhys que j’avais adopté sortait de mon sac pour le poser sur mon épaule.
– Identifié. Leo Kryssen. Accès autorisé à la cave.
– Merci l’ami. »
Il n’y avait plus aucune lumière, sauf mon compagnon sur mon épaule, comme une mini-torche pour me guider. J’ai suivi le pont, sur une bonne centaine de mètres, puis la lumière arriva, d’abord derrière moi, puis arrivant à mes pieds, dans l’eau. Elle finit par faire apparaitre une immense structure cubique, retenant une sphère d’énergie bleue, comme une étoile chaude en train de s’éteindre. « Content de te revoir » fis-je tendant ma main alors qu’il se repliait comme bague le long de mon index. « Plutôt classe non ? Oh ! Oui c’est vrai tu ne parles pas. » Une question m’est alors venu à l’esprit, comment sortir ? La réponse est venue d’elle-même lorsque la structure dans laquelle j’étais s’effondrait. J’ai voulu l’empêcher en figeant le temps, mais voyant que c’était la seule technique, j’ai préféré me laisser tomber. Lorsque j’ai heurté le sol, le flot chronologique qui tournait autour de moi s’est effacé, comme impossible. « Super ! fis-je en commençant à regarder autour. On est dans la merde l’ami. » Étrangement j’avais l’impression de parler dans le vide, mais je savais que le petit bonhomme que j’avais sur l’épaule me comprenait, même s’il n’avait pas la capacité de me répondre. J’ai ensuite suivi le couloir devant moi qui faisait un N et qui terminait sur un mur gélatineux qui ondulait lorsqu’on le touchait. Je me suis décidé à passer à travers, me retrouvant dans une autre partie du couloir. Celle-ci menait sur un T, à droite, un escalier qui redescendait là où j’étais tombé, à gauche, juste un coude qui menait à un second T.
« Dans le genre labyrinthe à te filler des maux de crâne, je crois qu’il est champion.
– Ce n’est qu’une épreuve, faite par ailleurs pour toi.
– Ouais c’est… Attends, tu te décides à parler ?
– Nous ne parlons pas en général, nous ne sommes que des images aux yeux de beaucoup de peuples. Les mots nous sont alors inutiles, me répondit mon ami sur l’épaule, par ailleurs, je te conseil à gauche.
– D’accord, répondis-je me mettant en marche, mais pourquoi ?
– Des portes de l’autre côté, la clé est de ce côté.
– Comment tu sais ça toi ?
– Des inscriptions sur le mur, je parviens à les lire.
– Merveilleux, tu vas bien m’aider l’ami. »
J’ai suivi son conseil, pris ce chemin pour récupérer la clé, puis j’ai fait demi-tour pour prendre l’autre chemin. Au bout je me suis retrouvé face à trois portes. La clé ouvrait les trois, alors j’ai pris celle en face de moi, ne sachant laquelle me laisserait avancer. J’ai traversé le petit couloir où elle menait, sortant par la porte que j’avais pris. J’ai alors changé de chemin, empruntant la porte qui se tenait à ma gauche la première fois que je suis arrivé, sortant aussi tôt par celle d’en face. « D’accord ! fis-je passant par celle de droite. Voilà ! » repris-je partant alors dans la suite du labyrinthe. Il commençait à changer d’apparence. Il devenait un labyrinthe fait de reliques, ressemblant à celles que j’utilisais pour mon golem. Les murs changeaient d’aspect lorsque je glissais mes doigts à leurs surfaces. J’ai encore fini dans un T, un mur noir à droite et un mur normal à gauche, avec une petite ouverture.
« Laisse-moi y aller, je dois pouvoir te sortir d’ici.
– T’est certain ?
– Sinon on trouvera un autre moyen.
– Comme tu voudras. »
Je me suis assis contre le mur, dans une forme de dépression. J’avais laissé une jeune fille seule dehors, sans savoir ce qui pouvait s’y trouver. La simple idée qu’il lui arrive quelque chose me martyrisais l’esprit. Et même si elle était exceptionnelle, j’avais quand même peur, peur de la perdre, peur de perdre Virginie, Nikki et Jessica. Peur de perdre la seule personne qui m’avait fait vivre, qui m’avais soutenu dans toutes mes actions, qui m’avaient donné ces idéaux, trop parfait pour le sombre être que j’étais. « Quand tu veux » me fit mon Nhys à travers ses pensées. J’ai longuement hésité, mon état voulait me pousser à rester ici, mais quelque chose au fond de moi m’a convaincu du contraire. J’ai donc passé le portail, menant de nouveau dans le fond de la grotte qui s’effondrait encore. Ma chute fut lourde, mais apparemment celle de quelqu’un d’autre fut pire encore.
« T’est vraiment obligé de tout casser ?
– Excuse-moi, ça s’est effondré tout seul.
– Je sens que quelque chose ne va pas Nova. Dit-moi, je t’écoute.
– Comment se porte ma princesse dehors ?
– Tu lui manque, mais elle va bien, j’ai envoyé deux de mes alliés, ils sont supposés lui faire peur pour l’aider à se réveiller. Et, ben elle a disparu !
– T’est sérieux ?
– Je vais m’en assurer. Va j’arrive. »
Cette nouvelle ne me rassurait pas du tout. Je croyais perdre la tête, devenir totalement fou, je me disais que s’il lui arrivait quelque chose je ne serais pas capable de lui pardonner son erreur. J’ai quand même voulu avancer, sans savoir ce qui m’attendait moi. Les énigmes étaient encore de retour, celle-ci voulais me faire tuer l’ombre de la peur. Je ne me doutais pas de ce que c’était jusqu’à ce que je le croise, un immense monstre se dressa derrière-moi et j’arrivais dans une impasse. Sans mes pouvoirs, une seule de ses frappes pouvait m’annihiler. Je me suis demandé combien de temps j’allais rester là, à attendre l’aide de quelqu’un et quelques secondes plus tard, le mastodonte devant moi s’arrêta, puis commença à s’effondrer, laissant apparaître une silhouette qui ne m’étais pas inconnue.
« Nova ! dit-elle sautant dans les bras.
– Si je m’attendais à te voir ici, merci, je te regarderais cette aide. Comment tu es arrivée ici ?
– Aucune idée, deux hommes ont commencé à me poursuivre et j’ai apparu derrière lui.
– Oh ! Princesse, on va sortir d’ici.
– Oui, mais comment ?
– On trouvera. »
On a continué, droit devant nous, suivant le chemin que mon petit ami lumineux nous ouvrait. Et même si cet accès essayait de tuer l’intrus qui était avec moi, il trouvait toujours le moyen de nous tenir hors de danger. Après la dernière porte il ne restait qu’une corniche, où une seule personne pouvait tenir.
« Nova !
– Je ne tomberai pas, les reliques me pousseront pour me retenir.
– Nova, le dernier fragment t’attend au fond, me fit le Nhys.
– Merde. Bon, désolé princesse, je reviens.
– Attends ! »
J’ai fait une chute de près de cent mètres, atterrissant lourdement, mais en récupérant mes pouvoirs. Une voix résonna dans le trou où j’avais atterri. « Bienvenue Sur Strivia » Strivia était un monde parallèle, mon monde parallèle. Celui de la chute de Nova. Une planète des damnés où personne ne ressortait. Certain choisissaient l’exil, d’autre y étaient envoyés de force. Je n’avais pas eu le choix, envoyé de force, mais cette fois-ci j’avais une chance de changer les choses.
« Par définition tu ne peux pas changer ça. Une fois que tu es sur Strivia, tu ne peux pas t’échapper.
– Pense à ça l’ami. Lorsque je suis revenu, je n’étais pas mort, j’avais encore quelque chose en moi qui me tenait en vie. Personne ne pouvait le voir, mais moi je le savais. Je l’ai senti. Je me suis vu ici, quelque chose avait changé entre le moment où j’étais mort et celui où je me suis réveillé.
– Donc tu veux conserver ton futur.
– Exact. J’y compte bien. »
J’ai beaucoup appris sur la manière dont le monde qui m’entourait fonctionnait. Mon but était de confirmer le présent que j’avais et de récupérer la dernière pièce de mon arme. Je suis alors retourné dans le chanteau qui m’avait couté la vie, arrivant dans la salle du trône. La dernière pièce m’attendait sur un présentoir devant le siège. La voix du début était revenue, disant « Transfer linéaire en cours ». Je me suis retrouvé quelques secondes plus tard dans l’état où j’étais juste avant ma mort, mon costume presque totalement déchiré et face à une sorte de cerbère double face.
« Oh ! Merde. Ils n’auraient pas pu trouver plus facile comme défi.
– Ils auraient dû, je le conçois.
– Bon, on va essayer de lui faire sa fête. »
Je suis resté quelques minutes contre lui, jusqu’au moment où j’ai réussi à l’esquiver en passant sous ses pattes. Je me trouvais alors à une dizaine de mètres lorsque j’ai remarqué que l’objet métallique qui avait pris possession de mon doigt lâchait des petites particules violettes. À ce moment, j’ai figé mon assaillant le temps de me laisser le temps de l’observer puis j’ai agité ma main, réduisant mon assaillant à néant.
« Merde, j’avais oublié que c’était si puissant.
– OUVREZ ! OUVREZ !
– Merde, la garde royale. Oh ! Je sais. Ça va être drôle. »
J’ai eu une idée lumineuse. Je me suis découpé en deux, posant un double temporel de moi, plus jeune, à l’époque normale. Je l’ai laissé face à l’armée et j’en ai profité pour retourner avec Alix. La voix était encore de retour « Evasion de Strivia dans, cinq, quatre, trois, deux, un… » J’ai émergé de l’ombre, ameutant toutes les reliques nécessaires pour refermer le précipice.
« Whoa ! fit Sully atterrissant au sol. Merde, tu pourrais prévenir quand même.
– On s’en va. Dépêche-toi Sulivan, je ne vais pas t’attendre.
– Tu pourrais me dire merci, je t’ai retrouvée une personne qui t’appartient.
– Sia ne m’appartient pas, c’est la femme de Sieg, pas la mienne. »
Quelque chose venait de changer. Aussi bien en moi que sur moi. Je ne disais plus rien, comme si le Nova fou et dérangé avait disparu. Mais il était toujours là, ce changement était dû à autre chose. Depuis mon retour, j’avais une nouvelle voix qui m’assaillait la tête. Elle répétait constamment « Raise Me Up ! ».
« Qu’est-ce qu’il lui arrive ?
– Je crois qu’il a croisé ce qu’il voulait éviter, ce qui lui faisait tant peur. Maintenant ça le ronge.
– Ça me fait peur.
– Nova, tu comptes rester longtemps devant ce mur ou tu veux trouver un moyen de passer ?
– Désolé l’ami, me fit le Nhys se posant sur mon épaule, je ne peux pas te mener plus loin. »
Je n’ai pas cherché de moyen de sortir, juste, j’en ai forcé une en explosant tout ce qui se trouvait devant moi. J’ai alors isolé les deux qui me suivaient dans une bulle et me suis envolé avec eux, vers la Tour. En moins d’une minute j’avais rejoint Sieg dans son labo.
« Cinq minutes c’est ça ?
– S’il te faut plus je te l’offrirais.
– Non, juste un moyen de le démarrer, dit-il me posant mon nouveau cœur de Técéros Blanc.
– Je devrais pouvoir le faire, répondis-je en y envoyant une décharge électrique.
– Voilà, de nouveau sur vitaminé. Adam ? »
J’avais déjà disparu, parti sur mon point fétiche, l’endroit où j’étais pour penser. Des tas de choses me traversait la tête, mais c’était ce qui se passait en dessous qui m’intéressait. Alix, Chester et Sieg étaient en train de discuter, de moi en l’occurrence.
« Il ne descendra pas ? demanda-t-elle.
– Aucune chance. Il faut le laisser se libérer l’esprit, répondit Chester.
– Qu’est-ce qui le tracasse tant que ça ?
– Ce qu’il a fait, ce qu’il est. Personnellement j’ai peur de voir apparaitre un côté sombre dans sa personnalité, fit Sieg.
– Comment ça, voir apparaître ?
– C’est un ange, un guerrier en puissance.
– Il est avant tout maléfique, répondit Chester.
– Quoi ?
– C’est lui le plus démoniaque de nous deux, pas moi. Il a toujours tout fait pour le renier, mais souvent notre nature nous dépasse.
– Pourtant il est génial, gentil, attentionné. Même s’il est dérangé, moi je l’adore… D’accord.
– D’accord quoi ? reprit Sieg.
– J’accepte la fusion. Si je peux le voir revenir comme je l’ai vu là-bas, j’accepte.
– Après vous !
– Allez-y, je vais aller le voir, dit Chester. »
Mon esprit s’embrouillait. Ce qui me tracassait relevait du passé, mais c’était tout de même quelque chose que je regrettais.
« Chester, que me vaut cet honneur ?
– Celui qui me pousse à venir te voir. Raconte-moi. Je sais que cette fois-ci ce n’est plus Nikki.
– L’exil.
– Oh ! Je ne m’attendais pas à cette période.
– J’ai revu ce que j’ai fait et maintenant…
– Est-ce que tu crois que c’est changeable ?
– Pas de point fixe, pas d’incident brutal.
– Alors ? Pourquoi on ne le ferait pas ?
– Il me faudra encore du temps pour paramétrer la fusion, va si tu en a envie, me fit Sieg.
– D’accord. Chaz ?
– Parti ! »
L’exil, chronologiquement il se passait juste avant que j’ai fait cacher le Trésor des Ages. Pourquoi ? J’ai détruit tout un peuple. Je n’ai jamais su quel peuple c’était. À cette époque j’étais possédé par l’arme, j’ai anéantis la planète et leurs habitants. Alors cette fois-ci je suis arrivé, exactement au même moment, mais avec Chester. J’ai alors regardé ma main, mon bijou scintillait en violet, puis il s’est éteint, d’un coup.
« C’est déjà ça de fait.
– Qu’est-ce que tu dirais d’aller rendre visite au roi ?
– Qu’est-ce qui te dit qu’il y a un roi ?
– Le château devant là-bas.
– AH ! Désolé, je n’avais pas vu. »
On est parti vers le manoir, résidence du chef de la planète. Ils nous ont laissés entrer, comme si quelqu’un nous y attendait. On s’est alors rendu dans salle du trône, lieu de la représentation du pouvoir du résidant.
« Ah ! Leo Kryssen, c’est ça ? Je vous attendais.
– Et pourquoi ça ?
– Je me présente, Liron Monteiro…
– Quoi ? Monteiro ?
– Oui, mon nom vous choque-t-il ?
– Vous êtes Aldorien, c’est ça ? demanda Chester.
– Oui, mais, comment vous le savez ?
– C’est une longue histoire. Vous avez du temps, pour que l’on discute ?
– Bien sûr. Lily, est-ce que tu peux demander au chef qu’il nous prépare la table ?
– Comme tu voudras. »
On s’est installé autour d’un repas, à la table royale. Un festin de roi, mais j’avais une autre idée en tête. Me renseigner sur ce qui était en train de se passer.
« Je commence, si vous me permettez.
– Allez-y.
– Comment vous saviez que j’allais venir ?
– Ma femme, elle est voyante. Elle est humaine et est arrivé sur cette planète, envoyé par un démon.
– Lojin, c’est ça ?
– Comment vous savez ça ? me demanda-t-elle.
– On va dire que je voyage beaucoup. Votre mère s’appelle Tara ?
– Oui, vous me faites peur.
– Ne vous en fait pas, c’est une vieille amie à moi. Je commence à comprendre même si quelque chose m’échappe encore. On y viendra plus tard. Vous avez déjà eu une femme avant Lily ?
– Tu peux nous excuser ? demanda Liron. Où voulez-vous en venir ?
– Nikki et Ariel, ce sont vos deux filles ? Exact ?
– Oui, mais, leur mère est morte, je les ai perdu depuis des années, je…
– C’est vrai, elle est décédée deux ans après mon départ. Mais elles ne sont pas mortes, elles sont avec moi.
– Vraiment ?
– Vraiment. Mais avant que je n’aille plus loin, j’ai tout de même un problème. Vous avez eu une fille avec Lily ?
– Non, enfin…
– Lojin, il joue avec le temps, elle aura seize ans en 2014.
– Oh, c’est…
– Étrange ? Le temps apporte beaucoup de choses. Trop même. Je vais maintenant plus loin. Je vous donne rendez-vous, si vous le voulez bien, le mercredi 22 janvier 2014, sur Terre, sur La Tour des Anges. Choisissez l’heure dans l’après-midi, vous pourrez revoir vos filles.
– Les trois ?
– Ah ouais, c’est vrai que c’est plus compliqué ça. Pour faire simple. Je vous ai un peu menti en disant que vos filles sont vivantes. Concrètement elles sont toutes mortes, mais moi aussi.
– Comment ça ?
– Calmez-vous. Moi comme elles sommes revenus grâce à des corps capacitaires, capables de porter nos âmes. Si pour moi c’était simple, Ariel aussi, pour Nikki c’est légèrement différent.
– Je vous écoute.
– Toujours en forme raccourcie, Nikki n’est pas revenu dans un seul corps, mais dans deux. Le premier est une humaine, comme moi. Le second est celui de votre seconde fille, Alix.
– Alors, comment je vais les retrouver ?
– Nikki sera complète, si tout se passe bien, Alix étant une forme assez étrangement parallèle à celle du premier hôte de Nikki, elle se retrouvera fusionnée avec.
– Fusionné.
– Croyez-moi, les deux sont extrêmement proches.
– Par définition les élus sont choisis par affinité, fit Chester, tel que l’hôte à une ressemblance déjà très proche de celui qu’il porte. De plus, si l’on admet qu’il y ai deux hôtes, c’est que le second est du même sang que l’âme Aldorienne, mais aussi, par respect des conventions, que ce deuxième soit une copie presque parfaite du premier, au physique près.
– Euh…
– Chester, mon frère. Vous pouvez lui faire autant confiance qu’à moi.
– 22 janvier alors ?
– Si vous me faites cet honneur.
– Avec plaisir.
– Alors à bientôt.
– De même. »
Nous sommes donc sortis du château, puis lorsque l’on avait dépassé la porte, descendant les escaliers, quelque chose vint se heurter à moi. Comme un souffle venu d’ailleurs, comme si mon passé venait de me rattraper.
« Cette fois-ci t’a changé ton passé, peut-être ton futur aussi.
– Chaz.
– Je te remercie de me remercier !
– Arrête de faire le con, on a un invité qui nous attend.
– C’est parti. »
Quinze heures, j’étais dans le labo de Sieg, à côté de Virginie. Son teint était devenu blanc. Lorsque je lui ai pris ses mains, cette voix est revenue « Raise Me Up » comme si c’était elle qui me jetait cet appel.
« Tout le monde est prêt ?
– Sieg, t’est toujours certain de ce que tu fais ?
– Tu me fais confiance non ?
– Bien sûr.
– Alors oui ! Toujours.
– Alors fait, prend ton temps. Moi je vais voir Ariel.
– Comment elle va ?
– Viens avec moi, lui répondis-je en la menant dehors.
– Non, s’il te plait, ne me dit pas qu’elle est déjà partie ?
– Si c’était le cas je ne serais plus là.
– Comment ça ?
– Je serais déjà dans la salle tronche d’Akziel. Rassure-toi, elle va bien. C’est autre chose dont je voulais te parler.
– De la fille qui t’a donné ton nouveau bracelet ? »
Je ne savais depuis quand il était là, pas depuis mon retour d’Irlande en tout cas. C’était une chaine, qui faisait trois tours en se croisant. Il y avait d’attaché un médaillon avec le logo de la citadelle. Un second était une sorte de porte photo, avec un portait de ma mère dedans. Le troisième était une petite cage, en métal gris foncé.
« De qui ça peut venir ça ?
– Tu ne le sais pas ?
– Je l’ai depuis que je suis revenu de mon petit voyage avec Chaz… Pertinente comme question. Bref, j’ai quelque chose d’autre. Une surprise pour toi et Nikki, je n’ai pas le droit de te dire qui c’est puisque c’est une surprise.
– Je crois que Nova déteint sur toi ?
– Tu crois, un peu peut-être ouais. Ce que je peux te dire c’est que c’est un invité.
– Qui ? Dit-moi !
– Non, tu le sauras lorsqu’il viendra, s’il n’est pas déjà là.
– Tu n’es pas drôle !
– Je sais oui. Va, je veux m’assurer que tout ce passe bien. »
Sieg avait ressorti une vieille machine bien connue. Celle que j’avais utilisée pour me débarrasser de la différenciation entre moi et Adam, ou entre Adam et Adam, bref. Et celle que j’avais utilisée pour prendre Nova. Cette fois-ci il y avait trois cuves et le liquide qu’elles contenaient devait « dissoudre les deux personnes pour les reformer ». La fusion devait durer environ deux heures.
« Tu es certaine de vouloir le faire ?
– Certaine. Je commence à comprendre pourquoi tu l’aime autant.
– Tu sais que tu vas revenir ?
– Oui, mais même si ça ne se fait pas. Je t’adore Adam. Ne change jamais. Quand vous voulez. »
Pendant le transfert, Sieg m’avais apporté quelques modifications, comme un système de diffusion de musique avec deux oreillettes minuscules et un anti bruit équipé. Je me suis aussi questionné sur le bracelet qui m’était arrivé au poignet. Si j’arrivais à comprendre la signification de la photo d’Eva, j’avais du mal avec la cage et pourquoi le troisième était mon logo. C’était comme si il venait de quelqu’un à qui je portais une attention, ou qui me portait cette attention. Mais qui ?
Mis à part ce détail, je profitais du temps de fusion pour me concentrer sur la suite des opérations. Il ne restait plus beaucoup de tours, cinq pour être précis. Du moins cinq que l’armée ne pouvait pas tomber. La plus part des autres étaient tombées et je m’intéressais à celles du Japon et de l’Australie. Pourquoi celles-là ? Je ne savais pas trop. Une sorte d’instinct qui me disait de choisir celles-ci. Celle de l’Australie serait la première, parce que c’était celle où j’aurais besoin de Hwoarang.
Seize heures et demie, Sieg me rappelait de mon présentoir d’où je m’étais mis à observer les habitants, calme et détendu. Beaucoup avaient l’esprit préoccupé par ma personne, mais toujours en bien. Ça me donnait chaud au cœur, une sorte de satisfaction du travail que je faisais chaque jour pour eux. J’étais alors descendu sur le grand plateau, un peu à distance de l’entrée du labo, attendant ce qui devait arriver, à connaitre les personnes qui allaient m’approcher. J’avais changé d’apparence, Leo était celui qui supporterait l’assaut.
Elle est sortie de l’ombre, s’est violemment jetée sur moi. La première chose qui m’a marqué c’est sa voix, légèrement plus douce et cristalline. Sa taille n’avais pas été affectée, au final sa morphologie était la même, au milli détail près. C’est son visage qui avait été touché, les traits plus fins, les lèvres aussi, des yeux toujours marron, mais devenus bleu autour de la pupille, il s’étalait avec une sorte de tornade sur le reste de l’iris. Ses cheveux étaient toujours châtains, mais avec des mèches blondes, celles qu’avait Alix. Elle me serait dans ses bras et au même moment j’ai senti quelqu’un se posait derrière-moi.
« J’ai un cadeau pour toi princesse.
– Vraiment ? Dit-moi, je ne veux pas attendre !
– Regarde. »
Je me suis décalé, la laissant en face de son père. Je l’ai vu changer d’apparence pour retrouver celle de Nikki et verser une larme lorsqu’elle est partie vers elle. Ariel est sortie du labo quelque secondes plus tard avec Sieg, mais n’exprimait pas sa joie en se jetant sur l’autre.
« Leo !
– Désolé Sieg, je l’avais tué. Je n’ai fait que l’épargner.
– T’est sérieux là ? demanda-t-il d’un air étonné.
– Tu te souviens de l’exil. J’ai explosé une planète à cause de ce j’ai au doigt. Il en était le roi. Chester m’a conseillé de changer cette période que j’avais revu après la sortie de Strivia. Je l’ai fait et lui ai donné rendez-vous aujourd’hui.
– Pourquoi est-ce que je te reconnais bien là-dedans ?
– À penser aux autres avant moi ? Je sais, je devrais penser à moi certaines fois.
– Non, quand tu penses à ça, tu te prends la tête avec ton passé.
– Hey, tu n’as pas tort l’ami. Préfère rester là alors. »
Je suis resté sur le plateau, toujours à regarder comment les autres vivaient. Je n’ai pas prêté attention à ce qui se passait entre les membres de la famille en dessous. Concentré sur ce que pensais les autres.
Peu après vingt-et-une heures, alors qu’on finissait de manger, je suis ressorti pour prendre l’air. Liron est venu me voir.
« Toi aussi tu as plusieurs apparences ?
– C’est les aléas d’utiliser un hôte. Tous n’ont pas les mêmes capacités.
– J’ai deux petites questions pour toi.
– Je t’écoute.
– La première c’est qu’est-ce que je peux faire pour toi ?
– Rester en sécurité. Je sais ce que c’est de perdre ses parents, je n’ai que mon père et encore je ne sais pas où il est.
– Tu veux que je reste ici ?
– Sur votre planète ou dans la citadelle qui brille derrière nous.
– Anathema. Mes respects.
– Quand même pas. J’ai juste eu de la chance. La seconde ?
– La seconde quoi ? demanda Virginie qui venait nous rejoindre.
– La seconde question. C’est moi où un des bijoux qu’elle porte m’échappe ?
– Presque, répondis-je me tournant vers elle et me mettant à genoux.
– Adam…
– Ça faisait des années que je voulais le faire, et c’est dire si c’est longtemps. J’ai une question, même si j’imagine la réponse. Cet anneau je te l’ai donné lorsque j’étais dans le monde d’Ezira, alors que tu étais encore dans le coma. Est-ce que ma princesse veut bien m’accepter comme mari ?
– Bien sûr ! »