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Partie 5 : Comme l’espoir sans Esclave
Souvent on fait des rencontres non fortuites, on rencontre des personnes que nous n’aurions jamais imaginé rencontrer. Pourtant ce sont souvent ces personnes que l’on garde le plus près de nous, parce que l’on s’attache à elles. Pourquoi ? Parce qu’elles ont toujours quelque chose de spécial.
Lundi 5 janvier 2015.
J’avais tout préparé pour aller chercher Emeline. J’avais l’espoir qu’elle puisse m’aider à retrouver l’Éternelle, puisque cette dernière est elle aussi partie la chercher.
« Tu t’en vas seul ? demanda Sully.
– Je ne pense pas avoir besoin de quelqu’un d’autre. Puis je n’ai pas envie de mettre en danger ni ta personne ni ta copine.
– Je veux venir avec toi ! me fit Nadia qui arriva aussi tôt.
– Je ne suis pas sûr que ce soir la bonne chose à faire.
– Tu penses que je vais te faire chier plus que je ne t’aiderai c’est ça ?
– Ne je n’ai surtout pas envie de perdre encore d’autres personnes, mes frères et ma femme me suffisent amplement.
– Oh, je. Je ne savais pas.
– Vas-y Leo, je resterai avec elle. »
J’ai traversé la porte et je me suis demandé si je faisais bien, certes je faisais ça pour la protéger, mais est-ce que je faisais bien ? J’ai tellement hésité que je suis revenu et leur ai dit de venir avec moi. J’avais tout de même un doute sur mon choix, je me suis demandé le long du trajet si je n’allais pas encore perdre d’autres personnes. Je me souviens comme ma rage m’a emporté à la mort de Lynn alors que je ne la connaissais presque pas.
Une tour, encore une et encore Barabas. Ce salaud l’avait réanimé. Je n’avais qu’une seule envie c’est de le tuer à nouveau.
« J’en ai marre de ces tours.
– Et moi donc Sully, lui répondis-je.
– Pourquoi ça ? demanda Nadia.
– Avant que tout cela n’arrive, Akziel avait placé des centaines de tours sur toute la planète. Chacune avec des démons différents. Avec Sully, on en a tombé la moitié, ces choses me rendent fou.
– Je compatis tellement, répondit Sully.
– Partez tous les deux, je vais faire mon chemin tout seul, pour l’instant.
– Comme tu voudras. »
Emeline était la seule personne à qui je pouvais encore me raccrocher, si elle était encore vivante. Tout avait disparu chez moi, mon espoir, ma foi, mon humanité et mon envie de me battre. Comme si la seule qui arrivait à me tenir dans ce monde était Alix. J’avais tout fait pour la protéger, pourtant. Je l’ai vu tomber, je l’ai vu mourir. Comment je pourrai encore avoir envie de me battre alors que tous ceux qui m’ont aidé sont partis ?
Cette tour ressemblait à toutes celles que j’avais déjà faites, des escaliers, des étages, encore des escaliers. J’en avais marre, j’avais beau me battre contre des ennemis, je n’y trouvais plus aucun intérêt. Même si quelque chose me poussait encore et toujours à avancer. Au bout de cinq ou six étages, j’ai rencontré une salle vide ou presque. Il y a longtemps, Leo avait affronté un puissant archer, jamais il ne ratait sa cible. Il était le mentor de Nikki et lui avait appris sa précision. Akziel l’avait ramené, du mauvais côté.
« Alors comme ça on se bat encore ? me dit-il.
– Quel espèce d’enfoiré !
– Qu’y a-t-il ? Ça te déplait de me voir contre toi ?
– Tu sais que je n’ai rien contre toi.
– Mais on m’a redonné la vie, ce n’est pas pour qu’elle ne me serve à rien.
– Sirus, à quoi ça te servirait de m’abattre ?
– Tu n’avais pas à toucher à ma fille ! »
Il décocha sa flèche, et malgré toute mes tentatives pour l’esquiver, elle vint se planter dans le cristal de mon cœur. Instantanément, tout s’est troublé, les couleurs ont disparu de ma vision.
« J’attendrai que tu viennes chercher ta précieuse vengeance, j’ai quelqu’un à qui tu tiens, je crois.
– Je…
– Pauvre chou, au plaisir de te revoir en vie ! »
Les douleurs commençaient à apparaitre. Mon cristal n’était pas explosé, juste brisé et sa puissance était affaiblie. J’ai mis tous mes efforts pour monter encore un étage et tomber sur des bancs. J’ai pu m’y installer quelques instants.
Les migraines revenaient et les vomissements aussi. Je sentais la vie me lâcher doucement. À quoi pense-t-on lorsqu’on s’aperçoit que c’est la fin, que la vie nous abandonne ? Seuls mes regrets résonnaient dans ma tête, encore et toujours. Mais ils n’ont pas duré très longtemps quelques minutes plus tard, je finissais par perdre connaissance. Je ne sais combien de temps j’ai passé loin de tout, quelques minutes, quelques heures, quelques jours. Une voix familière réussit à me faire ouvrir les yeux, difficilement.
« Qui ?
– Doucement, ne te force pas, me dit-elle.
– Je ne peux pas…
– Viens, je connais quelqu’un qui pourra t’aider. »
J’étais à peine conscient de ce qui m’arrivait. Une femme vint m’aider à me déplacer, je ne sais où dans la tour pour m’allonger. Elle parlait avec un homme à la voix rauque, puissante.
« Oh, il est mal en point le pauvre, fit la voix masculine.
– Arrête et aide-le !
– Oui, une minute.
– Je ne pense pas qu’il ait une minute.
– Il a tout le temps de l’univers. Une minute ou dix ça ne changera rien, crois-moi.
– Son cœur, le cristal est brisé, tu penses pouvoir le réparer ?
– Non.
– Mais…
– On va le changer, une étoile de Técéros et il va revivre le gamin.
– Alors fait vite !
– Je t’ai déjà dit qu’il avait tout le temps de l’univers, calme-toi chérie. »
Quelque temps plus tard, j’étais déjà reparti, encore dans mes rêves. Je n’avais pas forcément conscience que j’étais sauvé, pas encore. Je revisitais l’époque du futur, tout ce qu’il m’était arrivé, Barabas, Nikki, mes augmentations.
Mon réveil se fit en sursaut, comme si je venais brutalement de retrouver la vie. En face de moi se tenait un homme de dos, en train de bricoler. Quelques secondes suivant mon réveil, quelqu’un vint me serrer dans ses bras.
« Adam !
– Emeline ? Qu’est-ce que ? demandais-je troublé.
– Calme-toi, tout va bien, me dit-elle.
– Qu’est-ce qu’il m’est arrivé ?
– Sirus t’a brisé ton cristal de Técéros et Rein l’a changé.
– Rein…
– Enchanté, Reinhardt, fit l’homme qui bricolait.
– Zwein ?
– T’as vu ? Il m’a offert son corps, ce n’est pas génial ?
– Je, trop vite…
– Prends ton temps Adam, tout va bien, reprit Emeline.
– C’est toi qui m’as ramassé à moitié mort, n’est-ce pas ? demandais-je à Emeline.
– Oui, c’est moi.
– Et mon cœur ?
– C’est une étoile de Técéros, quelque peu plus luisante et plus puissante. Incassable cependant.
– D’où le réveil en sursaut, mes systèmes de régénérations ont dû surcharger.
– Qu’est-ce tu viens faire ici ? demanda Reinhardt.
– Sauver ta fille Rein.
– Oh, mais je suis arrivé avant !
– Mais tu t’es coincé comme un con, dis-je me relevant et partant vers mes affaires.
– Qu’est-ce que tu cherches ? demanda Emeline
– Mes cigarettes, répondis-je les sortants et en allumant une.
– Tu ne devrais pas fumer.
– Je t’en pose des questions ? Je ne sais pas ce que t’a fait Rein, mais t’as bien fait. »
La fumée revenait doucement autour de mes mains, mes pouvoirs revenaient, même sans Leo. C’était déjà un bon début.
« Tu es venu seul ? demanda-t-elle.
– Si j’étais seul ? me demandais-je dans le flou de mes souvenirs.
– À part tes multiples facettes délurées pauvre idiot.
– J’ai Sully et sa copine quelque part.
– Intéressant, répliqua Reinhardt.
– Il faut que j’aille les rejoindre.
– Dans ton état ? Tu es fou ? Jamais ! répondit Emeline »
Elle se mit devant moi, comme si elle voulait m’empêcher d’avancer. J’étais plus grand qu’elle, plus imposant par la fumée qui grandissait autour de moi. Elle finit par s’écarter et me laisser passer, mais me fit « Je viens avec toi ! » juste avant que je ne passe la porte.
« Et je vais passer mon temps à te protéger, je n’ai pas que ça à faire, fis-je.
– Et pourquoi pas ? Tu as bien retrouvé tes pouvoirs.
– Ce ne sont pas mes pouvoirs le problème, j’en ai assez de perdre tous ceux que je dois protéger ! »
J’ai passé la porte, je n’avais qu’une envie c’est retrouver Sully et Nadia. Je n’avais pas la moindre idée d’où ils pouvaient être ni où j’étais, alors j’ai avancé. Ma fumée restait derrière moi, quelques secondes après mon passage. J’avais du mal à la maitriser, l’énergie que déployait mon cœur était peut-être un peu trop puissante pour ce dont j’avais l’habitude. Je suis tombé sur une salle avec des fenêtres. Je m’en suis approché pour observer l’état du ciel, toujours aussi sombre.
« Jamais tu n’arrêteras d’observer le ciel.
– Jamais tu n’arrêteras de prendre l’apparence des autres, répliquais-je. »
Il disparut aussi tôt. Quel lâche ! J’ai continué mon ascension tranquillement, supprimant un a un ceux qui se trouvaient en travers de mon chemin, je maitrisais de plus en plus la puissance de mon nouveau cœur, ma fumée s’était calmée et n’envahissait plus les lieux derrière moi. J’ai fait quelques mètres de plus, suivant la voix claire d’une femme, effrayée. Elle se dirigeait vers moi, une fois à quelques mètres de mes pieds, je l’ai attrapée pour la protéger dans une petite pièce à côté. La fumée cachait tout ce qui pouvait apparaitre de nous. J’ai laissé l’assaillant avancer, doucement le long du couloir.
« Aiden… fit Nadia.
– Un rôdeur, il a vraiment réanimé toutes les saloperies du monde.
– Et moi je…
– Chut. »
Il était sensible aux bruits et nous avait entendus. Il se retourna vers nous, sans nous apercevoir.
« Plutôt rêver que tu touches à elle ! dis-je lui plantant Arbiter dans le crâne.
– Pourquoi, cette fumée…
– Mes pouvoirs, répondis-je aspirant toute la fumée, qu’est-ce que tu viens faire ici ? Tu ne devrais pas être avec Sully ?
– Et tu ne devrais pas avoir tes pouvoirs.
– Oh, ouais, difficile à expliquer, répondis-je en partant.
– Où est-ce que tu vas ?
– Reinhardt, Emeline, l’Éternelle, Barabas. Je ne sais plus lequel je dois trouver en premier pour supprimer lequel. Sirus aussi. Je perds mon envie de me battre. J’ai juste envie de tout lâcher.
– Et laisser le monde comme ça ?
– J’en suis la cause, je ne sais pas si je serai capable de le changer.
– Je sais qu’il n’y a plus d’espoir dans ton cœur, mais moi j’y crois, me dit-elle avec le sourire. »
J’ai essayé d’entrer en contact avec Sully, en vain. J’aurais voulu qu’il recherche les signes de l’Éternelle, elle est passée par ici, je le sentais, et elle y était peut-être encore. Toujours plus loin, toujours plus haut. Mon but était de faire réagir Barabas et le faire sortir, alors je m’étais mis en quête de Sirus, pour lui régler son compte. J’avais quelque peu perdu la notion du temps dans cette tour, comme dans toutes les autres, mais la journée n’était pas encore passée, Kat me l’aurait rappelé.
Trois étages plus haut se tenait un homme dos à la fenêtre, un arc à la main. Il m’attendait, je le savais.
« Je n’ai jamais touché à ta fille Sirus, c’est Nikki qui l’a tué.
– Alors tu payeras pour elle ! »
Il se retourna violemment pour décocher sa flèche sur Nadia, mais mes réflexes étaient plus puissants que sa visée, je l’ai stoppée à un centimètre de son visage. « Tu veux jouer à ça », répliquais-je en déployant mon arc chronographique. Le temps avait ralenti au moment où je visais. Puis il s’est violemment accéléré, lorsque j’ai décoché à mon tour. Sa flèche toucha le cœur et il s’écroula à genoux avant de s’effondrer.
« Les rôdeurs sont au-dessus Aiden, fit Nadia.
– Alors va, je te suis.
– Mais…
– Ils sont sensibles au son. Tu as largement les capacités de les supprimer.
– Je vais essayer. »
Elle s’en alla vers l’escalier et je me suis dirigé vers la fenêtre. Le soleil se couchait, j’avais toujours l’impression qu’il y avait quelqu’un derrière moi, pas Leo, une force plus puissante. Je prêtais attention à ce qu’il se passait au-dessus, tout avait l’air de se dérouler comme prévu, sauf quand Sully a traversé les murs pour finir à côté de moi.
« Sully, fis-je avec un signe de la main.
– Je n’aurais jamais cru qu’il ferait aussi mal.
– Qui as-tu croisé ?
– Barabas.
– Oh, il se montre enfin, fis-je.
– Il a repris la fille que tu cherches.
– Quoi ?
– J’ai croisé son père énervé.
– Va chercher Nadia à l’étage je retrouve Reinhardt et on va lui casser la gueule. »
J’ai rejoint L’Onyx pour qu’il me guide à Barabas, qui avait fui encore une fois. Reinhardt était animé par la rage, personne ne doit toucher à sa fille. Nous avons gravi les derniers étages de la tour pour retrouver le même écran que lors de mon premier combat et il s’y cachait derrière.
« Ah, enfin, je tiens ma revanche.
– Laisse-moi rire, répondis-je.
– Tu n’as plus Toshiie, tu es vulnérable.
– Mais pas moins puissant. Sors de là, qu’on règle ça en face.
– Rends-moi ma fille ! s’exclama Reinhardt.
– Oh, mais c’est qu’il serait énervé le monsieur, reprit Barabas.
– Sors ou je te promets de tout éradiquer pour te faire sortir !
– Ne t’énerve pas, c’est tout ce qu’il cherche, répliquais-je.
– Bien, il commence à me connaitre.
– J’en ai marre, sors d’ici, arrête de faire ton lâche tu sais comment ce combat va finir.
– N’en sois pas si certain. »
Son écran finit par m’attaquer, un gigantesque poing se dirigea vers moi. Je l’ai stoppé en un coup, sans même bouger, ma fumée revenant autour de moi.
« Pourquoi ?
– Je te l’ai déjà dit, je ne suis pas Leo Kryssen, tu prends en compte ses pouvoirs, pas les miens. Et comme à chaque fois tu te fais détruire à cause de ça ! »
J’ai tiré sur son bras, pour faire sortir Barabas de son antre, encore une fois. Sully arrivait à ce moment-là avec Nadia. Quelque chose m’emporta loin d’ici, dans une autre zone. Tout y était calme, ou presque, j’entendais le flot de la rivière à côté de moi et le chant des oiseaux. J’ai ouvert les yeux pour me retrouver dans un endroit noir, ou j’avais perdu la vue. Je me suis mis à avancer, essayer de trouver quelque chose. Je m’approchais de la voix qui avait bercé mon arrivée, apparaissant et disparaissant quelques secondes plus tard. Quelques mètres plus tard, Alix apparut devant moi, toujours aussi radieuse. Elle avait le sourire et me tendait les bras.
« Non.
– Qu’y a-t-il ? demanda-t-elle.
– Plus Jamais ! »
Ma main l’effaça en un coup de vent. Je savais qu’elle n’était pas réelle, pourtant je savais que ce n’était pas une vision ou quelque chose du genre, le manipulateur d’esprit que j’avais croisé tout à l’heure devait être revenu, pourtant j’avais ma part de lucidité dans sa folie.
Puis il se décida à me sortir de son monde, en souffrance. J’étais à genoux, la tête entre les mains, personne ne pouvait s’approcher de moi.
« Tu as perdu le jour où tu m’as abandonnée.
– Je ne l’ai jamais abandonné ! m’exclamais-je.
– Ce n’est pas ce que ton cœur me dit.
– Mon cœur finira par te briser.
– Et tu en viens à attaquer tes propres alliés, tu es tombé bien bas.
– N’essaie pas de me faire croire que tu es Alix, tes pauvres tours ne servent à rien contre moi.
– Tu tomberas comme tous les autres…
– JAMAIS ! »
La fumée m’envahissait à nouveau, plus il forçait sur mon esprit, plus il me rendait puissant. Ma force et ma volonté, on réussit à briser en partie son lien psychique, pour me transporter encore ailleurs, seul avec Barabas.
« Tu te souviens de ça n’est-ce pas ? L’épreuve de force ? Le jour où tu as été envoyé sur la Terre pour stopper Akziel, fit Barabas.
– Ne te laisse pas abattre, tu peux la réussir.
– Le gardien d’Edel, achève-le, et je t’offrirai ma vie.
– Écoute-moi, n’écoute que ma voix Adam, pour une fois, me disait la voix d’Alix.
– Laisse ton cœur te porter, ta voix te transporter, ton cœur fait des miracles, je reste avec toi, dit-il apparaissant devant moi, toujours. »
J’écoutais mon cœur, et j’écoutais la voix d’Emeline se perdre dans ma tête, encore une fois. Si mélodieuse, si harmonieuse.
« It’s hard to be what you need through a static screen.
Been trying to speak for weeks and weeks.
Open my mouth,
All that comes out is white noise and incomprehensible sounds,
And all you ever do is turn me down.
I’m watching.
I’m waiting.
I’m aching.
Suffocating.
I’m breathing.
I’m speaking.
Can you hear me?
I’m screaming for you.
Day by day,
I’m slowly replaced in your picture frames.
A brand-new face on your pillowcase.
Come the night you dim the lights and close the blinds,
But I still see them running down your spine,
Cause I illuminate the room,
Just enough to watch you.
I’m watching.
I’m waiting.
I’m aching.
Suffocating.
I’m breathing.
I’m speaking.
Can you hear me?
I’m screaming for you.
Sick of the lack of signal.
Sick of the lack of touch.
Sick of the static voice.
It’s not enough, it’s not enough.
Baby it’s hard to be just what you need when all I speak is static screams.
Can you hear me? »
Le gardien était le meilleur guerrier de la planète. Si on réussissait à le battre, on échappait à l’armée. Si on se faisait battre, on finissait dans les rangs des fantassins de première ligne. Son nom, Argheon, le guerrier aux trois visages.
« Tu te sens prêt à échapper à ton destin ?
– J’ai déjà failli une fois, je ne tomberai pas deux, fis-je.
– Je vais te renvoyer d’où tu viens avorton.
– Alors, avance, si tu te prétends meilleur guerrier d’Aldor. »
Il pouvait se téléporter, tout comme moi. Il m’attaqua de front, mais j’ai réussi à bloquer son arme avec le chronosceptre et le renvoyer.
« Frappe plus fort, je n’ai rien senti, dis-je.
– Très bien, si tu veux jouer au plus malin. »
Il se lança contre moi de tous les côtés, se téléportant à plusieurs reprises pour m’asséner de coups. Leo reprit la main pour stopper à nouveau ses frappes, toujours plus vigoureuses. Il se replaça en garde devant lui avant de disparaitre à nouveau.
« Je l’avais oublié celui-là.
– Il a été le dernier guerrier aldorien à te vaincre, maintenant c’est mon tour, dis-je.
– Très bien, qu’il en soit ainsi ! »
Il m’attaqua à nouveau de face, sa lame bloquée dans mon glaive, j’ai riposté avec trois coups, le propulsant à l’autre bout de l’arène.
« Abandonne, tant qu’il en est encore temps.
– Jamais… dit-il en souffrant.
– J’ai pitié de toi, Akziel t’a redonné la vie pour la gâcher à nouveau. Rejoins-moi, ensemble, nous pouvons le vaincre.
– Pourquoi vouloir l’achever ?
– Il met en danger des milliers d’hommes, il a fait tomber des milliards d’innocents. Il s’en prend au plus grand des guerriers pour le voir souffrir. Il n’y a que la vengeance qui compte à ses yeux. Laisse-moi te montrer la voie, dis-je en lui tendant la main.
– Je m’avoue vaincu, encore une fois, répondit-il serrant ma main pour se relever. »
Il nous fit revenir dans la tour, face à celui qui se prétendait être ma femme. Il n’eut pas le temps de me voir revenir que mon chronosceptre lui avait déjà transpercé le torse. Le temps qu’il restât à Leo était court, mais assez pour me laisser la chance d’aspirer son âme.
« OK, tu l’as vaincu, mais…
– C’est beau, fis-je me retournant vers Barabas.
– Tu l’as laissé en vie lui, on peut peut-être s’arranger ?
– C’est beau l’espoir. Dans tes rêves.
– Je… »
Je ne lui ai pas laissé le temps de finir sa phrase que je lui avais déjà transpercé la tête d’une balle. Il était fragile, tant qu’il n’était pas dans sa forme démoniaque.
« Sully, ramène tout le monde en sécurité.
– Aller, tous chez Zinn ! s’exclama Sully.
– Moi je retourne chercher Emeline. Si tu trouves Rein, sors-le d’ici aussi.
– Compris. »
Ma rage primait encore, la fumée suivait tous mes pas. On pouvait me suivre à la trace, mais les malheureux qui osaient le faire se retrouvaient tranchés en deux ou écrasés contre un mur. J’ai retourné toute la tour pour la retrouver, en vain. Quelque chose m’avait échappé. Puis j’ai repensé à ce que m’avait dit Leo, alors je me suis laissé tomber en arrière, dans ma fumée pour passer de l’autre côté, dans les limbes. Elle était là, devant moi, attachée comme j’avais trouvé Sia quelques semaines plus tôt.
« Tu es venu me chercher… dit-elle.
– Celle que Reinhardt avait sauvée n’était qu’une illusion, n’est-ce pas ?
– Comment tu l’as compris ? dit-elle épuisée.
– Tu n’es pas la fille de Reinhardt, mais celle de Sieg. C’est Nadia, la fille de Rein. Comment voulais-tu arriver à me duper ?
– Bien vu, dit-elle s’écroulant sur moi en la détachant.
– Tu pensais vraiment que j’allais te laisser comme ça ?
– Merci, d’être venu…
– Mais j’aimerais bien ressortir.
– Dans les limbes ? Comment y es-tu entré ?
– Je dois avouer que je ne le sais pas plus que toi. J’ai écouté mon cœur comme m’a dit Leo.
– Je dois pouvoir t’aider, mais tu dois laisser ta colère disparaitre.
– Comme tu voudras. »
Je l’ai laissé faire et l’ai écouté se mettre à chanter. Les clés de Sia et Alexia apparurent un instant dans ma main. J’ai pu ouvrir un portail vers l’extérieur, à côté de ma moto, étrangement. Quelques secondes après la fermeture du portail, la tour tombait en fracas.
« Encore une, dit-elle en souriant.
– Encore une, répliquais-je avec le même sourire. Viens, je te ramène. »
Encore quelques heures de trajet pour nous ramener chez Zinn. Emeline partit se coucher alors que j’avais déjà rejoint le toit du bâtiment pour contempler les étoiles. Je ne me préoccupais pas de ce qu’il se passait à côté, mon esprit était occupé par autre chose. J’avais une radio qui tournait sur le toit, qui diffusait les mêmes informations qu’à la télé.
« Je ne sais pas qui tu es, mais je sais que tu as déjà sauvé des milliers d’être infectés. Je ne sais pas pourquoi tu es ici, mais déjà des milliers de personnes te remercient. Sur ton passage, tu laisses cet étrange logo qui prône près de la citée de l’ennemi. Alors si tu entends ceci, sache que le monde t’est reconnaissant, toi qui te fais appeler la main des Dieux. »
Mardi 6 janvier 2015.
Il était trois heures du matin lorsqu’Emeline vint me rejoindre sur le toit alors que je venais à peine de finir une nouvelle bouteille de whisky.
« Tu ne dors jamais ? demanda-t-elle.
– Pas plus qu’avant, mes cauchemars me hantent toujours.
– Qu’est-ce que tu étais venu chercher dans cette tour ?
– Toi…
– Non, je sais que tu cherchais autre chose.
– L’Éternelle, elle était venue te chercher, mais elle ne t’a pas trouvé.
– Comment tu peux en être aussi certain ?
– Partout où elle est passée, elle signe ses exploits du logo de Leo, celui qui trône au-dessus de la citadelle.
– Qui ça pourrait être ?
– Je ne sais pas, personne ne l’a jamais rencontré, tout le monde me dit qu’elle est la plus belle femme du monde.
– Pourquoi elle ?
– Elle peut guérir l’infection, et j’ai besoin de Leo, dis-je transformant mon bras droit.
– Je comprends… »
Le silence resta quelque secondes, mais ne dura pas.
« Et Alix ? Tu ne comptes pas la retrouver ?
– Elle est morte, elle comme tous les autres, fis-je.
– Oh, je…
– Tu ne pouvais pas savoir, je sais.
– Je comprends mieux ce qu’il se passe dans ta tête, ton espoir s’est effacé.
– J’ai peur qu’effacé ne soit pas le mot juste. »
Et le silence revint, définitivement. Elle repartit se coucher et me laisser à nouveau face aux étoiles.
Lundi 9 février 2015.
Depuis mon retour je n’avais pas fait grand-chose, à part tourner dans le bâtiment et écumer toutes les bouteilles de whisky.
« Tu veux bien arrêter de boire ?
– Qu’est-ce que ça peut te faire Emeline, c’est mon problème, lui dis-je.
– Ce n’est pas parce que tu as tout perdu ou que tu as failli à ton devoir que tu dois te morfondre. Réveille-toi un peu et arrête de te rabaisser.
– Je n’ai pas de leçons à recevoir de toi !
– Pourtant tu en aurais besoin ! Regarde-toi, tu fais pitié à voir, tu as perdu tout ce qui faisait ta force, mais tu es encore debout. Je sais que tu n’as plus envie de te battre, mais tu as encore des milliers de personnes qui comptent sur toi. Et on compte sur toi. »
Elle s’en alla, me laissant perplexe sur les mots qu’elle venait de prononcer. J’avais lâché ma bouteille pour sortir, m’entrainer avec mon bâton. Je n’ai pas compté les heures que j’ai passé, à me souvenir de tous les mots de Sieg sur les placements, la vitesse, la précision. Les cerisiers, le bâton qui ne devait pas toucher une seule goutte de pluie, ou un seul des pétales qui tombait.
Emeline vint me joindre vers dix-neuf heures, le soleil était déjà couché et la neige commençait à tomber. Elle tenait un tube en verre dans les mains, son tube de messager.
« Je crois qu’il est pour toi.
– Donne. »
J’ai pris le papier entre les mains, il s’adressait à celui qui avait libéré l’arène. Je l’ai déployé pour en lire le contenu.
« J’ignore qui tu es, mais je sais que tu as de grandes capacités. J’ai besoin de toi pour achever ma quête, j’ai besoin de ta force et ta volonté. Rejoins-moi demain devant les Champs-Élysées, je t’y attendrai.
L’Éternelle. »
« Je dois y aller, dis-je en lui rendant son tube.
– Et si c’était un piège ? Et si c’était Akziel qui voulait te faire tomber, à nouveau parce qu’il avait compris qui tu étais.
– Alors, retrouve Sieg et dis-lui de relancer l’Horloge.
– Adam ! »
Je ne voulais pas me prendre la tête, tout ce que j’avais en tête c’était retrouver l’Éternelle pour abattre ce chien d’Akziel. Je ne me suis pas préoccupé d’Emeline qui voulait me retenir, j’ai pris ma moto pour rejoindre le centre de Paris.
Je me suis stationné à distance, pour protéger ma bécane et me préparer à une éventuelle embuscade. Les rues étaient désertes, ou presque. Seuls quelques infectés y rôdaient, trop perdus pour m’apercevoir. Une voix résonna quelques mètres plus loin. « Non, pitié » je me suis mis en chasse de la source, une ruelle éclairée par une lampe torche d’un homme attaqué par un de ces zombies à griffes.
« Je sais que tu m’as entendu, viens que je m’occupe de toi.
– Oh merci mon dieu… »
Je me suis élancé vers lui, le découpant avec mes griffes, ne lui laissant aucune chance, comme les autres. Je me suis retrouvé face au vieil homme, apeuré par mes actes et mes griffes que j’ai rétractées aussitôt.
« Navré de vous avoir fait peur, fis-je.
– Je…
– Aiden, pour vous servir.
– Merci.
– Vous avez des amis, de la famille encore qui n’est pas aussi zombifiée que celui-ci ?
– Non, cela fait quelques jours que j’essaie de me cacher, j’ai voulu sortir pour trouver de la nourriture, mais…
– Il vous est tombé dessus. Vous devriez être plus silencieux.
– Facile à dire.
– Et vous armer mieux qu’avec une lampe torche, une batte de baseball par exemple.
– J’écouterai vos conseils.
– Vous savez d’où ils viennent ?
– Je crois qu’il y a un nid à quelques mètres d’ici, si vous pouviez nous en débarrasser ?
– C’est vrai que les autres ne sont pas très dangereux, je vais voir ce que je peux faire.
– Merci mille fois !
– Au plaisir. »
J’ai quitté la ruelle pour continuer à arpenter la rue principale qui me mènerait aux Champs Élysées. Encore des zombies, encore plus de morts inutiles, encore plus de cadavres gisant sur le sol. Akziel avait fait un vrai massacre avec ce virus, je n’arrivais même pas à imaginer le nombre de personnes qu’il avait réussi à tuer avec.
Dix minutes plus tard, je tombais sur une ancienne station essence, les rapaces avaient installé leur nid dans le magasin. J’ai enfumé le tout, prenant soin de prendre les pompes à essence et j’ai frotté mon chronosceptre sur le sol pour allumer le tout. L’explosion provoquée fut plus petite que ce que j’imaginais, mais arriva quand même à me faire reculer.
Je continuais à arpenter les rues de Paris en quête de l’Arc, lorsque des coups de feu retentirent quelques mètres plus loin. Je me suis décidé à les rejoindre. J’avais toujours mon chronosceptre à la main. C’était l’arme la plus puissante que je possédais même si je ne pouvais l’utiliser à sa pleine puissance.
Je suis arrivé dans un magasin de vêtement, pris d’assaut par des bandits.
« Que personne ne bouge sinon je vous bute tous !
– Non, pitié, nous ne vous voulons aucun mal !
– Donnez-nous votre nourriture, et vite ! »
Je suis entré derrière eux, calmement alors que les assaillants ne m’avaient pas encore vu, mais les autres si.
« Allons, messieurs, du calme. Je suis sûr que nous pouvons trouver un arrangement.
– Quoi ? Mais d’où tu sors toi ? me fit celui qui paraissant être le chef.
– Oh ! Doucement, répondis-je en levant les mains face à son fusil, je m’appelle Aiden.
– Aiden ou pas, soit tu dégages, soit tu meurs !
– C’est bien radical comme solution, vous ne voulez pas écouter ce que j’ai à vous proposer ?
– Arête ton blabla et dégage !
– Bon… »
J’ai déployé mon sceptre pour tomber le premier, puis j’ai tiré sur chacun des autres, sans les tuer.
« Moi qui voulais être diplomate, c’est raté, repris-je.
– Qu’est-ce que tu veux ?
– Que vous dégagiez ! Allez faire les voyous à un endroit où je ne suis pas, sinon ta tête finira détachée de ton corps, et tes amis aussi.
– Oui, oui monsieur.
– Allez dégagez. »
Ils s’enfuirent plus vite qu’ils n’étaient arrivés, laissant leurs armes au sol.
« Merci encore, fit le vendeur.
– Au plaisir, rappelez-moi si jamais.
– On y pensera. »
Je suis sorti assez vite du magasin, pour observer la fuite des pillards, pas très courageux.
J’étais à une rue des Champs-Élysées, j’avais toujours les voleurs devant moi. Pas pour longtemps. Un grand rayon de lumière vint frapper la troupe pour les désintégrer. Je ne sais pas qui ou ce que ça pouvait être, mais ça ne m’avait pas l’air très accueillant comme truc, sacrément puissant du moins.
Mardi 10 février 2015.
La nuit avait bien avancé. Arrivé au coin du boulevard, j’ai commencé à ralentir, observer ce qu’il y avait autour de moi. Toujours des magasins, des boutiques de tout et de rien, des zombies.
J’ai fini par trouver un autre rapace qui rôdait dans les parages, dans une bijouterie. J’y suis rentré doucement pour pas qu’il ne me repère pas.
« Attention !
– Non, taisez-vous ! »
Un idiot devant moi m’interpela lorsqu’il m’aperçut. À cause de ça, le rapace m’entendit et se retourna sur moi pour m’attaquer. J’ai déployé ma lame pour bloquer son attaque. J’ai reculé sous ses violents coups. Il était bien plus fort que les autres. J’ai eu la merveilleuse idée de lui lancer mon glaive dans le cœur, qu’il n’apprécia guère.
« Vous auriez pu vous taire ! m’exclamais-je.
– Je…
– Il ne m’aurait pas entendu et j’aurais pu le tuer sans avoir à me battre.
– Désolé.
– Ce n’est pas grave, je suis toujours vivant après tout.
– Merci encore, dit-il gémissant.
– Vous êtes blessé, laissez-moi vous aider…
– Je crois qu’il n’y a plus beaucoup d’espoir pour moi.
– N’en soyez pas si certain »
J’ai redéployé mon chronosceptre pour allumer ma bague d’esprit, une fois de plus.
« Qu’est-ce que vous faites ?
– Je vais vous amener loin d’ici, vous y serez en sécurité.
– Mais…
– Ne vous posez pas de questions, si on vous en pose, dites que c’est Aiden qui vous envoie.
– Merci !
– Au plaisir, répondis-je avant qu’il ne disparaisse. »
Encore une personne que je venais de sauver, mais mon chronosceptre commençais à manquer cruellement d’énergie. Peut-être encore une ou deux personnes à sauver.
Quelques secondes plus tard, une explosion retentit à l’extérieur, mais assez étrange, comme si quelqu’un venait de se poser au sol en détruisant tout sur son passage.
Partie 6 : Esclave de la Lumière
L’odeur du goudron fondu m’avait attiré dehors, sur une route à l’étendue interminable. Je regardais l’horizon, mais impossible d’y apercevoir quelque chose, la neige bloquait toute la vision. J’étais venu ici pour trouver le grand héros qui sauve les gens de ce virus. J’ai avancé quelques mètres pour essayer de trouver d’où le sol fondait, puis j’ai trouvé cet insigne, mon insigne gravé dans le sol. « J’ai l’impression d’avoir déjà vécu cette scène » j’ai continué à avancer doucement, puis des bruits de pas se firent entendre. Pas les miens, des sons de talons sur le sol. J’avançais toujours lorsqu’une silhouette est apparue, féminine. Son long manteau blanc se fit apercevoir en premier. Puis elle m’est apparue en entier. Je me suis arrêté, craignant la menace. Elle portait un mini short noir, attaché à l’aide d’une ceinture en cuir avec de gros œillets. En dessous, un legging troué, des petites bottes en cuir marron avec le talon métallique. Sa veste était renforcée au niveau des coutures par des parties métalliques foncées. Une série de chaines attachée à son épaule droite pendait le long de son bras. La partie blanche du manteau s’arrêtait au niveau des épaules. Le haut des manches était noires, le reste était violet. Celle de droite s’arrêtait au coude, l’autre descendait un peu plus bas. Les deux manchettes étaient noires, serties de pics métalliques. Une série de bracelets entouraient son poignet droit et un bracelet métallique ornait celui de gauche. En dessous de la veste, un corset marron avec la fermeture devant. Le manteau tenait séré autour de son corps par des bouts de tissus déchirés noirs, attachés au niveau de sa poitrine. Un raz du cou en cuir noir avec une chaine attachée dessus et un étrange fragment de cristal vert. Une nouvelle série de chaines autour de son cou, sur lesquelles pendaient des pics. Son maquillage sombre lui faisait ressortir ses yeux bleus, les contours des yeux rouges me donnaient l’impression qu’elle était infectée. Des sortes de paillètes métalliques redessinait la forme de son maquillage autour des yeux, trois griffes sur la joue droite. Le tour de son oreille gauche était couvert de piercings argentés. Les cheveux bouclés, coiffés sur le côté droit, tressés et serrés au crâne sur le côté gauche.
J’avais l’impression de voir un ange, ou presque. Mais ma vivacité ne me trompait pas encore, j’ai sauté par-dessus son épaule pour trancher un rapace qui lui sautait dessus. Je me suis retrouvé à côté d’elle, ma lame déployée sur mon bras droit. Elle me regarda, effrayée, puis posa sa main sur mon torse. L’infection devint blanche avant que ma lame ne se rétracte d’elle-même. « Adam… » dit-elle avant de me serrer dans ses bras. Je ne sais par quel miracle, je ne sais par quel moyen, mais l’Éternelle était Alix, depuis le début. Je me suis senti revivre, encore. Je ressentais à nouveau toute la puissance de Leo, assez pour que mes lunettes se déploient d’elle-même.
« Comment ? dit-elle.
– J’ai le droit de te poser la même question.
– Jessica, c’est elle L’Éternelle.
– Oh, ça fait du sens.
– Mais toi ! Je te croyais mort ! Je t’ai cherché partout…
– Déporté sur une autre planète, loin d’ici pour qu’il puisse tout détruire.
– Viens, j’ai quelque chose à te montrer. »
Elle me prit par le bras pour me faire traverser les Champs-Élysées, sous la neige. J’arrivais à apercevoir son sourire sur son visage, je crois que je me sentais aussi bien qu’elle, j’avais retrouvé Leo, ma femme, rien ne pouvait briser l’apaisement que sa présence me procurait. Elle m’amena sous l’arc, où le Trésor des Âges s’était cristallisé. Je l’ai brisé pour récupérer l’anneau, qui prit la forme d’un ange sur mon pouce.
« Je n’ai pas réussi à le garder sur moi, alors je l’ai protégé, me dit-elle.
– Tu as bien fait.
– J’imagine que tu as déjà découvert tout ce qu’il s’est passé après le combat contre Akziel.
– Vous êtes tous tombé, je sais…
– Il ne reste plus que nous deux.
– Non, Sully est encore vivant. Et Sieg est vivant, puisque je suis encore vivant, dis-je.
– Tu veux le retrouver ?
– Maintenant oui, mais pas tout de suite.
– Mais, pourquoi ? Avec lui on peut en finir avec Akziel ?
– On peut, mais après tout on a tout le temps de l’univers avec nous.
– Tout le temps de l’univers.
– Viens, j’ai vu un café encore ouvert pas loin d’ici.
– Je te suis »
Certaines personnes vivaient encore une vie normale malgré tout ce qui se passait autour, aucune idée du pourquoi. C’était assez dingue, risquer sa vie juste pour essayer de vivre comme avant. Tout du moins, c’était le cas et nous étions partis le rejoindre. Le propriétaire n’avait aucune idée de qui j’étais, mais peu importe.
« Je me souviens de l’époque que l’on a passé dans le futur, toi et ton café.
– Tu as des souvenirs de cette époque ? Je n’aurais pas cru que c’était possible, dis-je étonné.
– Pourquoi ?
– J’ai gardé les apparences et mes souvenirs parce que Sieg l’a voulu, le fragment temporel qui est la Virginie du futur n’est plus censé exister.
– Tu oublies que l’Éternelle n’est pas liée au temps, pas à ton temps.
– Oh, oui c’est vrai. »
Je me laissais emporté par mes pensées en regardant le motif dessiné sur la mousse du café. C’était le symbole de l’Ordre, mais pourquoi lui ?
« Tu crois qu’il en reste d’autres ? demandais-je.
– Qu’est-ce que tu veux dire ?
– À part nous, ou Sully. Tous les autres sont morts ?
– Je ne sais pas, pourquoi tu te poses cette question ?
– Pourquoi prôner le symbole d’un clan si personne n’en fait la propagande, ou le prône plus haut que sa fierté ?
– Il aurait été celui d’Akziel je l’aurais compris.
– Qui pourrait porter ce symbole, il n’y a pas des milliers de personnes qui en ont fait partie… »
Je me suis laissé distraire par la dernière personne entrée dans le bar. Il portait un chapeau, mais qui ne m’était pas inconnu, j’ai voulu tendre ma main, lui faire signe pour l’interpeler sans crier, et le chapeau s’est décollé de sa tête pour venir se poser dans mes mains.
« C’est…
– Le chapeau de Chester, oui, dis-je le faisant tourner dans mes mains. »
Je n’ai pas daigné le rendre à son possesseur, je l’ai retourné et l’ai posé sur ma tête, pour ne pas le perdre.
« Encore, désolé Leo… dit-elle.
– Non, le hasard n’existe pas, et je n’ai pas besoin du livre de Sieg pour savoir que c’est un signe.
– Tu es certain que ça soit vraiment un signe ? Je crains surtout que tu sois devenu fou…
– Le problème viendra du jour où mon esprit sera sain Alix, vient avec moi. »
Enfin, les portails d’Hypérion résonnaient de nouveau entre mes mains, comme si je les avais perdus depuis des millions d’années. Je me suis rendu là où j’ai passé la majore partie de mon temps depuis mon retour.
« Ah, Adam te revoilà… Alix ? s’étonna Emeline.
– Ouais, je…
– Chester !
– Quoi ? répondis-je intrigué.
– Je crois que j’ai trouvé Chester, reprit Emeline, mais, loin d’ici.
– Où ?
– Dans les alpes, mais, on dirait…
– Une forteresse. C’est d’ici qu’Akziel déployât de bioReign, répondit Alix. »
Mon esprit était encore tangible, j’avais retrouvé Leo pourtant que je n’avais pas la preuve que je pouvais tout faire tomber sans y risquer ma vie. Je m’étais approché du fauteuil pour m’y laisser tomber, comme d’habitude.
« Quelle idée saugrenue t’est venue à l’esprit Adam ? demanda Alix.
– Laisse-le, il est juste encore ne train de déprimer parce qu’il cherche l’Éternelle, répondit Emeline.
– Amusant dit donc.
– Mais attends…
– Une idée particulière Adam ?
– Pas vraiment, répondis-je.
– Tu es en train de me dire que si Alix est vivante, c’est parce qu’elle est l’éternelle ? s’étonna Emeline.
– Ce n’est pas moi qui te le dis Emeline, mais oui, il y parait.
– Alors quoi ? On a l’être le plus puissant de l’univers avec nous, pourquoi ne pas aller casser le cul d’Akziel.
– Parce que ce n’est pas si simple que ça. C’est l’être le plus puissant, mais pas lorsque l’univers subsiste.
– Je ne comprends pas.
– J’aurais bien besoin du livre de Sieg finalement. Je ne sais pas quel genre de chose on va affronter, mais j’ai besoin de trouver le moyen de nous rendre plus fort, beaucoup plus fort. Vous savez où me trouver si jamais. »
Je me suis posé sur le toit, réveillant Leo de son sommeil, puis j’ai repris mon entrainement, pendant quelques heures, puis je me suis allongé sur une des chaises. Je savais que mon cauchemar allait revenir, mais je prenais le risque. Je me suis réveillé bien plus tard, avec Adam, bien plus loin. Avec comme seul paysage devant moi la Terre, dans toute sa splendeur.
« Je commençais à croire que tu ne te réveillerais jamais.
– La lune, pourquoi nous avoir amené ici ? »
Alix se tenait à côté de moi, assise sur une des chaises qu’il y avait sur le toit.
« J’ai quelque chose à t’expliquer.
– Oui, dis-moi tout.
– Ce que tu disais à Emeline était vrai, mes pouvoirs ne grandiront que si le monde devient instable.
– Je ne vois pas où tu veux en venir.
– Je vais revenir au moment où tu as disparu, lors du combat contre Akziel. Tu portes ton coup contre lui, Chester et Zhao aussi, tout est absorbé par une sorte de masse sombre qui vient de se former devant lui. Tu disparais, Zhao est envoyé à des kilomètres et Chester se retrouve à mes pieds…
– Tu as réussi à voir tout ça ?
– J’ai repris conscience au moment où tu m’as lâché.
– Oh…
– L’Éternelle m’a réveillé, toujours plus puissante, mais j’avais les mains qui tremblaient, je n’ai pas réussi à attaquer Akziel avant de m’évanouir. Je me suis retrouvé sur la lune bien plus tard, mais déjà trop tard.
– Et Chester ?
– Il y a toute une formation autour de lui, une immense forteresse qui fait vivre encore et encore le virus.
– Je n’aurais pas pensé que c’était aussi critique.
– Mais il y a autre chose. Tu pourrais me demander pourquoi je n’ai pas profité de cette puissance à ma réanimation, ou pourquoi je n’ai pas utilisé les morts pour forcer ma puissance et tout anéantir.
– J’imagine qu’il y a des raisons.
– Il n’y a aucun seigneur de la mort.
– Quoi ?
– À la création de l’univers, L’Éternelle crée différentes choses. Les formes de vies et l’aspect qu’elle souhaite donner à son univers. J’ai créé deux autres choses, l’horloge et j’ai nommé Nova comme gardien et un seigneur de la mort, gardien de la puissance des êtres suprêmes.
– Qui était ?
– Yukon, The Pretorian, Le Grand Roi, comme tu veux l’appeler.
– D’accord, il est mort et personne n’a été nommé à sa place. Alors, pourquoi ne pas avoir forcé ta mort pour essayer de le détruire ?
– Je t’ai dit que j’ai perdu mes moyens, je tremblais, je n’arrivais pas à voir correctement, puis je me suis évanoui.
– Alors quoi ? Qu’est-ce que j’ai raté ?
– Je me suis demandé pourquoi, puis c’est Jessica qui m’a donné la réponse. Je suis enceinte. »
Je n’ai rien su dire, j’étais, perdu, émerveillé, et en partie effrayé.
« Alors je n’ai pas voulu m’affronter à la mort une fois de plus, je n’ai pas eu envie de le perdre.
– Mais, depuis combien de temps ?
– 8 mois maintenant.
– Ça fait si longtemps que ça que je suis parti…
– J’ai l’impression que ça te fait peur, c’est vrai ?
– Ça veut dire qu’il faut que je te protège.
– Moi je vois les choses autrement, pourquoi ne pas rollback ?
– Tu, veux que je revienne au moment de ta résurrection ? Et qu’on tue Akziel ?
– Bien sûr, c’est la meilleure des idées !
– La meilleure pour briser l’espace-temps surtout.
– Quoi ?
– Viens avec moi. »
J’ai ouvert un portail vers la galerie des miroirs de l’Horloge. Seul Nova pouvait vivre ici, alors j’ai avancé, rejoignant la console de l’Horloge.
« Bienvenue gardien, fit la voix.
– Que veux-tu me montrer ? demanda la femme.
– Tu veux qu’on retourne là-bas ? D’accord, mais laisse-moi te montrer comment ça va se passer. Envoie-nous au jour où l’on a affronté Akziel, permet moi d’utiliser sa puissance pour le détruire.
– Tout de suite Gardien. »
L’Horloge retraça le temps, montrant comment Leo et Alix auraient pu détruire Akziel, tout allait bien, jusqu’à ce que des dizaines de planètes explosent, ou disparaissent englouties par des trous noirs.
« Si le temps était une science fiable, et pas si fragile, on pourrait rejouer tous les évènements de notre vie sans se préoccuper des paradoxes. Or, ça n’est pas le cas.
– Alors pourquoi tu le fais ? demanda Alix.
– Je me le permets dans la mesure où les paradoxes sont facilement réparables, ou lorsqu’ils ne sont pas aussi impactant.
– Alors, comment est-ce que l’on procède ?
– J’ai besoin de quelque chose, quelque chose qui n’arrive pas à me sauter aux yeux. »
J’ouvris un portail pour sortir de l’horloge, sans une seule seconde me soucier de sa sortie, je me suis retrouvé, à La Havane, à Cuba. Alix me suivit quelques secondes plus tard.
« Adam ? Ça va ? demanda-t-elle.
– Y’a quelque chose qui ne va pas.
– Quoi ? Le fait qu’on apparaisse n’importe où ? répondit-elle en rigolant.
– Pourquoi je ne ressens pas le virus ? »
Puis le temps reprit son cours, après notre escale sur l’horloge. On était sur une place, avec une fontaine au centre. Les habitants commencèrent à traverser la place, paraissant vivre assez paisiblement.
« Le bioReign n’est pas parvenu jusqu’ici ? s’étonna Alix.
– Ou il y a quelque chose d’autre.
– L’horloge aurait voulu te montrer quelque chose en nous ouvrant le portail ici ?
– Allons le découvrir. »
La vie avait l’air de se faire assez aisément. La population semblait souriante, tranquille. Il avait dû pleuvoir quelques heures avant, les murs des maisons étaient encore trempés. Alix paraissait aussi heureuse que les habitants, alors que je restais toujours aussi tracassé par comment nous pourrons sauver ce monde en détresse. Peut-être que j’exagère, peut-être.
« Adam ! » Alix me prit par la main pour m’amener vers un magasin de donuts, à Cuba, pourquoi pas. Toujours aucun attrait pour la nourriture locale.
« S’il te plait, juste une fois !
– Juste une fois ? m’étonnais-je.
– Oui bon d’accord, je te fais ça depuis des années, mais, si c’était un problème tu me l’aurais déjà dit non ? »
Je refusais rarement ses caprices, pas aujourd’hui. Nous avons passé notre journée aussi aisément qu’eux, enfin nous avions la chance de retrouver un peu de répit. La plage, voilà l’endroit où nous avions fini notre journée. Malgré la régulation de chaleur de mes augmentations, je m’étais mis torse nu, allongé sur le sable.
« Pour une fois tu ne te réfugies pas sur un toit pour penser, dit-elle.
– Trop de choses qui m’échappent.
– Tu te demandes toujours pourquoi ils n’ont pas subi l’infection ?
– Pas seulement.
– Comment ça ? demanda-t-elle se relevant.
– Mettons qu’on arrive à le tuer, qu’on arrive à le sauver. Comment on lui rend sa forme ?
– Je ne comprends pas.
– Les flammes et les cendres trônent dans toutes les villes, le monde pue la mort à tous les coins de rue. Tu penses que c’est ce monde que l’on doit offrir à nouveau aux Hommes ?
– Je n’y avais jamais pensé.
– Qu’est-ce que je rate… »
Alix s’était allongée à nouveau, presque une heure plus tard, alors que le ciel était devenu sombre, Alix était déjà endormie. Je suis parti, j’ai repris ma veste puis j’ai à nouveau arpenté les rues de la ville. Je ne savais pas ce que je cherchais, mais je savais que ça se trouvait ici. J’avais une habitude lorsque j’étais de service au FBI, lorsque j’en sortais, je faisais un tour de la ville, mon casque sur les oreilles. Beaucoup de personnes me prenaient pour un étranger, la majorité était des mecs bourrés. Cette fois-ci, mon système avait choisi « Nerves endings » de Too Close to Touch.
La ville était plutôt calme à cette heure-ci, je pense que ma musique faisait plus de bruit que tout ce qui pouvait résider autour de moi. La ville dormait, et moi je n’y arrivais toujours pas. Mes pas me guidèrent vers la cathédrale de la ville, pourquoi ?
Il était presque minuit quand j’ai pénétré dans la cathédrale, ouverte étrangement. Il n’y avait que peu de lumière, quelques bougies sur les piliers de l’allée. Mais je ressentais autre chose, une force plus puissante. J’ai avancé vers l’autel, m’approchant d’une sorte de tombeau. Je ne comprenais pas ce qu’il y avait d’écrit dessus, j’avais oublié une partie des langues de ce monde avec le temps. Une sorte de voix me poussait à l’ouvrir, ce que j’ai fait. J’y ai trouvé un grimoire, un vieux livre dont je n’avais aucune idée de la manière dont il avait pu survivre. Le livre appartenait apparemment à Victor ? J’ai pris assez de temps à ouvrir la tombe pour que mon système embarqué traduise les écritures du tombeau. « Ici repose Le Grand Roi, avec son savoir jamais déchiffré » « Un savoir… » dis-je alors que j’étais toujours seul. J’ai refermé la tombe, me suis installé en tailleurs dessus, puis ai pris le livre entre mes mains.
« Without hope, without witness, without reward »
Voilà les seuls mots qui étaient gravés sur la couverture. Les pages avaient jauni, mais les écritures étaient encore intactes. La couverture paraissait plus lourde que le reste du livre. Je n’arrivais pas à déterminer avec quoi elle avait été faite. Les bordures avaient été renforcées par des pièces métalliques, et la première couverture était ornée d’un crâne avec des cornes. J’ai alors pris le temps de le lire, de le déchiffrer et d’en comprendre tout son sens.
Mercredi 11 février 2015.
Les heures avaient passé, et j’avais traversé toutes les idées que contenait le grimoire. J’en arrivais aux dernières pages, le journal de Victor, quand Alix et un étranger entrèrent dans la cathédrale.
« Adam, mais qu’est-ce que tu es venu faire ici ? demanda-t-elle.
– Une seconde.
– Quoi ? »
J’ai dégainé un des pistolets pour tirer dans la tête de l’étranger. « Adam ! » cria Alix effrayée parce ce que je venais de faire. « Mais qu’est-ce qu’il te prend ? » Je n’ai rien répondu, j’ai tendu ma main vers le cadavre, l’entourant d’un halo verdâtre. Le cadavre prit cette même lueur, j’élevais ma main dans l’espoir de relever ma cible. Plus je forçais, plus ma main tremblait, mais le corps se relevait, tremblant, démembré.
« Explique-moi… me dit-elle.
– Je crois que je sais comment on peut faire tomber Akziel.
– Tu me fais peur…
– Ah tu parles de ça ? fis-je en montrant le cadavre réanimé. Un détail. »
Une seule passe de ma main devant lui pour le ramener en vie et loin de chez nous. J’ai alors pris mon grimoire sous le bras et pris Alix avec moi, dans un café. Il était dix heures passées quand nous y sommes entrés, commandant un café et un cappuccino.
« Ton livre…
– Grimoire, repris-je.
– Quoi ?
– C’est un grimoire, pas un livre. Techniquement c’est la même chose, mais un grimoire est un livre qui contient des détails sur des choses qui sont magiques, ou surnaturelles.
– Oui, bon. Mais pourquoi ?
– Je me suis posé la question, qu’est-ce qui nous amené ici, pourquoi le portail est apparu à La Havane. Pourquoi elle n’a pas été touchée ? Je vais te donner ma vision des choses. Chester est le centre de l’épidémie, et a dû vouloir protéger cet endroit.
– Mais pourquoi ?
– Cette nuit quand je suis parti me balader, j’ai avancé jusqu’à la cathédrale, j’y suis rentré et me suis rapproché d’un tombeau. Les inscriptions disaient : Ici repose l’unique maitre des morts, avec son savoir jamais déchiffré.
– L’unique maitre des morts ?
– J’ai ouvert le tombeau, il était vide, mais il restait une chose, le grimoire.
– Et tu l’as lu ?
– Entièrement. Il détaille toutes les techniques et l’art de la nécromancie, ses techniques.
– Mais pourquoi avoir écrit ça ?
– Rien ne me dit qui a pu écrire ça, encore moins pourquoi il est écrit avec un langage semblable à de l’Aldorien.
– Mais, ça ne m’aide pas à savoir comment on peut vaincre Akziel.
– On doit être plus puissant, et pour ça on va réveiller la chose qu’il y a dans le tombeau.
– Quoi ?
– Depuis que je suis revenu sur Terre, je fais, encore et toujours le même cauchemar lorsque je m’endors. Je me vois, à genoux devant toi les mains en sang, et je me vois mourir, à chaque fois.
– Et après tu dis que tu ne crois pas à la destinée.
– Ça fait des années que j’ai des visions.
– Écrites parce que ?
– Qui sait ? Je n’en ai pas la moindre idée.
– Donc, si j’ai bien compris. Il faut que je te tue pour le faire revenir à la vie ?
– Si j’arrive à maitriser sa nécromancie, je dois pouvoir le réanimer.
– Et si tu n’y arrives pas ?
– Je me serais sacrifié pour rien.
– Non ! Hors de question que je te sacrifie pour sauver le monde. Je préfère encore avoir à tout recommencer.
– Laisse-moi te prouver le contraire.
– Comment ? Tu veux te suicider, et me montrer que tu peux ressusciter toutes les âmes de Toshiie ?
– Laisse-moi le temps, le temps de voir l’enfant naitre, le temps de trouver la limite de ce que j’ai entre les mains.
– Et le temps a Akziel d’aller toujours plus loin, dit-elle en sortant du café. »
J’en ai alors fait de même. Je n’avais qu’une seule envie c’était d’arriver à maitriser à la perfection le pouvoir de Victor, quel qu’en soit le prix. J’ai passé mes journées à étudier chaque portion du grimoire, chaque façon d’interpréter les choses, de les écrire, de les décrire. Plus je le lisais, plus les mots s’ouvraient à moi, à ma compréhension.
Cette même nuit, je suis retourné dans la cathédrale. Après avoir passé des heures à essayer de ranimer des morts sur une ile peu loin d’ici. Sous le tombeau du Grand Roi, j’ai trouvé des escaliers, fait d’un marbre blanc sans pareil. J’ai descendu les marches, donnant sur un long couloir fait de cette roche blanche, orné de dorures si particulières. J’ai continué mon chemin, jusqu’à arriver dans une salle qui s’illumina à mon entrée. Devant moi, une étrange structure faite d’or et de blanc. Un grand socle, élevant un anneau au-dessus de lui. Au cœur de ce cercle, il y avait une créature qui semblait morte, mais dont la peau ou l’armure semblait être faite de pierre et de fer. À la base du socle s’illuminait un texte en hologramme. Il disait ceci :
With the weight of the world crashing
Pushing you closer to the edge
You find a way to get a little bit stronger
To fight off the demons
« Que viens-tu faire ici ? me demandais-je. »
Étais-je supposé le réanimer ? Le grimoire que j’avais trouvé précédemment me donnait des indications sur la magie que contrôlait le grand roi. Mais rien sur ce qu’il était, ou qui il était. J’avais devant moi cet être à l’aspect si singulier, qui pour moi aurait pu être un Saory. Leo apparut quelques instants plus tard.
« Tu le connais ? demandais-je.
– Je n’ai aucune idée de qui il peut être, répondit-il.
– Que dois-je faire alors ?
– Tu veux essayer de le réanimer ?
– Penses-tu que c’est une bonne idée ? »
Il laissa quelques secondes de blanc, s’en allant derrière la stèle. Il me fit signe de le rejoindre.
« Qu’as-tu trouvé ? demandais-je.
– Quelqu’un est déjà venu ici. »
Il me tendit une feuille, d’un papier aussi âgé que celui qui a servi pour écrire le grimoire. Il disait :
« J’ai voué ma vie à créer quelque chose d’assez puissant pour animer cet être. Mais mon temps s’enfuit alors qu’il est toujours ici, endormi depuis la nuit des temps. Il me manque toujours une chose, un écrit qui reste perdu depuis longtemps.
Je ne sais pas si quelqu’un trouvera cet écrit, ou cet être. Je ne sais pas si quelqu’un sera en mesure de le ramener à la vie…
Les écrits le nomment à être celui qui nous sauvera tous, celui qui nous permettra de perdurer, mais tant qu’il dort ici, tout est voué à l’échec, encore une fois…
Je n’ai rien du Grand Roi…
Yukon »
Leo fixait étrangement l’anneau qui se trouvait derrière la feuille que je tenais.
« Qu’y a-t-il ?
– J’ai l’étrange sentiment que cette arme pourrait nous aider, dit-il désignant l’arme que je portais au doigt.
– Tu veux que j’essaie de le réanimer en faisant appel à l’anneau ? Tu veux que je meure à mon tour c’est ça ?
– Non ! Rien ne nous prouve que tu y resteras. »
Je n’ai rien dit à, mon tour, et suis retourné devant la créature. Elle m’inspirait une étrange confiance, malgré le fait que son corps et son aspect semblaient menaçants. Je suis resté quelques instants devant lui puis j’ai regardé Leo qui s’approchait de moi.
« D’accord, essayons. »