Suis-je fou ? Où suis-je rationnel d’avoir cette pensée ?
Mais bien plus récemment, plus proche de la date de ce dernier élan de colère contre mon frère, j’ai croisé cette chanson de Jinjer. I Speak Astronomy.
Cette chanson parle d’alter ego, d’âme sœur. Perdue dans les tréfonds de l’espace.
« Wave your hand from parallel universe
Hidden in a folded palm
After twenty-eight lightyears my research
Must be ended somehow »
La première fois que j’ai entendu ce morceau, je me suis dit : qu’est-ce que je viens d’écouter là ?
Et comme je l’ai évoqué avant, j’ai laissé mon cerveau s’en aller, alors que je m’étais promis d’attendre…
La personne dont je veux vous parler, ce n’était pas la première fois que je la croisais. J’aurais dit que c’était la quatrième ou cinquième.
Peut-être vous parlerais-je de ces encontre plus tard, mais pour l’instant…
Quelques jours avant l’instant dont je souhaite vous parler, je viens voir mon amie tatoueuse. Il m’arrive souvent de sortir de mon travail à treize heures et de passer la voir à son salon, alors qu’elle est en train de manger. Je suis venu la voir après quelques semaines sans « être sorti de ma grotte ». J’y croise un autre ami que je n’ai pas revu depuis au moins aussi longtemps. Je me suis posé sur le canapé avec lui, alors que mon amie travaillait. Nous passèrent l’après-midi à refaire le monde, comme à chaque fois que l’on se voit.
Passent donc les clients de ma tatoueuse, auxquels je ne fais pas attention. Seul, un nom m’inspire vaguement quelque chose lorsque je passe derrière le comptoir prendre un café.
Puis, après avoir passé des heures à vouloir réécrire l’histoire avec Max, je vois remonter cette femme dont le nom m’évoquait quelque chose. Je n’avais pas prêté attention à son arrivée, j’étais trop préoccupé par la discussion que j’avais avec celui qui m’accompagnait sur le canapé.
Alors, lorsque je m’approche à nouveau du bar, y posant ma tasse, arrive cet instant avec la femme qui venait de terminer sa séance.
Un regard, un sourire, un petit échange gêné de notre part. Et ce n’était pas la première fois, je crois…
[Lexi: S02E07]
« J’ai l’impression d’avoir vécu l’essentiel de ma vie dans mon imagination. Tous ces petits moments que j’ai vécu et que j’ai transformés en des moments grandiose et magnifique.
Un petit échange et je tombe amoureuse.
Mais la réalité trouve toujours un moyen de me rattraper et de me faire revenir en arrière. »
J’ai déjà posé cette ligne d’Euphoria dans Beyond The Pines. J’ai été matricé par cette série. Mais c’est ce que j’ai ressenti, encore une fois.
La précédente fois où j’ai croisé cette personne, c’était dans un supermarché. J’ai croisé son regard, alors que je faisais mes courses dans une fuite de connexions sociales, les écouteurs sur les oreilles. Je me souviens de son sourire, mais je ne lui ai pas rendu cette fois-ci. Il est vrai que lorsque nos regards se sont croisés, je ne me souvenais plus de son visage, je ne me souvenais plus où je l’avais déjà croisée.
Alors, cet échange ce jour-là me perturbe. Je me sais aveugle de cette chose, j’ai toujours eu du mal à voir si quelqu’un me montrait qu’il s’intéressait à moi. L’aurais-je vu cette fois-ci ?
Mais le temps avance, et s’approche une nouvelle encontre avec elle. La veille de ce jour-là, j’évoque à ma tatoueuse que je m’intéresse à cette femme.
– T’as flashé sur une de mes clientes ? me dit-elle.
Sofia, donc, s’étonna de mon affirmation. Et elle avait un air, typique. Elle devenait très expressive lorsque l’on sortait de nos schémas habituels.
– Non ! T’as flashé sur une de mes clientes ! m’affirma-t-elle. Sur qui ?
– Tatiana, lui répondis-je.
– Tatiana Svakera ? C’est vrai qu’elle est gentille.
– Je n’ai rien tenté encore, mais voilà, j’voulais te tenir au courant.
Ce jour-là donc, je rejoins encore Sofia avec mon meilleur ami pour manger avec elle et passer l’après-midi dans son salon.
– Y’a Tatiana qui vient cet après-midi, avec sa meilleure amie, me dit-elle.
– Ah ouais ? m’étonnais-je. Je me souvenais qu’elle devait revenir, mais je ne savais pas quand.
Sofia m’avait demandé d’aller voir une de ses voisines, pour un problème de robinet qui fuit. Je suis allé la voir, et en suis revenu une heure plus tard. Lorsque je suis revenu dans le salon, mon meilleur ami m’y attendait.
– Elle est là, me dit Abdel.
– Je sais, Sofia me l’a dit quand on est arrivé à midi.
– Et elle a un petit style, j’aime bien.
– Ne parle pas trop vite, je te rappelle que ma vie s’attache du chaos.
Puis après quelques minutes à discuter des soucis de plomberie de la voisine, j’ai vu remonter de la salle de tatouage, Tatiana et son amie.
Si je devais élaborer sur la manière dont je vis les interactions avec les gens. J’aurais tendance à dire que mon aptitude sociale vient avec beaucoup de temps. Je porte longtemps ce masque, qui ne laisse transparaitre que de la timidité, de la gêne, de la discrétion. Puis les choses changent au fil du temps, jusqu’à savoir si je dois laisser tomber le masque avec certaines personnes ou non. Lorsque ces interactions prennent en compte quelqu’un à qui je m’intéresse, je fuis. Et c’est un problème, car comment puis-je remarquer si quelqu’un s’intéresse à moi ? Si le simple fait de penser que les gens puissent voir derrière le masque m’effraie. Peut-être serait-il temps d’oublier l’existence de cette chose…
Encore une fois j’ai remarqué ce sourire, à défaut d’avoir remarqué la tenue qu’elle portait qui me laissait apercevoir un nouveau détail, un nouvel accessoire à chaque regard.
Elle portait une robe rouge, un corset noir par-dessus. Un gant en dentelle à la main droite et deux signes typiques que je reconnaissais à chaque fois que je l’apercevais. Ses bottes au talon de presque dix centimètres, et un rouge à lèvre rouge qu’elle portait systématiquement.
Mais quelque chose était cassé. Depuis quand arrivais-je à ne pas me cacher dans un coin dans ce genre de situation ? Est que c’est parce que j’étais entouré de personnes qui me connaissent ? À qui fais-je pleinement confiance ? Où est-ce parce que j’ai enfin oublié à quoi ressemblait ce masque ?
Nous étions sortis pour profiter du soleil, quand je reçois cet appel.
– Salut, est-ce que ça te dérange de venir me chercher et me ramener du coup ? J’ai pas trop envie de pousser ma copine à me ramener, la faire stresser encore plus.
J’ai poussé un long soupir, je savais que cette requête allait venir.
– Oui, fis-je exaspéré. Je vais te ramener.
– J’ai l’impression que ça ne te fait pas plaisir…
– Ce n’est pas ça, c’est surtout que j’avais des choses de prévues. Mais ce n’est pas grave, je vais venir.
– Tu me le dis si tu ne peux pas vraiment, je me débrouillerai… me dit-il.
– Non, envoie-moi un message quand tu sors et j’arrive.
– OK, à tout à l’heure.
Je suis retourné avec mes amis et les clientes de Sofia.
– Ça va ? me demanda Sofia. Tu as l’air énervé.
– Ouais, répondis-je m’asseyant sur les escaliers à côté d’elle. Faut que j’aille le chercher aux urgences et le ramener chez lui.
– Attends, tu vas vraiment aller le chercher et péter un aller-retour pour le ramener ? s’étonna-t-elle.
– Évidemment Sofia, il ne le ferait pas pour moi et pourtant je viens encore l’aider.
– Mon pauvre Allan, me dit-elle posant sa tête sur mon épaule.
– Vraiment je le déteste, reprit Abdel. Il n’a pas d’amis en fait.
– Il les a tous fait tomber un par un, tu le sais bien.
Et je suis parti, attaché à la haine encore.
« Give me back What’s Mine »